OCS: pourquoi l'Iran et la Biélorussie ne sont pas près d'entrer

S'abonner

Par Dmitri Kossyrev, RIA Novosti

L'Iran, la Biélorussie et d'autres pays considérés comme futurs membres à part entière de l'Organisation de coopération de Shanghai (OCS) n'y seront pas admis dans un avenir proche. Cela s'explique par la nécessité pour l'organisation de se pencher sérieusement sur l'intégration économique de l'Asie centrale et sur la création d'un espace commun de coopération humanitaire régionale. C'était là le sujet principal de la réunion du Conseil des ministres des Affaires étrangères des pays membres de l'OCS qui s'est tenue à Shanghai, à un mois du prochain sommet qui coïncidera avec le 5e anniversaire de l'OCS en tant qu'organisation et le 10e de son prédécesseur, le sommet annuel sur la sécurité des frontières.

Cet anniversaire a justement obligé les membres de l'organisation à reconnaître la nécessité de préciser les frontières de l'OCS, sans quoi elle pourrait bien s'exposer à une crise, les jeux géopolitiques entravant son efficacité réelle.

Il s'agissait d'une rencontre ministérielle de travail, et aucun scoop n'y était attendu. L'activité de l'OCS en tant qu'organisation internationale est de plus en plus incarnée par de nombreux programmes dans le cadre des ministères de la défense, de la culture, de l'éducation, de l'économie, etc. Les ministres des Affaires étrangères des six pays ne se bornent pas à systématiser tout ce travail, mais veillent aussi à conserver la structure de l'OCS en tant qu'organisation. Et ils semblent percevoir une tension dangereuse au sein de cette structure. Les six pays actuellement membres n'arrivent pas du tout à mettre en �uvre les nouvelles initiatives sans cesse adressées à l'organisation et à son appareil, et sont par conséquent contraints de faire abstraction de tout ce qui est superflu. Tout d'abord, l'admission de nouveaux pays à l'OCS sera bloquée pour une période indéterminée.

Le ministre des Affaires étrangères du Kazakhstan, Kassymjomart Tokaïev, qui était le premier à prendre la parole à la réunion, a déclaré: "Le Kazakhstan juge nécessaire de s'abstenir temporairement d'élargir les rangs de l'organisation".

Ces paroles ont été reprises ensuite par pratiquement tous ses collègues.

Ainsi, Sergueï Lavrov a déclaré qu'il y avait plusieurs formes de coopération de l'OCS avec d'autres Etats: par exemple, l'Afghanistan participe à certaines actions de l'OCS en qualité d'invité. L'organisation n'a pas encore élaboré de modalités de travail avec les observateurs et autres partenaires, sans parler de la perspective de l'accroissement du nombre de ses membres à part entière, qui apporteront avec eux leurs manoeuvres politiques.

L'OCS regroupe actuellement le Kazakhstan, la Kirghizie, la Chine, la Russie, le Tadjikistan et l'Ouzbékistan. La Mongolie, le Pakistan, l'Inde et l'Iran y ont un statut d'observateur, depuis un an seulement pour les trois derniers.

Les politologues, peu au fait du mécanisme authentique de fonctionnement de l'organisation, se réjouissaient de ses succès, car l'OCS s'attire les regards de tous ceux qui ont des intérêts importants en Asie centrale. Rien que l'addition des populations de ces pays produit un effet incroyable.

Qu'arrive-t-il aujourd'hui? Par exemple, pour des raisons compréhensibles, tout le monde se demandait si l'Iran serait admis cet été à l'OCS. Shanghai a répondu nettement: non. Ni l'Iran avec ses rapports compliqués avec les Etats-Unis et l'AIEA, ni la Biélorussie, européenne, ni le Pakistan avec ses tentatives de rechercher de nouveaux amis à la lumière du rapprochement indo-américain ne pourront pour le moment être admis à l'OCS.

Il ne s'agit pas seulement d'une absence de compréhension - et de documents - sur la signification de l'appartenance de nouveaux pays à l'OCS. Faut-il par exemple prendre en considération leurs traités conclus avec d'autres Etats?

Le problème, c'est qu'il y a déjà autour de l'OCS trop de politique et de déclarations générales. Et l'admission de nouveaux membres entraînera de nouvelles déclarations. Selon certaines informations, le président iranien Mahmoud Ahmadinejad, qui assistera au prochain sommet de l'OCS à Shanghai, aurait été exhorté d'y parler le moins possible de l'Amérique ou d'Israël et de se prononcer surtout sur le rôle de l'Iran en tant que partenaire économique régional.

L'essentiel, c'est l'économie. C'est le sens même de l'existence. L'OCS, en deux mots, se propose de garantir la sécurité et le développement économique et social de l'Asie centrale. Et rien de plus.

Selon Kassymjomart Tokaïev, l'économie est la priorité de l'OCS. Pour le Kazakhstan, Etat de transit, l'élaboration de grands projets en matière de transports et de communications, ainsi que d'énergie (en particulier la politique de construction de pipelines), a une grande importance dans le cadre de la coopération économique. Un programme de coopération économique a d'ailleurs été approuvé en septembre 2003 à Bichkek, a-t-il rappelé.

La mention par Kassymjomart Tokaïev du plan de Bichkek est très symptomatique, de même que les mentions fréquentes par son collègue du Tadjikistan - Talpak Nazarov - de la rencontre des chefs de gouvernement des pays de l'OCS qui se tiendra à l'automne prochain à Douchanbe. C'est là où feront enfin leur apparition les projets pilotes de l'OCS et où sera précisée l'orientation économique de l'organisation.

Par conséquent, la première réunion du Conseil d'affaires de l'OCS, club des hommes d'affaires de la région, sera un grand événement du sommet de juin à Shanghai. D'ailleurs, ses portes sont largement ouvertes aux collègues des pays observateurs et partenaires. Le but en est évident: stimuler les investissements dans les projets régionaux. L'accord interbancaire dans le cadre de l'OCS poursuit cet objectif. Autrement dit, dès que les milieux d'affaires voudront réaliser tels ou tels projets, ils sauront où trouver l'argent nécessaire.

Les contacts entre scientifiques, étudiants et journalistes de la région doivent aussi faire l'objet d'un plan.

Le projet de changement du poste de Secrétaire exécutif de l'OCS en Secrétaire général présente aussi de l'intérêt. Il ne s'agit pas simplement d'un échange de mots, il s'agit de conférer à cet organe qui siège à Pékin des pouvoirs plus vastes. D'ailleurs, le Chinois Zhang Deguang, qui a assumé pendant trois ans le poste de chef du secrétariat, sera remplacé par le diplomate kazakh Boulat Nourgaliev, aujourd'hui ambassadeur à Tokyo. Bref, l'OCS subira des réformes visant à rendre l'organisation plus efficace, plutôt que spectaculaire.

Fil d’actu
0
Pour participer aux discussions, identifiez-vous ou créez-vous un compte
loader
Chat
Заголовок открываемого материала