Le 60e anniversaire de la branche nucléaire russe

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MOSCOU, 28 septembre - Tatiana Sinitsyna, commentatrice de RIA Novosti. L'histoire de la branche nucléaire russe est une longue succession de pages brillantes et tragiques.

 Par exemple, l'accident de Tchernobyl, en avril 1986, à l'époque de l'URSS. D'aucuns croyaient que du coup terrible porté à l'époque au prestige de la branche, celle-ci ne s'en remettrait jamais. Mais la Russie a pu surmonter ce qu'on appelle le syndrome de Tchernobyl et trouver la force de se mettre sur les rails de la voie du développement pragmatique de l'énergie nucléaire.

En 2003, le gouvernement fédéral a fait une déclaration qui insistait sur la nécessité du développement régulier de l'énergie nucléaire en tant que facteur de stabilité et de prévention de crises énergétiques. "Reconnaissons-le : il n'y a pour l'instant aucune alternative, ni économique ni écologique, au nucléaire civil", estime l'académicien Alexandre Roumiantsev, directeur de l'Agence fédérale pour l'Energie atomique.

Les 10 centrales nucléaires russes produisent jusqu'à 150 milliards de kWh d'électricité par an. Leur part dans la production globale d'électricité - 16% seulement - semble plutôt modeste. Le reste de l'énergie électrique est fourni par des centrales hydrauliques et thermiques, mais leurs ressources, notamment techniques, semblent limitées. La stratégie énergétique russe mise sur 230 milliards de kWh d'origine nucléaire d'ici à 2020. Avant cette échéance, la branche devra donc de se doter d'une dizaine de sites supplémentaires au moins.

Le pays a commencé à réaliser son projet nucléaire pendant la Seconde guerre mondiale, en 1942, lorsque les divisions allemandes fonçaient sur Stalingrad. Mais le 6 et le 9 août 1945 ont rendu ce projet prioritaire : les Américains, à la fin de la guerre, ont largué leurs premières bombes atomiques sur les villes japonaises de Hiroshima et de Nagasaki. Au lendemain de cet événement, le Comité d'Etat à la Défense de l'URSS a institué une administration secrète chargée des affaires nucléaires, dite la Première Direction Principale. Au début, son objectif consistait à mettre au point les armes nucléaires soviétiques. Mais les conceptions militaires s'accompagnaient en règle générale de conceptions civiles. La première bombe atomique soviétique a été testée en 1949, mais la première centrale nucléaire a été ouverte à Obninsk (au sud-ouest de Moscou) en 1954. Trois ans après, c'était le tour des sous-marins nucléaires et du premier brise-glace atomique.

Aujourd'hui, l'administration chargée des affaires nucléaires s'appelle Agence fédérale pour l'énergie atomique (Rosatom). Elle regroupe une centaine de grosses entreprises situées aux quatre coins du pays qui emploient 335 000 personnes. Ce puissant complexe militaro-nucléaire et énergétique assure la prospection géologique, la production d'uranium et de matériaux nucléaires spéciaux, leur transformation et leur enrichissement, et la fabrication de combustible à base d'uranium enrichi.

La branche nucléaire organise aussi les chantiers des centrales nucléaires, l'approvisionnement de leurs réacteurs en combustible et le retrait de ce dernier des piles, ainsi que l'enterrement des déchets radioactifs. Ces activités sont "coiffées" par un potentiel intellectuel de tout premier plan : 305 membres et membres correspondants de l'Académie des sciences, des milliers de docteurs ès sciences.

Rosatom réalise un vaste programme d'exportation qui est lié avant tout à la construction de sites nucléaires à l'étranger. Les réacteurs nucléaires modernes VVER 1000 (modérés et refroidis par eau) sont actuellement installés en Inde, en Chine, en Iran. Autres axes d'exportation : les fournitures de combustible aux centrales nucléaires situées en Europe de l'Ouest et de l'Est, dans certains pays de la CEI, et les services d'enrichissement de l'uranium.

Dans le contexte de l'économie de marché, Rosatom, organisme public, est un partenaire privilégié du secteur privé. Par exemple, il achète des équipements lourds pour les centrales - turbo-génératrices, turbines, - au consortium privé Power Machines (Saint-Pétersbourg). Rosatom regroupe deux entreprises par actions (les 100% d'actions y appartiennent à l'Etat) : TVEL, producteur de cartouches pour les centrales, et Techsnabexport, centrale exportant une partie des produits de la branche.

"Comment avancer vers le marché : voilà une question difficile pour nous, avoue le directeur de Rosatom. - Conformément à la Loi sur l'énergie atomique, l'ensemble des matériaux et des installations nucléaires sont propriété fédérale". Mais Roumiantsev n'hésite pas et préfère l'actionnariat aux entreprises unitaires.

La réalisation de programmes de reconversion civile, qui sont annuellement financés à hauteur de 140 millions de dollars (50% de ces ressources proviennent du budget, 50% sont accordées par la communauté internationale) constitue un axe d'activité parmi les plus importants de Rosatom. Alexandre Roumiantsev dit que jusqu'à 20 submersibles nucléaires réformés dans les Flottes du Nord et du Pacifique sont actuellement démantelés. Rosatom coordonne ces activités et assume la responsabilité entière pour le déchargement, le transport et le traitement radiochimique du combustible. Sur les 195 sous-marins russes réformés, 121 ont été démantelés au milieu de l'année en cours.

"Principal acquis de la branche: l'arme atomique russe assure la parité nucléaire et garantit la paix sur Terre depuis 60 ans", souligne l'académicien Roumiantsev.

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