L'industrie du cinéma russe : l'audience en hausse

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MOSCOU, 21 septembre. Olga Sobolevskaïa, commentatrice de RIA Novosti.

Lentement, les salles de cinéma russes se remplissent, attirant une audience croissante : leurs recettes 2005 promettent de se monter à 350 millions de dollars. Il y a deux ou trois ans, seuls des jeunes de 13 à 25 ans formaient des files d'attente devant les guichets, mais la situation change déjà : le public "plus adulte" semble de nouveau attiré par le cinéma grand format. Grâce notamment aux succès cinématographiques nationaux de 2005, à la publicité et aux distributeurs.

"Autrefois, pour les films à grand budget, les réductions sur les prix des billets d'entrée étaient soumises à des restrictions, explique Sergueï Sorotchkine, directeur général de la compagnie de diffusion Luxor. - On comprend maintenant que ces restrictions éliminent toute une couche de spectateurs. Tous les réseaux de salles décident donc de maintenir les rabais". "Luxor accorde des réductions aux jeunes et aux étudiants et beaucoup font de même aujourd'hui", fait-il observer. "Par exemple, le Havana, notre salle, organise des programmes dans le cadre desquels les billets sont vendus à des prix très abordables, à partir de 40 roubles (1dollar vaut 28,5 roubles). Les gens du troisième âge commencent à remplir nos salles. Quant aux adultes, nous leur vendons les billets à moitié-prix, dans le cadre d'actions spéciales, pour les séances en matinée".

Et pourtant, ce sont moins les prix des billets que les films eux-mêmes, en premier lieu les films russes (et des sondages d'opinion le confirment) qui attirent le public dans les salles. Après les grands projets cinématographiques de l'année en cours ("Le Gambit turc", de Djanik Faïziev, et "Le Conseiller d'Etat", de Filipp Yankovski, d'après deux romans de Boris Akounine), un public plus âgé retrouve le chemin des salles, nostalgique de personnages russes et de sujets patriotiques. Le film de Faïziev a collecté 19 millions de dollars, battant le résultat du champion 2004 "Ronde de nuit", de Timour Bekmambetov. Pour la deuxième année consécutive, des films russes se retrouvent sur l'olympe des grands succès de la distribution. "Le Gambit turc" et "Le Conseiller d'Etat" prouvent qu'on peut aller au cinéma pour tirer un grand plaisir du son et de l'image de qualité", poursuit Sergueï Sorotchkine. Les experts estiment que le cinéma russe détient cette année 15% du marché contre 10% en 2004.

Mais ces films n'auraient pas beaucoup de chances de succès sans une puissante offensive publicitaire ! L'industrie du cinéma nationale accorde déjà une grande attention à la promotion de ses produits. "D'après les normes occidentales, la promotion d'un film engloutit à peu près 20% de la recette que les distributeurs projettent d'obtenir des salles sous forme de taxe sur la diffusion", explique à RIA Novosti Vadim Ivanov, directeur adjoint pour la diffusion à Gemini Film International, distributeur de 20 Century - Fox. "Mais pour les films russes ayant de bonnes chances de succès dans la diffusion internationale, ce pourcentage pourrait être revu à la hausse", précise-t-il.

Les films sont d'abord "rôdés" auprès de "groupes témoins". "Bien des choses dépendront de la manière dont le film sera accueilli et du montant des recettes, dit Ivanov. - Si un projet s'annonce à long terme, on ferait bien de consentir un supplément d'investissement".

Tant Luxor que Gemini ont des "enveloppes" solides de films pour l'avenir. Un des grands projets de Gemini pour automne-hiver 2005 est "La 9ème compagnie", un film de Fedor Bondartchouk, 40 ans, auteur de clips, producteur, acteur et animateur à la télé, fils de Sergueï Bondartchouk, réalisateur du "Guerre et Paix" soviétique, épopée cinématographique récompensée par un Oscar américain en 1968. Le sujet de la "9ème compagnie" est tiré d'événements réels survenus à la fin de la campagne d'Afghanistan (1979-1989). Une compagnie soviétique a tenu une hauteur dans un combat contre des mercenaires d'Oussama ben Laden, personnage peu connu à l'époque, sans reculer d'un pas. "Le film aura un départ record, 410 copies, et de grands espoirs sont fondés sur lui, explique Vadim Ivanov. - Et pourtant, son marketing ne sera pas des plus faciles : un drame de guerre, un film qui a ses spécificités : personne ne vous dira comment ce film à grand budget sur une guerre qui ne s'est pas estompée des mémoires doit être diffusé. Car cette guerre a touché beaucoup de gens appartenant aux générations moyenne et adulte. Mais nous comptons sur une plus vaste audience. Fedor Bondartchouk lui-même incarne une télévision récréative, il est populaire auprès des jeunes, mais les autres étoiles engagées dans le film sont aussi des idoles des jeunes".

Le départ du projet prometteur "Gemini" est prévu pour le 1er décembre. "Nous voudrions réaliser une idée sans précédent sur le marché, une diffusion réitérée", souligne le vice-directeur de Gemini pour la diffusion. Mais, dit-il, le film sera présenté dans une version occidentale, plus dynamique, dont la diffusion à l'étranger n'a commencé que tout récemment. La suite du film, "Ronde de jour" (une vraie première !), tourné d'après un roman de Sergueï Loukianenko (comme la "Ronde de nuit"), va sortir également.

De l'avis de Vadim Ivanov, les principaux problèmes de l'industrie du cinéma sont l'opacité du marché, le piratage et la pénurie de cadres de qualité. "Pour l'instant, notre industrie du film n'en est qu'au stade embryonnaire. Nous avons encore peu de bons opérateurs, d'ingénieurs du son, de spécialistes des éclairages et de représentants d'autres métiers cinématographiques. Il faut qu'une période s'écoule avant que n'apparaisse une nouvelle génération de professionnels", affirme-t-il.

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