Entre l'Église orthodoxe russe et le Vatican, la glace est rompue

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MOSCOU, 31 octobre (Vladimir Simonov, commentateur politique de RIA Novosti). Au printemps dernier, le nouveau Pape Benoît XVI a proclamé l'œcuménisme comme un objectif clé de son pontificat.

Il semble en effet que le Vatican se soit déjà attelé à la tâche. La semaine dernière, le Pape a dépêché à Moscou, le secrétaire du Vatican pour les relations avec les États Giovanni Lajolo.

Invité par le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov, l'archevêque Giovanni Lajolo a également rencontré le métropolite Cyrille de Smolensk et de Kaliningrad, chef du département des relations ecclésiastiques extérieures du Patriarcat de Moscou, et un groupe de parlementaires. Ses entretiens ont notamment porté sur la possibilité de transformer en ambassades les missions diplomatiques des deux États.

Il s'agit d'une visite significative pour l'Eglise orthodoxe russe et pour le Vatican qui donne l'espoir d'une amélioration des relations bilatérales. On l'attendait depuis des décennies.

Les dirigeants totalitaires de l'URSS ont augmenté leurs pressions sur les catholiques locaux après que le précédent souverain pontife Jean-Paul II eut lancé une attaque contre le "rideau de fer". Les diocèses de l'Eglise catholique romaine ont été confinés à la clandestinité comme s'il s'agissait d'une secte dangereuse. Ce n'est qu'en avril 1991, en pleine perestroïka, que les chrétiens catholiques sont devenus plus libres grâce à la démocratisation de la société russe.

Deux ans plus tôt, pour la première fois dans l'histoire du Vatican, le Pape a donné une audience au leader d'un parti communiste, Mikhaïl Gorbatchev. Cette visite historique a marqué le début de la renaissance de l'Eglise catholique romaine en Russie. Moscou a établi des relations diplomatiques avec le Vatican.

A présent, la Conférence des évêques catholiques de Russie contrôle 300 diocèses qui comptent au total plus de 500.000 croyants dont le catholique le plus haut placé en Russie - le ministre du Développement économique et du commerce Guerman Gref. Les rapports entre l'Eglise catholique et les autorités russes se sont sensiblement améliorées, selon les évêques.

Mais l'État ne peut pas changer l'attitude traditionnellement négative de l'Eglise orthodoxe russe vis-à-vis des missionnaires catholiques locaux. L'Eglise orthodoxe accuse ses frères catholiques en Christ de prosélytisme, autrement dit de vouloir convertir les orthodoxes sur son territoire canonique.

Le Vatican rejette ces accusations indiquant que le mot "prosélytisme" a une signification "plus vaste" dans le monde orthodoxe. Les hiérarques orthodoxes rappellent que le Vatican recourt aux mêmes catégories linguistiques lorsqu'il défend ses intérêts. Le Saint Siège dénonce sans cesse le prosélytisme agressif au Brésil où les activités de sectes protestantes, notamment de pentecôtistes, portent préjudice aux diocèses catholiques.

La situation délicate des chrétiens gréco-catholiques, ou uniates, d'Ukraine est une autre pomme de discorde entre les Églises orthodoxe et catholique. L'Eglise uniate (sous la juridiction de Rome, mais de rite oriental) souhaite créer son patriarcat à Kiev et cherche à obtenir la permission de Rome.

Ces questions ont entravé l'évolution du dialogue entre le Vatican et les chrétiens orthodoxes, surtout pendant le pontificat conservateur de Jean-Paul II qui manquait de souplesse vis-à-vis de nombreux problèmes de l'époque moderne.

Les dirigeants de l'Eglise orthodoxe russe s'attendaient à ce que le nouveau Pape Benoît XVI, réputé pour son fondamentalisme, poursuive la politique de son prédécesseur. Heureusement, ces craintes ne sont pas fondées. Au contraire, les relations entre le Vatican et l'Eglise orthodoxe russe s'améliorent, rendant possible leur rapprochement œcuménique.

Nous pouvons tirer cette conclusion en analysant les récent propos du cardinal Walter Kasper. "Avec l'Eglise orthodoxe russe, la glace est rompue. L'Age de glace œcuménique n'existe pas", a indiqué le président du Conseil pontifical pour la promotion de l'unité des chrétiens au cours d'une conférence de presse à Rome. Selon Mgr Walter Kasper, la visite du Pape en Russie n'est pas pour demain, mais le Saint Siège œuvre pour surmonter les obstacles qui entravent l'organisation d'une telle visite. Le déplacement de l'archevêque Giovanni Lajolo à Moscou en est la preuve.

Cela confirme l'idée du Patriarche de Moscou et de Toutes les Russies Alexis II: l'arrivée d'un nouveau Pape marquera le début d'une nouvelle période dans la vie ecclésiastique de Rome qui permettra de "rénover" les relations avec les chrétiens orthodoxes.

Confrontées aux fléaux du monde moderne - le terrorisme, le SIDA, la pollution de l'environnement, les deux Églises chrétiennes comprennent qu'elles n'ont pas le droit de renoncer à la coopération et d'oublier l'idée d'œcuménisme.

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