Revue de la presse russe du 26 août

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MOSCOU, RIA Novosti

Nezavissimaïa gazeta

Le Kremlin prêt à payer le prix d'une reconnaissance de l'Abkhazie et de l'Ossétie du Sud

Dans la confrontation entre deux parties ayant de leur côté des principes du droit international universellement reconnus, mais diamétralement opposés, la plus forte sera celle qui saura s'attirer le plus de partisans, lit-on mardi dans le quotidien Nezavissimaïa gazeta.

En ce sens, l'Occident prendra probablement le dessus sur l'Abkhazie et la Russie. Ces dernières semaines ont coûté très cher à Moscou à tous les égards. Mais la Russie ne regrette pas d'avoir agi ainsi, estimant probablement qu'elle y gagnera en fin de compte.

Selon les estimations de certains experts, les frais de l'opération russe en Géorgie ont dépassé 500 millions de dollars. A peu près autant a été promis par le gouvernement russe pour le rétablissement de l'infrastructure des républiques non reconnues. L'intégration de la Russie dans la composante financière du G7 a été bloquée par les Etats-Unis, les réunions du Conseil Russie-OTAN ont été suspendues. Les jeunes membres de l'Union européenne appellent à annuler les négociations sur un nouvel accord de partenariat et de coopération entre la Russie et l'UE.

Ces conséquences ne semblent pas extrêmement graves, car le principal préjudice potentiel peut être causé à la Russie non pas par les sanctions des gouvernements étrangers (qui reconnaissent eux-mêmes que leur champ de manoeuvre est étroit), mais par les médias. L'image d'un Etat russe agressif et dangereux présentée méthodiquement par les chaînes d'information internationales a déjà considérablement sapé la confiance des investisseurs étrangers dans l'économie russe, ce qui a provoqué la chute de la capitalisation totale des compagnies russes au-dessous du cap des mille milliards de dollars.

Les experts sont unanimes à estimer que cela a été dicté plutôt par un élan émotionnel que par des facteurs structurels et que le marché et le rouble qui faiblit reprendront à l'avenir leurs positions grâce aux indices économiques forts de la Russie et aux prix élevés du pétrole.

Du point de vue stratégique, l'Abkhazie a une plus grande importance pour la Russie que l'Ossétie du Sud, car elle est limitrophe du territoire de Krasnodar où les Jeux olympiques d'hiver de Sotchi auront lieu en 2014. La Russie veut assurer la sécurité de cette région avant les JO. En outre, le soutien apporté aux républiques séparatistes a une importance symbolique pour la Russie, en prouvant ses capacités à défendre ses points de vue et ses intérêts dans l'arène internationale. Par conséquent, il n'y a pratiquement pas de doutes que Moscou reconnaîtra l'indépendance de l'Abkhazie, ce qui élèvera le jugement que portent les Russes sur eux-mêmes et détériorera encore plus l'image internationale de la Russie. Toute cette histoire reviendra très cher au Kremlin, mais il semble prêt en payer le prix.

Vedomosti

La Russie prête à faire fi de ses relations avec le monde occidental

La menace russe de renoncer aux ententes avec l'OTAN et l'OMC est probablement une réponse symétrique aux menaces analogues de l'Occident, lit-on mardi dans le quotidien Vedomosti.

Les représentants des Etats-Unis et de l'Europe ont déjà maintes fois menacé la Russie d'isolement, en comprenant, d'ailleurs, que cela serait nuisible aux deux parties. A présent, la Russie répond qu'elle est prête à se retrouver dans l'isolement. S'agit-il de nouveau de rhétorique, ou bien la Russie y est-elle effectivement prête, et ses dirigeants ont-ils une stratégie en matière de politique étrangère permettant de négliger facilement les rapports avec le monde occidental?

