L'Odyssée sibérienne s'est achevée sur la Place Rouge à Moscou

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Après avoir parcouru presque 8.000 kilomètres, l'explorateur Nicolas Vanier a garé son traineau pour tenir une conférence de presse à RIA Novosti ce lundi matin.

Le périple de Nicolas Vanier qui aura duré 3 mois et demi s'est achevé dimanche sur la Place Rouge.

Après avoir parcouru presque 8.000 kilomètres, Nicolas Vanier a garé son traineau pour tenir une conférence de presse à RIA Novosti ce lundi matin.

L'expédition est donc arrivée saine et sauve à Moscou. L'explorateur aura certes perdu un chien lors d'une étape à Tomsk, mais compte tenu des conditions difficiles provoquées par des températures extrêmes et les dangers que représentaient une telle aventure, on ne peut que se réjouir de l'arrivée sur la Place Rouge de Nicolas Vanier et de son équipage canin: "Ils ont vraiment accompli quelque chose de très beau" affirme l'explorateur.

A 43 ans, Nicolas Vanier signe là sa dernière épopée en traineau à chien. Il nous revient ému devant l'humanité et l'hospitalité des gens qu'il a rencontrés, particulièrement lors de la traversée du plateau sibérien: "L'hospitalité naturelle est invraisemblable dans ce pays." Si la nature qu'il a observée au cours de son voyage est très similaire à celle que l'on peut rencontrer au Canada ou en Alaska, ce qui différencie la Russie du reste des autres pays c'est en partie ces "hommes qui m'ont toujours ouvert la porte, m'ont aidé, m'ont accompagné tout au long de mon aventure. Ils me servaient un, deux, voire trois verres de vodka, ce n'était pas facile de repartir ensuite." Devant l'enthousiasme des villageois qui l'accueillaient, l'explorateur et ses chiens de traineau, fatigués par de longues journées éprouvantes, avaient parfois du mal à remplir "leurs obligations" vis-à-vis des populations locales.

Interrogé sur les situations difficiles auxquelles il a été confronté, Nicolas Vanier affirme ne pas avoir eu beaucoup de chance avec la température. L'explorateur confie avoir rencontré des moments très durs surtout lors de la deuxième partie du parcours. "Avec la température, les chiens étaient fatigués, le moral était très bas, j'avais l'impression que le voyage ne servait plus à rien tant il était difficile, j'étais sur le point d'abandonner... mais les moments difficiles font aussi la grandeur d'un voyage comme ça", s'empresse-t-il d'ajouter.

Nicolas Vanier nous rapporte surtout des moments exceptionnels: "Je garde de la traversée de l'Oural un souvenir merveilleux, c'était un endroit magique où j'ai rencontré beaucoup d'animaux, la température était idéale (-30°), la piste magnifique". Le franchissement du col entre la République de Bouriatie et Touva lui a révélé une nature intacte "J'y ai vécu des moments très forts, j'ai pu observer des vallées vierges dépourvues de traces humaines et peuplées de loups et de cerfs". Parfois l'équipage devait emprunter des routes pratiquées en même temps par des automobiles. Le cortège était accompagné pendant plusieurs heures par des policiers afin de protéger les chiens. Nicolas Vanier raconte avec humour qu'à mesure que les policiers se rassasiaient, il voyait voler des fenêtres des voitures des sacs et des bouteilles en plastique. "Une bouteille en plastique peut mettre jusqu'à deux cent ans pour se dégrader, il faut que les policiers montrent l'exemple", assure-t-il.

Que dire de ce happy-end sur la Place Rouge? "J'espère que l'arrivée de l'expédition a été aussi leur arrivée" dit-il en pensant à toutes les personnes qui l'ont accueilli au cours de la grande traversée.

Le ministère des Situations d'urgence et Gazprom ont accompagné l'explorateur tout au long de l'Odyssée sibérienne et se tenaient généralement prêts à intervenir en cas d'urgence. Ils se sont chargés d'organiser l'approvisionnement de l'équipe en nourriture et, contrairement aux expéditions précédentes, les pistes avaient été préalablement tracées. Si cette traversée a été aussi minutieusement préparée, c'est qu'en dehors des risques qu'elle impliquait, ce voyage devait sortir du cadre de l'exploit personnel pour atteindre et sensibiliser le plus de gens possible aux dangers qui menacent l'environnement. "Ce voyage n'était plus le mien" affirme-t-il. Des centaines de photos ont été réalisées, un hélicoptère a même couvert la traversée en vue de la réalisation d'un film, des manuels pédagogiques vont également être édités... L'entreprise est énorme, car en terme de prise de conscience sur la nécessité de préserver l'environnement, les retombées doivent dépasser le territoire français, le message doit être universel puisqu'il concerne "notre petite planète".

Le réchauffement climatique s'est manifesté dès le début du parcours, le lac Baikal n'étant au début du mois de décembre toujours pas gelé. Les écarts de température constatés dans des régions habituellement très froides pendant la saison hivernale sont la preuve des bouleversements que subit la nature. Les voies naturelles de déplacement comme les rivières et les fleuves étaient pour beaucoup inutilisables, ceci dû au fait qu'elles n'étaient, soit pas assez gelées, soit de façon irrégulière (les variations de températures entrainant la formation de packs). Lors de la traversée de la Volga par exemple, quatre chiens ont failli se noyer en traversant une couche de glace qui n'aurait jamais cédé quelques années plus tôt. Les témoignages qu'il a recueillis sont autant de preuves sur la dégradation de certaines zones écologiques. De nombreux villageois ont soulevé le problème de la pollution des eaux et de l'épuisement de certaines ressources naturelles (particulièrement en poisson).

A Tomsk, les scientifiques ont également sonné l'alarme et abordé le problème de la fonte du permafrost, qui risque de libérer une très grande quantité de méthane, gaz naturel responsable du réchauffement de la planète. Cette émanation entraînant naturellement la fonte encore plus rapide du permafrost, nous serions très vite confrontés à une véritable bombe à retardement. Puis de Tomsk jusqu'à Moscou, Nicolas Vanier a pu mesurer l'étendue de la déforestation. Beaucoup de gens sont aujourd'hui conscients des problèmes causés par le réchauffement climatique: "il faut avancer, mais il faut faire vite..."

Nicolas Vanier s'est également dit préoccupé par la construction d'un oléoduc non loin du site du lac Baïkal. Mais selon lui, il ne faut pas prendre le problème à l'envers. Il ne faut pas s'acharner contre les grosses compagnies, il faut davantage se tourner vers les populations et responsabiliser les gens pour les encourager à diminuer leur consommation d'énergie. Un petit guide sur les "14 réflexes utiles pour la planète", visant à réduire notre "emprunte écologique sur la planète" avait par ailleurs été distribué avant le début de l'expédition.

"Mon histoire avec la Russie n'est pas terminée" affirme Nicolas Vanier. Le tournage de Loup, un film de fiction évoquant le rapport entre les hommes et une meute de loups, devrait en effet le ramener très bientôt dans l'Oural. A un niveau plus personnel, l'homme affirme avoir désormais besoin de recul "pour saisir le ressenti d'un tel voyage... Mais c'était magique de voyager avec des chiens dans les grandes solitudes blanches, dans ce silence envoûtant qui me rendait disponible à tout ce que j'étais venu chercher dans ce voyage".

Photos (le retour triomphal)

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