Astronautique russe: un pas en avant, deux pas en arrière

S'abonner
Par Andreï Kisliakov, RIA-Novosti
Par Andreï Kisliakov, RIA-Novosti

Nikolaï Sevastianov a été limogé de son poste de président de la société de construction spatiale russe RKK Energuia fin juillet, malgré le soutien de ses subordonnés.

L'Agence fédérale spatiale russe (Roskosmos) avait indiqué à maintes reprises que les projets de M.Sevastianov concernant notamment les vols habités n'étaient pas prévus par le Programme fédéral spatial pour 2006-2015 et que les activités de l'ancien président d'Energuia ne répondaient pas aux objectifs de l'astronautique nationale. Il s'agit avant tout de la création d'une nouvelle navette spatiale par Energuia et du programme de vols vers la Lune et Mars.

Le problème est que les détracteurs du dirigeant disgracié ne peuvent pas clarifier la situation autour de la navette Kliper ni dire quels nouveaux projets sont en cours de réalisation dans ce domaine important.

"La Russie risque de prendre un retard important par rapport aux États-Unis, à la Chine et aux pays européens dans le domaine des vols habités d'ici à 2014 si elle suspend ses travaux de conception d'un nouveau vaisseau spatial. En 2014, les États-Unis auront déjà créé un nouveau vaisseau (Orion - note de l'auteur) qui sera un concurrent sérieux pour nos Soyouz sur le marché international. Nous risquons de prendre un sérieux retard technologique", s'inquiétait M.Sevastianov.

La société Energuia a donc créé la fameuse navette Kliper en attirant des fonds extrabudgétaires. Kliper, très récemment encore, convenait très bien à l'agence Roskosmos. La navette a été la vitrine de l'industrie spatiale russe dans différents salons aérospatiaux internationaux, notamment au salon russe MAKS-2005. A présent, on propose de moderniser pour la énième fois le cinquantenaire vaisseau Soyouz, au lieu d'achever la réalisation du programme Kliper, ce qui serait la vraie raison du limogeage de M.Sevastianov, de l'avis-même de l'intéressé.

"Nous réviserons tout prochainement l'extérieur du vaisseau Soyouz et présenterons nos propositions à Roskosmos. Je pense que nous le ferons dès cette année", a déclaré le nouveau président d'Energuia Vitali Lopota. D'ailleurs, ce n'est pas un scoop, puisque ces propos résonnent depuis longtemps déjà. Les propos de M.Lopota concernant la navette Kliper sont aussi éloquents.

"Je peux dire que nous n'exposerons pas Kliper (au Salon MAKS 2007 ). Ces prochains mois, nous analyserons cette idée proposée par l'ancien dirigeant de la société Iouri Semenov."

Il semble qu'on essaie de faire passer le programme de conception d'un nouvel appareil pour un projet dépassé. Et ne cherche-t-on pas à présenter un vaisseau cinquantenaire (Soyouz) comme une vraie percée?

A propos, la société Energuia contrôle le segment russe de la Station spatiale internationale (ISS) et coordonne la réalisation de ce programme international unique et prometteur du point de vue technologique. Mais on ne voit pas bien comment Roskosmos exploitera la station en disposant uniquement des Soyouz et des Progress.

Les Américains devraient renoncer tout prochainement au travail à bord de l'ISS, ou bien y limiter leur participation à des missions isolées qui n'impliquent pas de vols réguliers. Si nos partenaires tiennent leur promesse d'effectuer assez de vols vers l'ISS pour achever sa construction avant 2010, cela sera déjà parfait. Les navettes seront ensuite mises à la retraite pour permettre aux Américains de réaliser leur nouveau rêve - revenir sur la Lune et organiser une mission vers Mars.

Nous pouvons critiquer ces projets et les propos de Nikolaï Sevastianov concernant l'exploitation des sous-sols lunaires, mais cela ne nous donnera pas un nouveau vaisseau spatial et ne garantira pas une exploitation efficace de la station orbitale.

Certes, la Russie peut toujours se vanter du nombre de tirs spatiaux qu'elle effectue tous les ans et élaborer ses programmes de recherches scientifiques en fonction du nombre de touristes spatiaux. Mais une question se pose: l'astronautique russe a-t-elle un avenir?

Les opinions exprimées dans cet article sont laissées à la stricte responsabilité de l'auteur.

Fil d’actu
0
Pour participer aux discussions, identifiez-vous ou créez-vous un compte
loader
Chat
Заголовок открываемого материала