Les déclarations faites par Dmitri Medvedev et Vladimir Poutine sont la reconnaissance pragmatique d'une situation qui a changé. Ces derniers temps, l'efficacité du Conseil Russie-OTAN tendait vers zéro. Après la guerre contre la Géorgie, il est fort probable que le processus d'admission de ce pays et de l'Ukraine à l'OTAN s'accélère. Le plan d'action pour l'adhésion à l'OTAN pourrait être accordé dès décembre à l'Ukraine. Des conditions pour l'adhésion à l'OMC avaient déjà été posées à la Russie, mais, avant la guerre contre la Géorgie, il y avait encore des possibilités de les échanger contre des exigences réciproques de l'Occident. A présent, il est clair que la Russie ne sera pas admise prochainement à l'OMC: en plus des menaces de la part des Américains, la Géorgie et l'Ukraine exerceront également leur influence.

Les positions divergeront probablement considérablement et pour longtemps. Néanmoins, on peut espérer que le bon sens et la poursuite des intérêts de chacun empêcheront l'internationalisation du conflit. Malgré plusieurs déclarations menaçantes, l'Occident n'a pas élaboré de position commune à l'égard de la Russie, et il est peu probable qu'il y parvienne. La Russie est importante en tant qu'acteur politique influent dans la région et en tant qu'économie relativement stable (dans le contexte de la crise mondiale) qui approvisionne les différents partenaires en ressources énergétiques. D'autre part, il est impossible de mobiliser actuellement tout l'Occident contre la Russie, car la Russie n'est pas considérée comme une menace globale.

Il se peut que Moscou compte tirer profit de la mise en oeuvre de certaines manoeuvres en cas d'isolement. La nouvelle stratégie Poutine-Medvedev consiste-t-elle à rallier autour de la Russie tous ceux qui ont été offensés par les Etats-Unis?

Le "deuxième monde" contemporain compte beaucoup d'économies émergentes et de leaders politiques ambitieux. Il y a, parmi eux, des gens mécontents de l'hégémonie américaine et de la répartition des rôles dans l'économie globale. Cependant, on ne voit pas encore ce que la Russie peut leur proposer, à part elle-même en qualité d'étendard. D'autre part, à y regarder de plus près, on comprend que tous les Etats du "deuxième monde" ont leurs propres intérêts. Même les alliés au sein de la CEI (Communauté des Etats indépendants) ne se sont pas pressés de se solidariser avec la Russie. L'Iran est aussi dangereux pour les Etats-Unis que pour la Russie. La Chine dépend des Etats-Unis dans la même mesure que les Etats-Unis dépendent de la Chine. En ce qui concerne la reconnaissance de l'Ossétie du Sud et de l'Abkhazie, les Chinois ne soutiendront pas Moscou: ils ont leur Tibet et leur Taïwan.

Kommersant

Moscou se querelle avec l'Occident et manoeuvre dans l'espace postsoviétique

Dans le contexte des actions entreprises ces derniers temps par les autorités russes en vue de reconnaître l'indépendance de l'Abkhazie et de l'Ossétie du Sud, Moscou a prouvé de façon éloquente comment il pouvait remercier les républiques postsoviétiques dont les dirigeants sont prêts à se détourner de l'OTAN pour toujours, lit-on mardi dans le quotidien Kommersant.

Parmi ces pays, il convient de citer en premier lieu la Moldavie, dont les autorités ont maintes fois manifesté leur volonté de signer une déclaration internationale garantissant la neutralité permanente de la république et qui ont déployé ces derniers mois des efforts en vue de prendre leurs distances au maximum avec le GUAM (association qui regroupe la Géorgie, l'Ukraine, l'Azerbaïdjan et la Moldavie).

La rencontre qui a eu lieu hier entre Dmitri Medvedev et le président moldave Vladimir Voronine a commencé par des propos durs du président russe qui sont plutôt propres, de par leur style, à Vladimir Poutine. Après avoir mentionné que les dirigeants géorgiens avaient littéralement perdu la tête, le président russe a carrément déclaré à son homologue moldave qu'il existait "précisément aujourd'hui des chances et de très bonnes possibilités de régler le problème transnistrien". Bien plus, Dmitri Medvedev a souligné que la Russie était "prête à faire de son mieux en vue d'assurer le règlement définitif de la crise transnistrienne".

