UE-Russie: Nicolas Sarkozy promet son aide

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Par Andreï Fediachine, RIA Novosti
Par Andreï Fediachine, RIA Novosti

La France a promis à Moscou d'apporter sa contribution à la signature d'un nouvel Accord de partenariat et de coopération Russie-UE. C'est Bernard Kouchner lui-même qui l'a annoncé lors de la réunion du Conseil russo-français de coopération en matière de sécurité, qui s'est tenue le 11 mars à Paris. Etant donné qu'une telle promesse n'a pu être faite sans consultation préalable avec le président Nicolas Sarkozy, on peut y voir deux bonnes nouvelles: la promesse de Paris d'apporter son aide et, ce qui est encore mieux, le fait que cette promesse sera remplie par Nicolas Sarkozy non seulement en tant que président français, mais aussi en tant que chef d'Etat du pays qui assumera pour six mois, à partir du 1er juillet prochain, la présidence tournante de l'UE.

La signature d'un nouvel accord de partenariat et de coopération se fait attendre depuis longtemps. L'ancien accord signé pour dix ans a expiré fin novembre 2007 et les négociations sur un nouveau document n'ont toujours pas commencé. Leur lancement a été entravé par le veto de Varsovie, qui réclamait la levée de l'embargo sur les livraisons de porc polonais introduit par Moscou en novembre 2005. Mais c'était encore la Pologne des frères Kaczynski (Lech, président, et Jaroslaw, premier ministre). Le nouveau premier ministre polonais, Donald Tusk, a déjà annoncé la levée prochaine de l'embargo et, par conséquent, le déblocage du processus d'établissement des rapports russo-européens.

Des difficultés sont possibles, car il faudra à nouveau obtenir l'approbation de l'ensemble des 27 membres de l'UE. Mais le coup d'envoi qui a été donné à ce processus lors de la réunion qui vient de se tenir à Paris revêt une grande importance. Les ministres russes des Affaires étrangères et de la Défense, Sergueï Lavrov et Anatoli Serdioukov, ainsi que leurs homologues français Bernard Kouchner et Hervé Morin ont participé aux séances du conseil. En outre, les deux membres du gouvernement russe ont été reçus par le président Nicolas Sarkozy.

Bien entendu, il serait naïf d'estimer que la Russie espère parvenir à quelque "nouveau concordat" avec la France de Nicolas Sarkozy et obtenir, grâce à lui, le statut de "partenaire légitime" de l'UE à la place de son ancien statut qu'elle a, de fait, perdu. Mais, d'un autre côté, la présidence de l'UE n'est pas une simple formalité, comme on pourrait le croire de prime abord. Chaque dirigeant qui assume ce poste pendant six mois juge nécessaire de se distinguer par quelque chose de remarquable ou, tout du moins, de mémorable. L'organisation d'un "nouveau mariage" entre la Russie et l'Union européenne élargie ne pourrait-elle pas être qualifiée d'événement mémorable? D'autant que le vieux continent comprend qu'il sera de plus en plus difficile de vivre à côté d'un marché de produits et de services aussi colossal, et d'un super-géant énergétique tel que la Russie sans avoir enregistré un nouvel acte "d'état civil".

En fait, il ne s'agit plus d'enregistrer un nouvel acte, mais bien d'édifier une structure foncièrement nouvelle pour les relations russo-européennes. Un "contrat de mariage" modernisé à l'instar du document signé en 1994 par Boris Eltsine sur l'île grecque de Corfou et entré en vigueur en 1997 (le retard s'explique par la première guerre tchétchène) ne conviendra pas. En partie parce que l'Accord de partenariat et de coopération entre l'UE et la Russie avait été conclu avec 12 pays, alors que l'UE en compte déjà 27. Il est vrai, rien que pour cette raison, il doit fondamentalement être remanié: de vêtement de qualité médiocre, il s'est transformé en camisole de force. Dans l'accord de partenariat et de coopération signé à Corfou, la Russie bénéficiait d'un statut précaire. Mais, comme il ressort du célèbre discours prononcé par Vladimir Poutine l'année dernière à Munich, il est devenu parfaitement clair qu'elle a l'intention de retrouver ses droits.

Quels que puissent être les propos tenus sur l'état actuel des rapports UE-Russie, ou les commentaires admiratifs sur le "haut degré de coopération", "l'extension..., le renforcement... et la consolidation", les faits sont là: les rapports entre Bruxelles et Moscou se sont réduits ces dernières années à une correspondance entre structures bureaucratiques et à un échange de déclarations d'intention.

La façon dont nous nous sommes égarés dans les "quatre espaces" (économie; liberté, sécurité intérieure et justice; sécurité extérieure; recherche, technologies et enseignement) que nous avions décidé d'explorer intensivement en commun au cours du sommet de Saint-Pétersbourg de 2003 illustre parfaitement le caractère boiteux de nos rapports. En 2005, on avait même élaboré des "feuilles de route", mais il semble bien qu'elles aient été oubliées...

L'objectif de la Russie est clair. Moscou voudrait passer du partenariat et de la coopération à la conclusion d'un accord d'association stratégique, voire même d'union stratégique. Il serait bon de distinguer les domaines de coopération, par exemple, en concluant des traités spécifiques dans le secteur énergétique, les transports et l'agriculture. Dans les conditions d'une telle structure de coopération, les "pays tampons" de l'UE (en premier lieu les pays baltes et la Pologne) auront bien du mal à dresser des obstacles à l'extension des contacts économiques avec Moscou.

Une telle restructuration n'aurait rien d'extraordinaire. Au fond, ce que propose Moscou à Bruxelles c'est une copie modifiée des rapports contractuels qui existent entre l'UE et les Etats-Unis. Il est vrai, il y a au sein de l'UE des conservateurs et des "novices" toujours atteints du "syndrome des victimes" de l'hégémonie soviétique et qui insistent jusqu'à présent pour tenir Moscou à une distance "respectable", mais il y en a aussi de nombreux autres qui pensent autrement. Nicolas Sarkozy fait partie de ces derniers, semble-t-il.

On verra si un Nicolas Sarkozy dynamique aidera réellement à établir de nouveaux rapports entre la Russie et l'UE. Pourquoi pas, puisque ce qui est en jeu, en fait, c'est le rôle de la nouvelle "France de Sarkozy" au sein de la nouvelle "Europe de Sarkozy", ce qui est presque sacré.

Les opinions exprimées dans cet article sont laissées à la stricte responsabilité de l'auteur.

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