La coopération internationale des régions sibériennes

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MOSCOU, 5 décembre. Alexandre Iourov, commentateur politique de RIA Novosti. La coopération régionale internationale a actuellement le vent en poupe en Russie. Beaucoup de pays et de compagnies étrangères préfèrent établir avec les régions russes des contacts directs sans passer par le centre fédéral.

Cependant, cet attrait réciproque des autorités régionales et du grand business étranger se heurte à de sérieux problèmes qui pour beaucoup ont pour origine les objectifs diamétralement opposés des participants au dialogue.

Respectivement environ 13% et 34% des réserves mondiales de pétrole et de gaz prospectées se trouvent en Russie, notamment en Sibérie. Or, la production annuelle des ressources énergétiques primaires dans le pays représente plus de 12% de la production mondiale totale.

Aujourd'hui le complexe énergétique russe représente environ un quart du produit intérieur brut (PIB) et un tiers de la production industrielle de la Russie et à peu de chose près la moitié des recettes du budget fédéral, des exportations et des rentrées de devises du pays. Cette richesse ne saurait laisser indifférents les hommes d'affaires étrangers qui cherchent à investir dans des projets pétroliers. Cependant, trop souvent ils délaissent l'infrastructure du secteur pétrolier.

On connaît l'activité déployée en Russie par les grandes sociétés mondiales: Shell, Exxon, Mobil, les compagnies pétrolières publiques d'Inde et de Chine. Ces géants prennent part à la mise en valeur de gisements à Sakhaline et en Sibérie. La compagnie française Total se montre particulièrement active. Selon certaines données, en quatre ans elle a injecté quelque 400 millions de dollars dans l'extension du gisement Kharianguinski en Sibérie orientale.

De nos jours c'est le secteur des matières premières qui draine le gros des investissements étrangers. En Sibérie et en Extrême-Orient russe plus de 80% des capitaux d'origine étrangère aboutissent dans l'escarcelle d'une poignée de régions riches en matières premières. Pour l'essentiel ce sont des régions exportatrices de produits énergétiques: région de Tioumen, Arrondissements autonomes des Khanty-Mansis et des Yamalo-Nenets, le territoire de Krasnoïarsk et la République de Sakha (Yakoutie). Bien souvent les investisseurs étrangers placent leurs capitaux afin de les faire rapidement fructifier et ils les placent là où, selon eux, les conditions sont les plus favorables, c'est-à-dire dans les grandes villes avec un potentiel industriel et une infrastructure de marché développés. Or, ces centres d'attraction sont fort peu nombreux en Russie.

Une bonne partie du territoire russe est insuffisamment développé sur le plan économique et ne possède pas l'infrastructure requise. L'année dernière aucun investissement n'a été fait dans douze régions russes, principalement septentrionales, orientales et méridionales éloignées du centre.

En 2004, la part des investissements faits dans le District fédéral Central a représenté 47,6% du total des fonds étrangers injectés dans le pays. En deuxième position on trouve le District de l'Oural, qui englobe la région de Tioumen (17,4%) suivi du District Extrême-Oriental (12,5%). Après on trouve par ordre décroissant les districts fédéraux de Sibérie (7,7%), du Nord-Ouest (7,1%), de la Volga (6%) et du Sud (1,7%). Si ces dernières années les investissements à l'est se sont quelque peu étoffés, Moscou à bénéficié à lui seul de davantage d'investissements étrangers que toutes la partie asiatique du pays avec ses richesses naturelles.

D'ailleurs, les investisseurs étrangers n'y sont pour rien. Ils considèrent la Russie comme un marché en cours de formation. Et ils ne s'insèrent que dans les branches où règne un climat plus ou moins favorable pour le business. En règle générale les étrangers rechignent encore à investir dans le développement de l'industrie et de l'infrastructure des régions. Toutefois, en ce qui concerne la fabrication de la bière, par exemple, les capitaux étrangers sont actifs du moment que le marché des boissons faiblement alcoolisées est actuellement en plein essor.

Cette année les grands brasseurs internationaux Heineken et BBH ont franchi la chaîne ouralienne et lancé une offensive en direction de la Sibérie. La première "salve" a été tirée par le groupe néerlandais Heineken quand il a fait l'acquisition de la totalité des actions de la brasserie Patra à Iekaterinbourg. Peu après les bataves ont fait part de leur intention d'acheter une autre brasserie implantée, elle, en bordure du lac Baïkal, à Irkoutsk. La réponse des concurrents ne s'est pas fait attendre. Presque immédiatement après l'opération réalisée par Heineken la brasserie Baltika (son principal actionnaire est la société scandinave Baltic Beverage Holding AB) a annoncé qu'elle avait mis la main sur une brasserie de Krasnoïarsk.

En principe, pour drainer des capitaux étrangers dans les régions l'Etat avance en qualité de brin de paille salvateur le partenariat mi privé-mi public. C'est là une nouvelle forme de coopération d'affaires que les autorités prônent activement. L'Etat russe pense que les entrepreneurs trouveront des sites où investir présente des avantages, même dans des régions retardataires. En échange l'Etat promet une aide à ces businessmen. En tout cas, il a à plusieurs reprises déclaré qu'en cas d'arrivée de commerçants dans des régions dépressives les autorités fédérales les aideraient à mettre en place l'infrastructure nécessaire.

Les spécialistes sont de plus enclins à penser que dans cette situation chaque région aurait intérêt à créer sur son territoire au moins un site attractif sur le plan des investissements, y créer des conditions requises, investir et ensuite songer à conférer davantage d'envergure au développement. En attendant, les entrepreneurs locaux sont difficiles à mouvoir et plus ils sont éloignés du centre plus leur activité est faible.

Selon la revue Ekspert, l'année dernière parmi les vingt régions russes bénéficiant d'investissements étrangers les mégalopoles et leurs régions ont drainé environ 45% de la totalité des investissements. Les régions riches en matières premières, dont les régions exportatrices de produits énergétiques que sont le territoire de Krasnoïarsk, la région de Tioumen, les districts de Iamalo-Nenets et des Khanty-Mansis, la République de Sakha (Iakoutie) n'en ont reçu que 20% . Environ 13% sont allés aux grands centres industriels (régions de Samara, Sverdlovskaïa, de Vologda, de Lipetsk, de Tchéliabinsk et de Perm ainsi que le Tatarstan). Les régions ne possédant pas d'importantes ressources naturelles mais dans lesquelles le climat d'investissement est assez favorable (région de Vladimir et de Kostroma) en ont obtenu plus de 1%. Ce qui signifie que les 20 principales régions russes captent 93% des investissements étrangers directs annuels.

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