On peut dire que cette déclaration est sans précédent: les fonctionnaires russes n'avaient pas promis de régler "définitivement" le problème de la Transnistrie même au cours de l'élaboration en 2003 du plan de réconciliation entre Chisinau et Tiraspol appelé par la suite "mémorandum Kozak" (Dmitri Kozak assumait alors le poste de chef adjoint de l'administration présidentielle).

Les présidents moldave et russe ont convenu que des négociations avec la participation de toutes les parties intéressées auraient lieu d'ici peu. Ensuite, Dmitri Medvedev rencontrera probablement le dirigeant de la Transnistrie Igor Smirnov, ce qui fait déjà l'objet d'un accord de principe.

RBC Daily/Kommersant

Russie-Occident: une confrontation est possible

Selon certains experts, la Russie possède les ressources nécessaires pour une confrontation avec l'Occident, bien qu'elle semble moins puissante qu'à l'époque de l'URSS, lit-on mardi dans les quotidiens RBC Daily et Kommersant.

Bien que 40% des produits alimentaires consommés dans le pays proviennent de l'importation, la Russie est capable de s'approvisionner en pain et en pommes de terre, et certains pays étrangers, tels que le Brésil, sont prêts à effectuer des livraisons de viande. "De plus, un blocus total de la Russie est tout simplement impossible, estime Valeri Mironov, expert principal du Centre pour le développement. Même si un Etat du G7 interrompt ses exportations vers la Russie, il ne faut pas oublier qu'il y a longtemps que les multinationales ont transféré leurs productions dans des pays tiers, en particulier en Chine, qui conservera des relations économiques et commerciales avec la Russie quoi qu'il arrive".

"L'Occident n'a pas son mot à dire. Et s'il tente de le faire, nous appliquerons à notre tour des sanctions contre lui, en coupant les livraisons de gaz, par exemple", affirme le député Valeri Galtchenko.

"Il est possible que tous les Russes, y compris les dirigeants du pays, ressentent ce froid dans les relations (de la part des Européens). L'obtention de visas pourrait être compliquée, mais personne ne retirera tous ses investissements, car les revenus sont trop importants", explique Sergueï Aleksachenko, ancien vice-président de la Banque centrale de Russie.

Selon l'analyste politique Sergueï Kourguinian, le système politique et économique actuellement en vigueur en Russie a été créé pour se rapprocher de l'Occident et non pour s'y mesurer. Cela explique de nombreuses décisions du gouvernement russe, notamment les placements provenant du Fonds de stabilisation dans des titres américains. Il est évident que dans la première moitié de cette décennie, le Kremlin a estimé qu'un conflit avec les Etats-Unis était impossible. "En agissant en dehors des frontières, il est encore plus important de prendre en compte les risques politiques que les risques économiques", fait remarquer Sergueï Lopatnikov professeur-chercheur à l'Université du Delaware. Vassili Douma, membre de la Commission pour les monopoles naturels du Conseil de la Fédération (chambre haute du parlement russe) et ex-président de Slavneft, est lui-aussi préoccupé par l'avenir du Fonds de stabilisation: "Quand on confie son argent à un étranger, tout peut arriver."

Certains experts estiment que l'avenir du Fonds de stabilisation, ainsi que celui des capitaux privés (selon certaines estimations, la classe dirigeante russe a placé entre 300 et 700 milliards de dollars dans des banques américaines et européennes) serait une bonne raison de faire traîner la reconnaissance de l'indépendance de l'Abkhazie et de l'Ossétie du Sud.

Ces articles sont tirés de la presse et n'ont rien à voir avec la rédaction de RIA Novosti.

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