La Russie vue par la presse de la CEI et des pays baltes

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ESTONIE

Les observateurs sont préoccupés par l'accroissement de la dépendance énergétique de l'Union européenne face à la Russie. "La Russie ne fait qu'intimider l'Occident en recourant ouvertement à l'énergie en tant qu'arme politique, en rejetant le capital occidental et en scindant ouvertement l'UE. Il n'y a rien d'étonnant à ce que l'Allemagne, plus grand pays de l'Union et partenaire préféré de la Russie, soit irritée. A la rencontre de Lahti, la chancelière fédérale allemande Angela Merkel a exigé l'élaboration d'ici le printemps, d'un programme précis de diversification des sources d'approvisionnement en énergie, pour éviter la dépendance envers la Russie" ("Eesti Paevaleht", 23.10).

Certains journalistes appellent à ne pas "échanger" le problème des droits de l'homme en Russie contre la question énergétique. "Sans la coopération avec la Russie, on ne saurait garantir que le chauffage central fonctionnera à l'avenir dans les maisons européennes (�). Mais la situation en Russie a contraint les politiques européens les plus obséquieux à soulever la question des engagements politiques" ("Eesti Paevaleht", 21.10).

De l'avis d'analystes estoniens, la Russie n'est pas intéressée à trouver des solutions aux "conflits gelés" dans l'espace postsoviétique. "Poutine a menti en affirmant que tout ce qui se passe dans le Caucase du Sud est une affaire purement intérieure de la Géorgie et des séparatistes. En réalité, Moscou traite depuis longtemps Soukhoumi et Tskhinvali (capitales des républiques autoproclamées d'Abkhazie et d'Ossétie du sud, ndlr) comme des chefs-lieux d'entités de la Fédération. Comment expliquer autrement les visites régulières de politiques russes dans ces régions rebelles ? Les ambitions impériales de la Russie sont trahies par sa volonté de conserver deux puissants leviers pour influer sur la Géorgie, en la personne des séparatistes, et d'empêcher à tout prix son voisin sud d'intégrer l'OTAN ("Postimees", 23.10).

LETTONIE

Les négociations au sommet informel de l'Union européenne à Lahti, avec la participation de la Russie, pourraient être présentées comme l'échec total de la politique énergétique de l'UE, affirment des observateurs locaux. "Poutine s'oppose comme toujours à la signature de la Charte de l'énergie (sic : la Russie l'a signée sans la ratifier, ndlr), ce qui faciliterait l'accès des compagnies occidentales au secteur énergétique russe", "Poutine propose (�) un monopole énergétique verticalement intégré interdisant à ses concurrents de s'implanter sur le marché russe du gaz et du pétrole (�). Si le gaz et le pétrole deviennent la nouvelle idéologie du Kremlin, la seule réponse de l'Occident pourrait être l'unité" ("Diena", 23.10). "Chacune en est restée pour ses frais. L'Europe n'a pas obtenu de garanties de sécurité énergétique, la Russie, elle, n'a pas obtenu d'approche spéciale à son égard" ("Telegraf", 23.10).

Les médias s'inquiètent de l'interdiction russe d'importer des conserves de poisson lettonnes. Des experts affirment que la Russie a déclaré à la Lettonie la "guerre des sprats" dans l'intérêt de ses propres producteurs. La cause de cette interdiction est la découverte, dans les conserves lettonnes, d'une teneur élevé en benzapyrène, une substance cancérigène (�). Etant donné que les normes relatives à la quantité autorisée de benzapyrène dans des conserves diffèrent entre la Russie et l'Union européenne, les Russes ont désormais une chance réelle d'évincer de leur marché les producteurs lettons (�). De l'avis du président de l'Association lettonne de l'industrie du poisson Inarijs Voits, l'interdiction russe est une démarche politique et aussi une sorte de lutte concurrentielle déloyale" ("Telegraf", 19.10). "La première attaque des autorités russes contre les denrées étrangères inamicales a été lancée au printemps 2006, avec l'interdiction d'importer le vin moldave et géorgien (�). C'est maintenant le tour des sprats lettons (�). Les experts sont sûrs : (�) cette décision traduit avant tout des intérêts plus économiques que politiques. A savoir, la volonté de protéger les intérêts des producteurs russes" ("Biznes&Baltija", 20.10).

