La Russie ouvre un nouveau site de destruction des armes chimiques

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MOSCOU, 30 novembre. Viktor Litovkine, commentateur militaire de RIA Novosti.

Le deuxième site russe de destruction des stocks de substances toxiques (ST) militaires commencera à fonctionner le 1er décembre dans la localité de Kambarka en Oudmourtie (Oural). Au moment de la conclusion de la Convention sur l'interdiction des armes chimiques (1993) les stocks de la Russie étaient les plus importants au monde avec 40.000 tonnes de ST, les Etats-Unis venant en seconde position avec 36.000 tonnes. 6.349 tonnes de lewisite, une substance vésicante, se trouvent à Kambarka, placées dans des wagons-citernes sous protection de béton. Ces stocks doivent être détruits d'ici à la fin de 2007.

L'usine de Kambarka peut neutraliser plus de 2.500 tonnes de lewisite par an, par conséquent la tâche pourra être menée à bien sans trop forcer. D'autant plus que la Russie possède déjà une expérience non négligeable en la matière engrangée à la première usine de destruction des armes chimiques de Gorny, dans la région de Saratov, où 1.143,202 tonnes d'ypérite et de lewisite étaient stockées. Toutes ces substances toxiques doivent être détruites dès la fin de cette année. Intervenant lors de la session d'automne de l'Organisation internationale pour l'interdiction des armes chimiques à La Haye, le directeur adjoint de l'Agence fédérale pour l'industrie, Viktor Kholstov, a annoncé qu'il ne restait plus qu'à neutraliser 241,3 tonnes de lewisite et que ce serait fait d'ici à la fin du mois de décembre.

En outre les armes chimiques de troisième catégorie - munitions chimiques vides et dispositifs d'utilisation, au total 330.024 unités - et de deuxième catégorie - par exemple le phosgène - que possédait la Russie ont toutes été détruites. Dans la troisième catégorie on trouve des produits chimiques moins dangereux que l'ypérite et la lewisite ou encore des substances toxiques neuroparalysantes comme le sarin, le soman ou le VX, mais ils ne sont pas moins nocifs.

Sept des 24 sites où à l'époque soviétique on fabriquait des armes chimiques ont été détruits. Un huitième le sera d'ici au 29 avril 2007. En vertu d'un accord passé entre Moscou et La Haye, les autres seront convertis en vue d'y fabriquer des articles à vocation civile.

La première tranche du site de destruction des armes chimiques implanté dans la localité de Maradykovo (région Kirovski) entrera en service à la fin de l'année. On y neutralisera les substances toxiques contenues dans les obus d'artillerie et les ogives de missiles tactiques et tactico-opérationnels. Les dépôts de cette localité recèlent 6.890 tonnes de ST du type VX. Viktor Kholstov a assuré RIA Novosti que près de 4.300 tonnes de ces substances seraient neutralisées d'ici le 29 avril 2007.

D'ici au mois d'avril 2007 la Russie détruira plus de 8.000 tonnes d'armes chimiques dans ces trois sites. La Russie pourra alors annoncer à la communauté internationale la fin de la deuxième étape de destruction de ses stocks de substances toxiques.

Compte tenu que plusieurs autres usines de destruction des armes chimiques sont en chantier sur des sites de stockage - à Kizner, (Oudmourtie); à Chtchoutchye (région de Kourgan), à Potchep (région de Briansk) et à Leonidovka (région de Penza) - il y a tout lieu de penser que d'ici à 2009 la Russie remplira ses engagement concernant la troisième étape de la destruction des ST, à savoir la neutralisation de 45% de ses stocks. D'ici à 2012 elle doit détruire la totalité de ses armes chimiques.

La réalisation de cet objectif est devenue possible parce que ces derniers temps le gouvernement russe attache une attention toute particulière à la liquidation des armes chimiques. A ces fins il alloue régulièrement les sommes requises qui ne sont pas négligeables puisque les dépenses se montent à 171 milliards de roubles, soit près de 6 milliards de dollars. 18 milliards de roubles (600 millions de dollars) seront alloués au cours de la seule année 2006. Les espoirs d'une aide étrangères nourris à une certaine époque par les responsables russes - une aide qui, à propos, avait été officiellement promise par la communauté internationale - ne se sont pas réalisés.

Prenons, par exemple, la construction de l'usine de destruction des armes chimiques de la localité de Chtchoutchye, dans la région de Kourgan. Pour ce chantier les Etats-Unis avaient promis au minimum 888 millions de dollars, mais en réalité ils n'ont versé que 10% de cette somme. Et encore, pour des motifs imaginaires pendant plusieurs années d'affilée ils n'avaient donné pas un seul cent. Ce qui avait contraint le Kremlin de modifier son programme de destruction des ST, de miser non pas sur Chtchoutchye, où sont stockées 5.456 tonnes de sarin, de soman et de VX, au total 9.382 wagons de chemin de fer, mais sur d'autres sites. Autrement la Russie n'aurait pas pu remplir ses engagements internationaux concernant la destruction des armes chimiques.

C'est vrai que les autres pays n'ont pas tous le même comportement que les Etats-Unis, tant s'en faut. Une bonne partie des sommes nécessaires à la construction des sites de Gorny et de Kambarka a été fournie par l'Allemagne. Actuellement la Grande-Bretagne apporte une grande contribution à la construction de l'usine de Chtchoutchye. Une assistance est également prêtée par l'Italie, la Norvège, les Pays-Bas, l'Union européenne, le Canada, la Nouvelle-Zélande, la République tchèque, la Pologne et la Suisse. Viktor Kholstov a annoncé que des ententes appropriées pourraient intervenir avec la Suède, la Finlande, la France et l'Irlande. Dans le même temps le directeur adjoint de l'Agence fédérale pour l'industrie a fait remarquer que l'aide étrangère ne concernait que la construction de trois sites seulement sur les sept en chantier. Pour l'essentiel, cette coopération avec les partenaires étrangers dans le domaine de la destruction des armes chimiques se traduit par des livraisons d'équipements, la création d'infrastructures industrielles, des travaux de montage et de réglage et la formation de spécialistes.

Les Etats étrangers rechignent à investir dans les travaux de construction des sites, qui représentent jusqu'à 40% des dépenses totales. Ils refusent également de mettre la main à la poche pour financer les équipements socio-culturels qui accompagnent les sites de destruction des armes chimiques. Or, ces dépenses constituent environ 10% du coût total de ces sites.

Cependant, cela ne joue pas un rôle déterminant, estime Viktor Kholstov. En lançant l'usine de Kambarka la Russie montre avec évidence que même avec une aide étrangère réduite elle est en mesure de remplir ses engagements internationaux concernant la destruction des stocks de substances toxiques.

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