Le tueur de satellites oriental a frappé (Partie 1)

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(Partie 1)

Par Andreï Kisliakov, commentateur politique de RIA Novosti

Je pense que tous seront d'accord sur le fait que les paroles sont une chose et que les faits en sont une autre. On peut crier autant qu'on veut lors d'une dispute conjugale, mais dès que la première assiette part en miettes, les parties se taisent en général: une étape est franchie et... bonjour les dégâts.

Quelque chose de semblable s'est produit dans la nuit du 11 au 12 janvier, après le tir d'un lanceur chinois, de toute évidence équipé d'un intercepteur cinétique, qui aurait détruit le vieux (mais encore opérationnel) satellite météo Feng Yun 1C. En fait, on peut être sûr que la Chine a mené son premier test d'armes antisatellites. Et si Pékin n'a fait aucune déclaration officielle à ce sujet, cela ne change pas grand-chose au problème.

En fait, nous assistons à la rupture du "principe d'inaction" auquel se tenaient, malgré toutes leurs déclarations tonitruantes et promesses parfois menaçantes d'armer l'espace circumterrestre, les grandes puissances spatiales.

Il n'est pas tellement important de connaître, dans ce cas-là, à quel point ce test a été une réussite. L'analyse des informations provenant des moyens d'observation répondra, d'une manière ou d'une autre, à toutes les questions techniques. C'est justement cela qui constitue une source de migraines pour tous les services de renseignements du monde.

Mais dès aujourd'hui on peut aussi bien débattre de certaines circonstances techniques du nouveau miracle chinois qu'en imaginer les conséquences possibles.

"Cela ne ressemble pas à la manière dont opèrent les Chinois"

Pour les services de renseignements américains, le tir du 11 janvier constitue un essai réussi d'une arme antisatellite. Le missile balistique de portée intermédiaire parti d'un site dans le Sichuan avait pour ogive un intercepteur cinétique. Celui-ci a détruit par impact un satellite météo placé sur une orbite polaire haute de 860 km en 1999.

Chose incontestable, sur cette orbite, on trouve à présent un nuage constitué de milliers d'éclats, en mesure de se maintenir pour un quart de siècle encore et représentant une menace pour les appareils spatiaux. Et ce sont ces éclats qui constituent la première question, dans la série d'incertitudes engendrées par ce test: ces éclats, d'où proviennent-ils au fait?

De l'avis de l'expert américain en matière de systèmes spatiaux James Oberg, la notion même "d'explosion d'un satellite" n'est plus qu'une métaphore. En réalité, le satellite cible arrête tout bonnement de fonctionner. A l'instar de la cible américaine lors des essais de l'arme antisatellite des Etats-Unis en 1985.

A cette même époque l'Union soviétique a tiré sur l'un de ses satellites lors de tests analogues. Et le nuage formé par ses fragments a donné du fil à retordre aux Américains. Finalement, il a été établi que l'intercepteur soviétique, qui a fonctionné comme un shrapnell, avait lui-même explosé.

Et pourtant, un satellite pourrait bien exploser une fois atteint par un corps étranger. Il est vrai qu'on peut établir si un satellite a été détruit par impact ou en raison d'une explosion à son bord en évaluant la quantité d'énergie dégagée et les caractéristiques de la disposition de ses éclats.

Mais, à bord de ce vieux satellite dont la conception remonte aux années 1970, rien ne pouvait exploser. L'appareil était privé de propulseur et, par conséquent, de carburant explosif. Son système d'orientation et de stabilisation faisait appel à des micromoteurs fonctionnant à l'azote comprimé.

Quant au missile, il devait être équipé d'un dispositif d'autodestruction, destiné en premier lieu, en cas de danger pour sa charge utile, à anéantir cette dernière. En d'autres termes, tout dépend des résultats de l'analyse d'une grande quantité d'information provenant des moyens de poursuite terrestres et spatiaux. Pour l'instant, les forces aériennes américaines gardent un silence de plomb sur l'essentiel, à savoir ce qui est advenu en réalité du satellite chinois.

C'est une chose que celui-ci se soit désagrégé en plusieurs morceaux. C'en est une autre qu'il soit resté intact, tout en étant hors service. Dans ce dernier cas, l'appareil connaîtra des changements importants dans son orientation et dans son orbite.

Il y a une autre circonstance liée aux éclats, laquelle relève plutôt de l'éthique que de la technique. De l'avis de Michael Krepon, cofondateur du Henry Stimpson Center (Etats-Unis), qui se penche sur les questions de sécurité nationale, ce test ne correspond nullement à la mentalité chinoise.

"Tout a été fait à coups de hache, se plaint-il. - Ils ont créé un immense nuage d'éclats qui pourrait se maintenir un quart de siècle et même plus. Son orbite passe plus haut que celle sur laquelle se trouvaient les éclats provenant de notre test de 1985. Et n'oubliez pas que le dernier d'entre eux a cessé d'exister au bout de 17 ans seulement".

Rendons hommage à la perception raffinée des Américains et essayons de répondre à la question qui se pose immanquablement dès qu'il s'agit des réalisations spatiales chinoises. N'y a-t-il pas eu d'assistance étrangère?

(A suivre)

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