LITUANIE

Nombre d'articles d'analyses sont comme toujours consacrés à l'assassinat de la journaliste Anna Politkovskaïa. On rappelle la "logique" de ce genre de crimes dans la Russie de nos jours, les tentatives de son élite politique de "ressortir la piste des services secrets occidentaux" et le fait que, dans leur majorité, les Russes sont enclins à donner foi à ces versions. "On le sait, la journaliste, avec l'organisation des défenseurs des droits de l'homme Memorial, a établi que des policiers envoyés en mission en Tchétchénie en 2001 ont enlevé, torturé et tué des civils. Les hommes politiques russes rejettent apparemment cette version. Dans les médias, toujours plus souvent, ils soulignent que la journaliste a été tuée par des agents des services spéciaux occidentaux. Dans le but de porter atteinte à l'image de la Russie en tant qu'Etat démocratique. La majorité absolue des habitants de la Russie y croient" ("Panorama", 19.10). "L'assassinat d'Anna Politkovskaïa entrera dans l'histoire de l'Etat russe et y restera comme un événement monstrueux et logique (�). Si la Russie comptait des centaines de journalistes comme elle, son assassinat n'aurait aucun sens (�). Une journaliste libre a été tuée avant tout par le manque de libertés à l'échelle du pays. L'absence de liberté a tué la liberté : c'est en cela que réside la logique de cet assassinat, quel qu'en soit l'auteur. L'absence de liberté engendre l'impunité (�). Les centaines de personnes qui sont venues dire adieu à Anna avaient l'air déprimé et impuissant. Leur place réelle de personnes privées de tout droit leur a été assignée, celle de personnes auxquelles on ne dira que ce qu'on jugera nécessaire" ("Forumvilnius.lt, 18.10).

UKRAINE

Certains médias développent le thème classique de l'intérêt du Kremlin pour le système ukrainien de transport de gaz en prévision de la visite du Premier ministre russe Mikhaïl Fradkov en Ukraine. Les suppositions vont de la reprise du projet de création d'un consortium de transport de gaz à la vente du système de gazoducs ukrainiens à la Russie. D'ailleurs, cette dernière variante n'est pas la meilleure selon les journalistes. Elle priverait Kiev d'un argument de poids dans sa polémique avec Moscou. "Il est déjà clair que la Russie souhaite arracher l'accès au système de transport de gaz ukrainien au gouvernement de Ianoukovitch en échange du gaz et des prix gaziers" (Glavred, 20.10). "[Il faut] essayer de s'entendre avec la Russie, y compris sur le système de transport de gaz... Mais l'expérience de la Biélorussie voisine montre bien... qu'on pourra ensuite ne plus compter avec nous" (From-ua, 19.10).

D'une part, les désaccords entre les deux pays élargissent la marge de man�uvre de l'Ukraine dans son marchandage avec la Russie, d'autre part, ils risquent d'aiguiser les appétits du Kremlin. "La mystérieuse société RosUkrEnergo aura le statut le plus privilégié... les Russes se verront également céder les restes des biens publics dans l'industrie chimique... Moscou espère que Kiev renoncera à l'adhésion accélérée à l'OMC, mettra fin aux discussions sur l'OTAN et �uvrera pour la renaissance... de l'Espace économique unique" (Vlast deneg, 20-26.10).

MOLDAVIE

Les journaux critiquent le projet intitulé "Principes fondamentaux du statut de la Transnistrie au sein de la République de Moldavie" élaboré par le président en exercice de l'OSCE et ministre belge des Affaires étrangères Karel de Gucht. L'Europe a tort de croire que les parties en conflit sont Chisinau et Tiraspol, alors qu'il s'agit d'un conflit entre Chisinau et Moscou, selon les journalistes. "Les auteurs du projet tiennent à éviter le mot "fédération" qui suscite une réaction négative en Moldavie, mais cherchent à intégrer les principes du fédéralisme belge dans le mémorandum de M.Kozak... Le pouvoir judiciaire variante belge doit être unique, mais il peut comprendre des juges étrangers, représentants des "pays C'est ainsi que le président en exercice de l'OSCE envisage d'inclure des juges russes au sein de la future Cour Constitutionnelle de Moldavie. La liste des candidats... présentée par le ministre russe Lavrov devrait même déjà être dressée" (Flux, 19.10).

La presse condamne les dirigeants moldaves pour leur refus de soutenir la Géorgie dans son conflit contre la Russie pendant l'Assemblée parlementaire du GUAM à Chisinau. "Ce n'est pas l'adoption de la déclaration qui importe, mais le fait que les dirigeants moldaves se sont montrés lâches et indignes, ils se sont compromis aux yeux des Géorgiens" (Jurnal de Chisinau, 24.10).

