Le "troisième mandat" de Vladimir Poutine demeure au centre des discussions politiques

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MOSCOU, 15 août (par Youri Filippov, commentateur politique de RIA Novosti).

Vladimir Poutine restera-t-il au pouvoir après l'expiration de son deuxième mandat? Cette question a de nouveau attiré l'attention internationale après la publication le mois dernier d'un rapport sur le climat d'investissement en Russie rédigé par Christopher Weafer, analystes d'Alfa-Bank, l'un des plus importants établissements de crédit russes.

L'expert soutient que l'apparition d'un mécanisme permettant à Poutine de rester à la barre de l'Etat après 2008, après l'expiration de son deuxième mandat, serait un scénario idéal pour les investisseurs. Weafer cite à l'appui l'expérience internationale parfaitement connue des hommes d'affaires du monde entier : l'un des facteurs assurant jusqu'ici un développement économique fructueux a été la durée du pouvoir d'un leader fort.

En Russie, l'intérêt pour ce thème est activement excité par les hommes politiques qui avancent de temps à autre des initiatives constitutionnelles, quoiqu'en vain jusqu'à présent. Fin juin la Douma a repoussé l'amendement proposé par le député Alexandre Moskalets pour accorder à Poutine le droit de se faire réélire pour la troisième fois. Il y a quelques jours, le président du Conseil de la Fédération, Serguéi Mironov, a émis un jugement négatif sur l'initiative des députés de l'assemblée législative du Primorié qui avaient qualifié l'interdiction constitutionnelle du "troisième mandat" de contredisant d'autres dispositions de la Loi fondamentale.

La réaction négative des hommes politiques moscovites à l'idée du "troisième mandat" est facile à expliquer, elle découle de la position du chef de l'Etat. En effet, Poutine a plus d'une fois déclaré que son hypothétique "trois mandat" entrerait en contradiction avec la Constitution russe et qu'il ne voudrait pas que la Loi fondamentale soit modifiée. "La stabilité ne s'obtient que sur la base du respect des dispositions de la Constitution", a-t-il notamment dit lors de la visite en Finlande.

Mais cela veut-il dire que le débat est définitivement levé? Plutôt au contraire. Plus 2008 sera proche et plus les discussions seront âpres. Elles déborderont les milieux politiques pour déferler sur une bonne partie de la société.

L'un des principaux arguments des partisans du "troisième mandat" est l'absence dans le pays d'homme politique de la taille de Poutine et l'incertitude qu'il y en aura dans un avenir prévisible.

Cependant, le pays qui n'est pas encore sorti de la période d'instabilité dans laquelle il s'était retrouvé dans les années 90, qui fait l'objet d'attaques massives du terrorisme international, qui est confronté à de sérieux problèmes interethniques, qui réalise un programme de réformes socio-économiques complexes, qui produit un effort immense pour trouver une place digne de lui dans le monde, a besoin d'un leader fort, prestigieux et populaire. Tel que Poutine a pu devenir au début de son premier mandat présidentiel lorsqu'il a tracé et s'est mis à réaliser son propre programme de stabilisation politique qui a permis à la Russie d'avancer sensiblement en direction de la modernisation post-communiste.

La question essentielle liée dans ce contexte au problème du "troisième mandat" est de savoir à quel point Poutine est près actuellement d'achever la réalisation de son programme politique et à quel point il y sera prêt en 2008. Au cours des cinq dernières années le président russe a réussi bien des choses, tout d'abord à créer en Russie, sur la base de la Constitution démocratique en vigueur, un système de gouvernement doté de rapports efficaces entre l'administration présidentielle et les autorités régionales, les milieux d'affaires, le gouvernement, le parlement, les partis politiques et les organisations sociales.

C'est le "pouvoir vertical" poutinien pour lequel le président russe est souvent critiqué par des hommes politiques occidentaux du second rang. Ni Gorbatchev, ni Eltsine n'ont réussi pour différentes raisons à mettre en place une verticale pareille, c'est pourquoi ils ne sont pas arrivés à stabiliser la situation politique dans le pays et à se garantir contre le séparatisme et les crises socio-économiques douloureuses, après quoi personne ne leur demandait de rester au Kremlin.

Le paradoxe consiste dans le fait que, si la réforme de Poutine a effectivement réussi, son auteur peut quitter le Kremlin le cœur net, ayant rempli sa mission principale. Mais si cela ne s'est pas encore produit, la discussion sur le "troisième mandat" ne sera pas dénuée de fondement sérieux, aujourd'hui et demain.

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