Schengen s'élargit: pour qui tombent les frontières?

S'abonner
Par Elena Chesternina, RIA Novosti
Par Elena Chesternina, RIA Novosti

L'Europe continue de faire tomber les frontières. Cette fois-ci, neuf nouveaux membres sont entrés dans l'espace Schengen: la Hongrie, la Pologne, la République tchèque, la Slovaquie, la Slovénie, Malte, l'Estonie, la Lettonie et la Lituanie.

La "zone sans visas" réunit désormais 24 pays pour une population de quelque 400 millions de personnes. L'ouverture des frontières s'effectuera en deux étapes: les contrôles aux frontières ont été supprimés dès le 21 décembre, mais les contrôles dans les aéroports seront maintenus jusqu'au 30 mars 2008. Les ambassades des pays adhérant à la zone Schengen promettent que malgré les nouvelles règles, ils seront à même de délivrer des visas à tous les Russes souhaitant se rendre en Europe.

Les nouveaux membres de l'espace Schengen ont adhéré à l'Union européenne le 1er mai 2004, au cours de la plus importante vague d'élargissement de l'UE. Chypre, quant à elle, envisage d'ouvrir ses frontières en 2009. En attendant, en 2008, la Suisse (bien que ne faisant pas partie de l'UE) entrera dans cette zone. En 2011, l'espace Schengen accueillera les "nouveaux venus" de l'UE, la Bulgarie et la Roumanie.

Pour les Russes, qui sont déjà las des interminables files d'attente pour obtenir un visa, l'adhésion de neuf membres à l'espace Schengen est une bonne nouvelle. D'autant que quatre d'entre eux sont des voisins directs de la Russie. La plupart des consulats ne changeront pas les règles de délivrance des visas, dont le coût sera de 35 euros (variante classique) ou de 70 euros (si la demande est examinée en urgence), conformément à l'accord sur la simplification du régime des visas entré en vigueur en juin dernier.

Toutefois, le ministère russe des Affaires étrangères et les voyageurs ont plusieurs griefs contre la procédure établie dans ce document. Il s'agit en premier lieu de la quantité superflue de documents exigés par les consulats (par exemple, les conducteurs de poids lourds sont tenus de présenter à l'ambassade allemande 21 types de documents). Les centres de visas (instaurés par les ambassades de France, de Belgique, d'Espagne et des Pays-Bas) suscitent également un grand mécontentement auprès des voyageurs, leur apparition ayant rendu de fait les visas beaucoup plus chers.

Parmi les "nouveaux venus" de l'espace Schengen, ce sont la République tchèque et la Pologne qui réserveront des surprises désagréables pour les Russes. Leurs consulats réclament désormais une confirmation par fax de la réservation d'hôtel et du paiement de ses services ainsi qu'une attestation bancaire prouvant que le voyageur possède sur son compte une somme équivalente à 30 euros pour chaque jour de voyage. De surcroît, avec les nouvelles règles, le demandeur devra attendre son visa plus longtemps, jusqu'à 10 jours. Ceci concerne la quasi-totalité des nouveaux membres de Schengen. Le voyageur se doit également de ne pas oublier qu'il faut obtenir son visa à l'ambassade du pays dans lequel il se rend ou bien où il s'apprête à passer la plupart du temps.

Par ailleurs, on ne sait pas encore quelles seront les conséquences de ces changements pour les habitants de Kaliningrad. Auparavant, pour se rendre de cette exclave russe dans la "grande Russie" via la Lituanie, il suffisait d'acheter son billet à l'avance et de posséder un passeport. Les autorités lituaniennes promettent de ne pas compliquer la vie aux Kaliningradois après l'adhésion à Schengen. Il ne reste qu'à espérer que les promesses seront tenues et que les Russes de Kaliningrad ne seront pas obligés de payer 35 euros pour traverser la frontière.

Les Européens, de leur côté, sont loin d'être unanimes quant à l'élargissement de l'espace Schengen. Les pessimistes redoutent une augmentation du flux d'immigrés clandestins et du trafic de drogue en provenance d'Europe de l'Est. Les optimistes, de leur côté, se félicitent de la chute d'un nouveau "rideau de fer". Ce sont les habitants de la ville de Valga-Valka, à cheval sur la frontière entre Lettonie et Estonie, qui ont été les premiers à être témoins de cette "chute". Depuis la proclamation de l'indépendance par ces deux pays baltes, les habitants de la ville devaient subir quotidiennement la procédure de contrôle frontalier pour se rendre à l'école ou au travail, pour aller faire des courses ou rendre visite à des parents. Qui plus est, l'indépendance revenait très cher pour les employés, qui devaient payer environ 50 euros pour obtenir le permis de travailler dans l'Etat voisin. Les deux parties tentaient de résoudre le problème depuis 1996, une commission spéciale a même été instaurée. Bien que le régime de passage à la frontière s'adoucisse petit à petit (à l'exemple de la Lettonie, qui a annulé les taxes pour les Estoniens et augmenté le délai de séjour sur son territoire jusqu'à 360 jours par an), le poste-frontière n'a pas été supprimé. Après l'adhésion de la Lettonie et de l'Estonie à l'espace Schengen, ce poste pourra finalement être enlevé.

Les Russes n'ont désormais qu'à espérer qu'ils pourront eux aussi découvrir un jour le bonheur de la vie sans frontières.

Les opinions exprimées dans cet article sont laissées à la stricte responsabilité de l'auteur.

Fil d’actu
0
Pour participer aux discussions, identifiez-vous ou créez-vous un compte
loader
Chat
Заголовок открываемого материала