Cosmonautique russe: dans une voie difficile

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Par Andreï Kisliakov, RIA Novosti
Par Andreï Kisliakov, RIA Novosti

Le 26 mars, pour la 19e fois, un nouvel équipage international s'est envolé vers la Station spatiale internationale (ISS). L'internationalisation est un trait distinctif de l'astronautique actuelle. Russes, Américains, Japonais, Allemands, Français, Indiens et Israéliens utilisent des moyens de transport spatiaux construits par deux puissances. Des centaines de satellites appartenant à des dizaines d'Etats survolent la Terre grâce aux lanceurs fabriqués par seulement quelques pays.

Compte tenu de la très grande ampleur des objectifs fixés, aucun Etat, même le plus puissant, n'est en mesure aujourd'hui de réaliser seul ses aspirations spatiales. Cette vérité première est reconnue sur tous les continents, par les dirigeants tant des Etats que des Agences spatiales.

Malheureusement, la Russie, dont la situation n'est pas des meilleures, pour ne pas dire plus, en matière de financement et d'approvisionnement matériel du secteur spatial, risque de se retrouver, sinon dans une situation d'isolement "spatial", tout au moins seule pour résoudre ses propres problèmes de programmes spatiaux.

En ce qui concerne la coopération internationale, la Russie a été mise dans une situation difficile. Non pas par les Américains, cette fois-ci, mais par les Européens, qui semblaient pourtant être des partenaires sûrs. Conformément à la déclaration finale conjointe faite le 18 mars, à l'issue d'une nouvelle rencontre du Conseil spatial (Roskosmos, Agence spatiale européenne et Commission européenne), la Russie et l'Europe suivront désormais leur propre voie dans le domaine de la conception et de la fabrication d'un système de transport spatial. En outre, à partir de l'an prochain, l'Europe renoncera à utiliser les lanceurs russes reconvertis Dniepr et Rokot pour mettre en orbite ses satellites, leur préférant son propre lanceur léger Vega.

Autrement dit, un "coup" a été porté à deux secteurs majeurs, efficaces, de l'industrie spatiale russe: les vaisseaux habités et les lanceurs. D'autre part, une nouvelle période de stagnation dans la création de nouveaux vaisseaux habités risque très vite de diminuer beaucoup nos capacités concernant le travail de l'homme dans l'espace. Le fait que les Européens renoncent aujourd'hui au vaisseau commun fera traîner encore davantage la création de nouveaux moyens de transport spatiaux, pourtant si nécessaires.

En août 2005, au Salon aérospatial international de Joukovski (près de Moscou), les journalistes avaient pu voir pour la première fois une maquette grandeur nature d'une nouvelle navette spatiale russe, Kliper, dont la construction devait commencer sous peu, selon Roskosmos (Agence fédérale spatiale russe).

Mais sa construction n'a jamais été engagée. Bien plus: lors du Salon aérospatial du Bourget (France) de l'été suivant, Kliper fut qualifié de programme sans lendemain, très onéreux et irréfléchi. En conséquence de quoi l'accent fut mis, une nouvelle fois, sur la modernisation du vaisseau Soyouz et la coopération avec les Européens afin de concevoir un nouveau vaisseau.

Le résultat est déplorable: plusieurs années perdues, et des perspectives incertaines pour le programme national de renouvellement des vaisseaux habités.

Par ailleurs, si, pour les Américains, l'ISS est une étape dépassée, l'Europe commence à peine à apprécier l'exploitation de ce complexe international qui est, pour l'instant, l'unique point de destination des vols habités. Le bon comportement du premier véhicule de transport spatial ATV donne réellement la possibilité, aux plans économique et technique, de reconvertir ce cargo automatique en système habité européen. Auquel cas la participation russe ou américaine ne serait plus nécessaire pour acheminer les Européens à bord de la station.

En ce qui concerne les Soyouz, tout ne va pas pour le mieux. Par bonheur, la Banque d'épargne de Russie a alloué en novembre dernier à la corporation Energuia un crédit de 2,9 milliards de roubles (63,8 millions d'euros) jusqu'à l'automne 2010. Cela nous permettra de construire, certes, plusieurs vaisseaux. Mais des vieux. Et après? Pour l'instant, Roskosmos en est toujours à envisager un appel d'offres pour la création d'un nouveau vaisseau spatial.

Les opinions exprimées dans cet article sont laissées à la stricte responsabilité de l'auteur.

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