Les Russes apprivoisent leur fête nationale

© RIA Novosti . Ilona GolovinaJournée de la Russie
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Le 12 juin, les Russes célèbrent leur fête nationale, la Journée de la Russie.

 

Le 12 juin, les Russes célèbrent leur fête nationale, la Journée de la Russie.

Instituée en 1994, elle est encore récente. Son nom initial était bien trop long: la Journée d'adoption de la Déclaration sur la souveraineté nationale de la Russie. Mais cette formulation n'était pas seulement compliquée, elle suscitait aussi de l'étonnement, de l'irritation, voire même parfois de la rage.

Le thème de la fin de l'histoire de l'Union soviétique a toujours été très douloureux. Pour un grand nombre de Russes, la souveraineté de la Russie annoncée en 1990 fut le maillon principal de la chaîne des mutations révolutionnaires qui ont accompagné la désintégration de l'URSS. Que célébrons-nous, se demandaient-ils, la fin d'un Etat prestigieux? Le chaos, l'arbitraire, la crise profonde de l'économie et de toute la sphère sociale dans les années 90, entraînés par cette souveraineté? L'Etat dans lequel nous vivions auparavant n'était-il donc pas souverain?

Bref, cette fête a eu du mal à rentrer dans les moeurs. Mais elle s'ancre peu à peu dans la conscience des Russes comme une véritable fête nationale, ce qui n'a rien d'étonnant, car le pays est actuellement en plein essor, dans tous les sens du terme. Le nombre de Russes qui connaissent le nom de cette fête ne cesse de s'accroître: si, en 2003, ils ne constituaient qu'un peu plus d'un tiers (38%) de la population, à présent, selon le dernier sondage d'opinion, ils sont une majorité: 55%.

Ces quatre dernières années, la proportion de personnes qui perçoivent le 12 juin comme une fête a plus que doublé (passant de 12 à 25%). Quant à ceux pour qui ce jour ne s'apparente nullement à une fête, mais davantage à un jour de repos supplémentaire pour aller à la datcha, leur nombre diminue graduellement, bien qu'ils représentent toujours une majorité: 58% (contre 72% en 2004).

En 1998, le président Boris Eltsine essaya de mettre définitivement fin aux élucubrations sur le 12 juin et promulgua un décret, conformément auquel cette fête fut renommée "Journée de la Russie". Dépassant sa signification pour ainsi dire technique - la date de la fondation de la nouvelle Fédération de Russie - ce nom remit les choses à leur place.

Au cours de l'âpre lutte politique qui eut lieu dans les années 90, le sens de cette fête fut sciemment dénaturé. La Déclaration sur la souveraineté fut adoptée par la majorité absolue du Congrès des députés du peuple de la RSFSR (Fédération de Russie): aussi bien les démocrates que les communistes votèrent pour son adoption. La Déclaration précisait que la RSFSR faisait partie de l'Union rénovée des Républiques socialistes soviétiques, que la citoyenneté de l'URSS et la Constitution de l'URSS étaient conservées et que seuls de nouveaux principes de répartition des pouvoirs entre la Russie et l'union étaient établis. Il ne s'agissait que d'une délégation des pouvoirs. Bref, il n'était question dans ce document ni d'indépendance, ni de retrait de l'URSS. Par conséquent, ses adversaires étaient très peu nombreux: il était difficile de voter contre la souveraineté de la Russie. Les électeurs qui exigeaient des changements auraient pu ne pas le comprendre.

Il existait alors une variante de transformation de l'URSS selon laquelle les républiques, tout en restant au sein de l'Union soviétique, se verraient confier une partie des pouvoirs du centre. Cette variante, qui fut définitivement abandonnée avec le putsch d'août 1991, était une tentative des dirigeants conservateurs du pays d'arrêter la marche objective de l'histoire. En fait, l'idée d'une transformation ne contredisait pas la position des dirigeants de l'URSS: des représentants très haut placés du parti communiste - le président du Conseil des ministres de la Fédération de Russie M. Vlassov et le membre du Bureau politique M. Vorotnikov - furent les premiers à parler de souveraineté au congrès. En réalité, il s'agissait plutôt d'un jeu, d'une intrigue politique, mais le mot "souveraineté" fut tout de même prononcé.

A ce moment là, des déclarations sur la souveraineté avaient déjà été adoptées en Géorgie, Lituanie, Estonie et Lettonie. Après la Russie, elles furent adoptées en Ouzbékistan, Moldavie, Ukraine et Biélorussie. Le géant qu'était l'URSS commença à se fissurer. Cependant, l'opinion n'accorda pas beaucoup d'importance à ce nouvel acte législatif émanant du parlement, acte qui n'était de plus qu'une "déclaration". Cette dernière n'apporta pratiquement aucun changement dans la vie des Russes, qui durent encore lutter longtemps et péniblement pour la renaissance et le développement d'une nouvelle Russie, sûre d'elle, forte et prospère. Cette période n'a laissé aucune date particulière, en revanche, ses résultats sont bien là.

Les opinions exprimées dans cet article sont laissées à la stricte responsabilité de l'auteur.

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