ARMENIE

Le conflit russo-géorgien est au centre des discussions. "Animés par l'idée de défendre leur intégrité territoriale, les Géorgiens ne considéreront pas que les privations résultent des activités de leur président Mikhaïl Saakachvili... La Russie devrait agir autrement. Elle doit cesser de donner l'initiative aux autorités géorgiennes et d'essayer de réagir durement mais toujours tardivement" (Hayots Achkhar, 18.10). "L'époque où Moscou était obligé de compter avec Washington, Paris, Berlin, Londres est révolue. Moscou redevient un acteur de même plan et estime qu'il peut essayer d'exercer des pressions sur un pays trop impertinent à son goût en suivant l'exemple des Etats-Unis capables de renverser le régime irakien sur l'unique soupçon que Saddam Hussein posséderait des armes chimiques... Le Kremlin... a informé la Maison Blanche sur un ton assez ferme que la politique d'encouragement du gouvernement géorgien rebelle était inadmissible... Et cela a refroidi les ardeurs de Washington" (168 jam, 17.10).

Selon les analystes, les présidents russe et géorgien ont tiré des bénéfices politiques du conflit entre leurs pays. "Qui a surtout profité du scandale dans les rapports russo-géorgiens? Les dirigeants des deux pays. M.Saakachvili a remporté les élections locales. Quant à M.Poutine, sa cote de confiance est telle que les personnalités artistiques, qui ont toujours préféré se taire à propos du troisième mandat de Vladimir Poutine, ont jugé nécessaire d'appuyer les pétitions sur la réélection du président. A propos, cela a démontré une fois de plus l'attachement des Russes à un pouvoir fort" (Azg, 18.10).

GEORGIE

Les médias ont été franchement déçus par le fait qu'au récent Sommet informel de l'Union européenne (UE) de Lahti (Finlande), l'Occident a préféré "ne pas faire mousser" la question du conflit russo-géorgien, en se limitant à exhorter les parties à faire preuve de plus de modération. Or, la visite en Russie de la secrétaire d'Etat américaine, Condoleezza Rice, n'a pas moins désappointé les journalistes. "Les autorités de la Géorgie fondaient beaucoup d'espoirs dans ce Sommet. Tbilissi avait cru que l'Union européenne ne manquerait pas de demander des comptes à la Russie pour "avoir joué avec les nerfs des Géorgiens". Malheureusement, il n'en fut rien. Poutine a brossé devant les Européens un tableau présentant les autorités de la Géorgie comme des violeurs, ni plus ni moins. Sur ce plan, la rencontre entre Poutine et Condoleezza Rice n'a pas, non plus, justifié les attentes de Tbilissi� On avait bien espéré en Géorgie que Rice amènerait Poutine à regretter amèrement d'opprimer un petit pays. Mais on ignore tous les détails de l'entretien entre Rice et Poutine. On sait seulement que la secrétaire d'Etat américaine a recommandé à la Russie et à la Géorgie d'éviter toute escalade du conflit. Le Sommet finlandais et la visite de Rice nous ont persuadés une fois de plus que l'on ne doit compter que sur soi-même. Il se peut évidemment que l'Amérique nous considère comme un partenaire stratégique, mais elle préfère manifestement la Russie. Toujours est-il que l'Amérique ne se querellera pas avec la Russie à cause de nous. Mais on ne sait pas pourquoi les Géorgiens ne veulent toujours pas y croire. Néanmoins, des exemples de ce type ne manquent pas" (Akhali Taoba, 23.10).

Les mesures appliquées par la police russe à l'encontre des Géorgiens ethniques sont comparées aux persécutions des Juifs en Allemagne nazie. "Ce qui se produit à présent est une absurdité sans bornes. Les Géorgiens sont persécutés en Russie comme les Juifs l'étaient dans l'Allemagne nazie. Il est vrai qu'on n'en est pas au port obligatoire de l'étoile jaune. Pourtant, tout ce que se produit aujourd'hui en Russie, c'est du fascisme à l'état pur. Par les expulsions massives de Géorgiens, les politiciens russes endurcis espèrent sans doute pouvoir attiser encore plus le mécontentement qui couve objectivement en Géorgie face au régime Saakachvili. Mais l'effet est inverse. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, le néofascisme russe juste avant les élections en Géorgie a fait monter en flèche la cote de popularité de Saakachvili, auparavant en chute libre, alors que celle de Poutine, déjà très haute, s'est envolée" (Sakartvelos respublika, 18.10).

