Après huit jours de festivités qui marquent le début du Carême, la fête de Maslenitsa (mardi gras russe) s'est achevée ce week-end par une température peu printanière.
Cette tradition païenne, fêtée entre fin février et début mars, marque la fin de l'hiver. Mais cette année, l'ancien domaine royal de Kolomenskoe (situé au sud-ouest de Moscou), qui a accueilli les festivités de clôture du mardi gras russe, ressemblait davantage à une mini station de sports d'hiver.
"C'est un évènement vraiment unique, la Maslenitsa est une tradition populaire importante, elle fait partie de notre histoire, de notre peuple! " Comme bon nombre de grands-mères, Tatiana s'est levée tôt ce dimanche pour préparer des blinis à ses petits enfants. Ces crêpes qui symbolisent le soleil et annoncent l'arrivée du printemps font le bonheur des tout petits qui frappaient traditionnellement à toutes les portes du village pour en recevoir.
Les vendeurs, improvisés pour l'occasion, sont unanimes, le blini au lait concentré sucré est encore cette année le plus populaire, devançant les crêpes au miel et à la confiture. Tatiana pour sa part les préfère au saumon, avec de la crème fraîche et rajouterait volontiers du caviar. Traditionnellement, la recette du blini est un petit secret que l'on garde farouchement "... aujourd'hui, malgré la technologie, chacun y apporte encore sa petite touche personnelle, son petit truc ...", ajoute-elle, confiante quant à la pérennité de la tradition.
Comme chaque année, Inna a monté son stand sur une des buttes du parc, pas trop loin de la cafétéria pour pouvoir se ravitailler en thé. Les oberegs (amulettes) un peu tristounets font aussi parti du folklore, ils protègeront les maisonnées jusqu'à l'hiver prochain, "les anciens attachaient beaucoup d'importance à ces porte-bonheur faits de fleurs et de plantes...". Mais les années passent et les gris-gris traditionnels en paille font place à des gadgets plus racoleurs.
D'autres stands un peu plus colorés n'auraient manqué cette fête sous aucun prétexte, car la Maslenitsa, "c'est aussi l'occasion pour les gens de dépenser de l'argent... et puis les enfants sont de plus en plus exigeants".
La fin de la Maslenitsa est d'autant plus symbolique que la Russie a connu cette année un hiver particulièrement rude. Le thermomètre est descendu jusqu'à -30 degrès à Moscou. "C'est une température qui ressemble à celle que nous avions quand j'étais toute petite, affirme Olga, qui préfère la messe aux flonflons traditionnels, mais d'habitude à cette période on sent déjà la chaleur du soleil, on peut se promener sans chapka". Il est vrai que la température était peu clémente aujourd'hui, oscillant entre -8 et -10 degrès . On attend le printemps, la chaleur, que tout fleurisse... A Anapa (sud de la Russie - NDLR.), le printemps est déjà arrivé". Elle avoue tout sourire revenir toute ragaillardie d'un séjour passé dans une station balnéaire sur la mer Noire.
Fatigués par un hiver très long, les plus téméraires devront attendre 22 heures pour assister à "la mise à feu" de l'effigie de la Maslenitsa sur la Place Rouge. Fait de paille ou de vieux chiffons, on faisait auparavant défiler un épouvantail (représentation de l'hiver) dans tout le village avant de le brûler.
Pour les plus impatients, Jeanne vendait en bordure de route des petits épouvantails qu'elle a fabriqués elle-même avec du tissu et du papier et que l'on peut faire flamber soi-même. "Il a fait tellement froid cette année que je n'ai pas pu faire grand chose dehors, alors je suis restée à la maison et j'ai fait ces marionnettes en regardant la télé... et puis ça fait toujours un peu de sous en plus, j'ai une toute petite retraite".
Les adieux à l'hiver ont donc été faits. Espérons, comme le dit le petit Sacha, accroché au volant de sa luge, que "pour de vrai" il fera bientôt chaud.
