Comment le Pentagone a financé la conception d'une arme russe - 2

© RIA Novosti . Yuri Shipilov / Accéder à la base multimédiaS-300
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Comment l'académicien russe a-t-il réussi à créer ce système et ce avec l'argent venu directement des Etats-Unis ?

On peut acheter un secret mais pas sa solution

Comment l'académicien russe a-t-il réussi à créer ce système et ce avec l'argent venu directement des Etats-Unis ?

Il est clair que ni le groupe de recherche et de production Anteï, ni le ministère de la Défense, son client, n'ont disposé, pendant une période prolongée, de l'argent nécessaire. Que ce soit pour verser les salaires et encore moins pour réaliser de nouveaux armements. Mais Efremov a trouvé la solution.

A son client, le ministère de la Défense et à la centrale de commerce d'armements russes Rosvooruzhenie (auj. Rosoboronexport) - sans oublier bien sûr le gouvernement - il a proposé de vendre aux Américains son système de missiles sol-air S-300V, objet, depuis des années, d'une chasse ratée de la part de la CIA. Selon l'académicien, c'était une excellente chance pour la société qui modernisait les batteries Patriot de réaliser enfin les objectifs assignés par le Pentagone.

Je ne pas pense pas qu'il soit nécessaire de préciser la nature des réponses que l'académicien a entendues de la part des généraux. Un geste éloquent - un doigt porté à la tempe - a été leur réaction la moins brutale.

A l'époque, nos "spécialistes de l'intox" cherchaient déjà à "refiler" aux Américains via la Biélorussie - certes, avec beaucoup de tapage dans la presse qui dénonçait "la vente par Minsk de secrets de Moscou" - un vieux S-300PMU, un développement du concurrent d'Anteï, les Bureaux d'études Almaz.

Mais quatre batteries d'une version modernisée de ce système, S-300PMU1, avaient déjà été vendues à la Chine et l'espoir était né que ce contrat aurait un prolongement. Mais si un S-300V était vendu aux Américains, la perspective de la poursuite de la coopération avec les Chinois risquait d'être fortement compromise.

Une question délicate se posait alors : si le Pentagone achète un système, pourquoi l'Armée populaire de libération en achète-t-elle un autre ? Pékin a-t-il commis une erreur ? Il était évident que cette question surgirait. Quant aux généraux, ils disaient de leur côté que le S-300V est un système renforçant la DCA et la défense antimissile de Moscou. "Nous ne pouvons pas la compromettre en livrant nos secrets", expliquaient-ils à l'académicien.

Le constructeur général prouvait de son côté que l'algorithme de direction des missiles du S-300V ne saurait être déchiffré même en dix ans et qu'un système de loin plus puissant verrait le jour bien avant. On ne l'écoutait pas. Alors, Efremov a décidé d'accomplir une démarche peu ordinaire, ressemblant fort à un véritable chantage.

A sa demande, le président d'un comité parlementaire, "tapageur et querelleur" - nous ne le nommerons pas - s'est présenté devant un fonctionnaire haut placé, dont dépendait l'autorisation de vendre le S-300V aux Américains. Le député a promis, en cas de refus, d'exiger, devant la Douma, le limogeage du responsable.

Le fonctionnaire a cédé, apposant sa signature au bas de l'autorisation.

Plus tard, l'académicien sera accusé d'avoir vendu "des secrets défense à l'ennemi" et même de "trahison"... Le FSB (service de sécurité) intentera, contre lui, une action judiciaire. Un grand quotidien rapportera que la DCA autour de Moscou n'était plus ce qu'elle était après la vente des missiles de Efremov.

Mais le S-300V vendu aux Américains était tout neuf. En présence de la sécurité et d'experts de Rosvooruzhenie, le système a quitté l'usine où il avait été assemblé. Le Pentagone a obtenu deux batteries (radar de surveillance, poste de commandement, deux rampes de lancement pour les missiles Gigant et Gladiator). Plus 23 missiles sur les 144 nécessaires. Le total, pour 90 millions de dollars.

Il est vrai que les Américains ont d'abord versé à NPO Anteï seulement la moitié de cette somme. Un jeu quelque peu obscur se poursuivait entre le Pentagone et la centrale Rosvoorouzhenie. On soupçonnait que les services de renseignements, de part et d'autre, étaient impliqués.

Il est aussi vrai que Rosvooruzhenie n'a pas livré aux Américains le radar de balayage par secteurs, le coeur du S-300V. Mais l'académicien ne s'en souciait déjà plus.

L'argent obtenu lui a suffi pour mettre au point son nouveau système Anteï 2500. Testé, il est entièrement opérationnel.

P.S. Veniamin Efremov disparaissait le16 septembre dernier, en laissant ses conceptions et ses idées qu'il partageait généreusement avec ses disciples et ses collègues. Cela signifie que l'oeuvre de sa vie est entre des mains sûres et professionnelles.

 (Pour lire le début cliquez ici)

L'avis de l'auteur peut diverger de celui de la rédaction.

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