L'AIEA et la Russie tiennent à la coopération bilatérale

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MOSCOU - par la commentatrice politique de RIA Novosti Marianna Belenkaïa. Le renforcement du régime de la non prolifération des armes de destruction massive est un objectif prioritaire des autorités russes, a-t-on appris mercredi de sources diplomatiques au terme de la visite du directeur général de l'AIEA Mohammed el-Baradei à Moscou.

M.El-Baradei s'est rendu en Russie pour participer à une conférence consacrée au 50e anniversaire de la mise en exploitation de la première centrale nucléaire du monde à Obninsk. Les participants à la conférence ont passé en revue l'histoire du développement du nucléaire civil et de ses perspectives. Ce sujet a ensuite été évoqué au cours des entretiens entre le directeur général de l'AIEA et les officiels russes.

La Russie et l'AIEA estiment que l'énergie nucléaire a de grandes perspectives, mais qu'il faut tout faire pour l'utiliser uniquement à des fins pacifiques. Le niveau des rencontres de M.El-Baradei témoigne de l'importance que la Russie attache au problème de la prolifération des armes de destruction massive. Outre les entrevues avec le Premier ministre russe Mikhaïl Fradkov et les meilleurs spécialistes russes du nucléaire, qui se sont tenues dans le cadre de la conférence, le directeur général de l'AIEA a eu des rencontres avec le secrétaire du Conseil de sécurité Igor Ivanov, le ministre des Affaires étrangères Sergueï Lavrov et le président Vladimir Poutine.

Rappelons qu'il s'agit du deuxième entretien de M.Poutine avec M.El-Baradei. Ils ont fait connaissance à Moscou en novembre 2000, deux mois après que le chef de l'État russe eut proposé, lors du sommet du millénaire de l'ONU, de ne pas utiliser les matières fissiles militaires - uranium enrichi et plutonium pur - dans le nucléaire civil. D'après cette initiative, il faut augmenter la sûreté des centrales nucléaires, renforcer la base technologique du régime de la non prolifération et régler le problème du traitement des déchets radioactifs au cours des dix prochaines années. Le directeur général de l'AIEA avait alors appuyé les propositions russes.

Au cours de sa visite, M.El-Baradei a remercié la Russie pour son soutien dans tous les domaines, "y compris dans la discussion sur l'utilisation de l'énergie nucléaire à des fins pacifiques et la non prolifération des armes nucléaires".

Moscou estime que la menace de dissémination des armes de destruction massive est toujours présente. La communauté mondiale doit placer "ces processus sous un contrôle international strict pour que ces armes ne tombent pas entre les mains de ceux qui en profiteraient pour déstabiliser la situation", de l'avis d'Igor Ivanov.

Les diplomates russes ont déclaré à maintes reprises que le terrorisme international, le crime organisé et le trafic de matières nucléaires, chimiques et biologiques étaient étroitement liés. Moscou considère que le problème du marché noir des armes de destruction massive mérite une attention particulière. Les inspecteurs internationaux n'ont pas eu le temps d'achever leur mission de recherche et de destruction d'armes de destruction massive et de matières fissiles en Irak avant l'occupation de ce pays au printemps 2003. Faute d'un contrôle approprié, beaucoup de stocks irakiens de matières et d'équipements dangereux ont été pillés pendant l'occupation. Personne ne sait où se trouvent actuellement les biens volés en Irak. Moscou a insisté sur l'intégration d'une clause dans la nouvelle résolution 1546 du Conseil de Sécurité de l'ONU sur la révision des mandats de la COCOVINU et de l'AIEA dans ce pays. Il faut relancer au plus vite les inspections internationales en Irak, telle est la position russe.

Le renforcement du régime de la non prolifération au niveau interétatique est un autre domaine d'activités. Le secrétaire du Conseil de sécurité de Russie Igor Ivanov a souligné que la Russie s'opposait catégoriquement à l'apparition d'autres États disposant d'armes nucléaires. Dans cette optique, elle "coopère activement avec tous les pays et l'AIEA, participe au règlement des problèmes nucléaires nord-coréen et iranien", selon lui.

Moscou préconise que Pyongyang et Téhéran aient le droit d'utiliser l'énergie nucléaire à des buts pacifiques à condition qu'ils collaborent avec l'AIEA. Accusée par les fonctionnaires américains et israéliens de soutenir le programme nucléaire de Téhéran, la Russie répond toujours qu'elle n'est pas intéressée au développement des armes de destruction massive en Iran qui se trouve à proximité de ses frontières. Elle se déclare prête à tout faire pour éviter ce scénario (la même chose concerne la Corée du Nord).

La participation des spécialistes russes à la construction de la première tranche de la centrale nucléaire à Bouchehr et le programme nucléaire iranien sont deux dossiers différents pour Moscou, selon les sources diplomatiques. L'AIEA partage cette opinion. Mohammed el-Baradei a annoncé, lors d'une conférence de presse, que le dossier de la centrale de Bouchehr n'avait pas été évoqué au cours des entretiens avec les dirigeants russes car il n'inquiétait pas la communauté internationale. Rappelons que le président russe Vladimir Poutine a déclaré début juin, au cours du sommet du G8 de Sea Island, que la Russie pouvait arrêter les travaux à Bouchehr si l'Iran n'accédait pas aux exigences de l'AIEA concernant la transparence sur son programme nucléaire. D'ailleurs, il a souligné que Moscou ne voyait pas de raisons pour arrêter les travaux tant que l'Iran respectait ses engagements.

Les entretiens de M.El-Baradei à Moscou ont également porté sur l'éventuelle construction du Centre international de stockage et de traitement du combustible nucléaire irradié en Russie. Les autorités russes examinent ce projet car elles jugent nécessaire de mieux contrôler le combustible usagé. Cependant la Russie n'est pas le seul pays où l'on pourrait ériger un tel centre. Une décision définitive sera prise au terme de nombreuses analyses d'experts russes et de l'AIEA.

Mohammed el-Baradei a hautement apprécié l'attention portée par la Russie au problème de la prolifération des armes de destruction massive. "La coopération bilatérale Russie-AIEA évolue à un excellent niveau, nous collaborons dans l'utilisation pacifique de l'énergie nucléaire et nous apprécions hautement son soutien".

Le président russe Vladimir Poutine a, pour sa part, noté que les activités de l'AIEA étaient très professionnelles et qu'elles ne dépendaient pas de la conjoncture politique. C'est ce que la Russie apprécie plus que tout.

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