AZERBAIDJAN

La presse d'opposition accuse directement les leaders des partis démocratiques d'Azerbaïdjan de ne pas vouloir maintenir de contacts avec les forces démocratiques en Russie. "Nul n'ignore qu'alors que d'étroits rapports existent aujourd'hui entre les autorités de l'Azerbaïdjan et de la Russie, les forces démocratiques de notre pays ont plutôt des relations froides avec notre voisin au nord. Il n'y a pas eu effectivement depuis ces dix dernières années de visites en Russie de leaders de nos partis politiques du camp démocratique. Nos leaders démocratiques se rendent plus volontiers dans les pays d'Occident, préférant manifestement coopérer avec les forces politiques des Etats occidentaux" (Yeni Musavat, 21.10).

La presse accuse les autorités russes de protéger les groupes néofascistes. "Les ultranationalistes ont-ils acquis des protections dans les "couloirs du pouvoir" au Kremlin? Les skinheads se pratiquent toujours à la terreur en Russie� L'ampleur du soutien dont les ultranationalistes bénéficient dans les "échelons supérieurs du pouvoir" est évidente � Le 4 novembre prochain, alors que la Russie va célébrer, à l'instar de l'année dernière, sa principale fête - le Jour de l'unité nationale - l'extrême droite et les nationalistes se proposent d'organiser leur propre "Marche russe"� La capitale russe se prépare à un défilé fasciste d'envergure� Il faut s'attendre à une action conjointe des mouvements nationalistes, voire fascistes" (Ekho, 20.10).

KAZAKHSTAN

Toute une série de publications sont consacrées au récent essai d'une bombe nucléaire en République Démocratique et Populaire de Corée (RDPC). Selon les experts, la Corée du Nord renoncera à sa politique de chantage si la Fédération de Russie et la République populaire de Chine (RPC) adoptent une attitude plus ferme à l'égard de Pyongyang. "Or, il n'a pas été prouvé jusqu'ici qu'une explosion nucléaire ait effectivement eu lieu en Corée du Nord, car il peut fort bien s'agir d'un banal essai d'une charge expérimentale quelconque� La tentative de la RDPC de faire passer un essai tout à fait ordinaire pour quelque chose de beaucoup plus sérieux n'est peut-être qu'un chantage élémentaire, man�uvre à laquelle Kim Jung-il recourt depuis longtemps� Si demain, la Russie et la Chine durcissent leur attitude, la RDPC sera bien obligée d'obtempérer. Et ce, parce que la Corée du Nord est un Etat subventionné avant tout par la Chine. Mais pour un donateur aussi puissant que Pékin, toute perspective, ne fût-ce que mythique, de l'existence de l'arme nucléaire en Corée du Nord est pour le moins désagréable" (Liter.kz, 19.10)

Les médias signalent que les cas de plus en plus fréquents de discrimination ethnique lors de l'embauche d'immigrés économiques en Russie sont en train de revêtir un caractère politique. "La lutte contre les "hôtes indésirables" en Russie prend l'allure de persécutions politiques� Selon les sources, 5 à 15 millions de personnes travaillent "au noir" en Russie, et seulement quelque 700 000 étrangers possèdent le fameux permis de travail� Or, le plus curieux est que, depuis ces derniers temps, tous les heureux détenteurs de ce document n'arrivent pas à trouver de travail. Notre correspondante à Moscou s'est livrée à une petite expérience, en contactant par téléphone des employeurs potentiels et en se faisant passer pour une demandeuse d'emploi. A l'autre bout du fil, on lui demandait très poliment si elle avait son permis de travail et la réponse étant positive, on s'intéressait ensuite à sa citoyenneté. A la réponse: "Ukraine", les secrétaires déclaraient alors que l'on n'embauchait ni les Géorgiens ni les Ukrainiens" (Liter.kz, 24.10).

OUZBEKISTAN

La presse est préoccupée par le projet d'organisation par le Mouvement contre l'immigration clandestine (DPNI) d'une "Marche russe". On suppose que cette organisation a des protecteurs influents au Kremlin soutenant les idées nationalistes. "Le Jour de l'unité nationale qui sera célébré en Russie le 4 novembre prochain a toutes les chances de devenir une journée particulière pour le DPNI� Ce jour-là, dans nombre de grandes villes de Russie, une "Marche russe" est prévue à l'initiative du DPNI, justement � L'agressivité des organisateurs de la "Marche russe" s'explique sans doute par le fait qu'ils sont épaulés par un puissant lobby nationaliste au sein même de l'administration du président russe� Le calcul est simple: on joue sur les états d'esprit nationalistes au sein de la société quand la plupart de la population est favorable aux nettoyages ethniques" (Fergana. Ru, 23.10).

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