Des cosaques dans la Wehrmacht

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La Grande guerre patriotique de 1941-1945 n'en finit pas de s'éloigner dans le passé, mais l'intérêt pour son déroulement ne faiblit pas. Un des thèmes les plus étudiés par les historiens est la question des Soviétiques qui se sont battus aux côtés des nazis. Les alliés anglo-américains ont livré à l'URSS les collaborateurs tombés entre leurs mains en tant que criminels de guerre, notamment les "cosaques de la Wehrmacht" et leurs familles en 1945.

Si la Grande guerre patriotique de 1941-1945 n'en finit pas de s'éloigner dans le passé, l'intérêt pour son déroulement, en revanche, ne faiblit pas. Un des thèmes les plus étudiés par les historiens n'est autre que le rapatriement des prisonniers soviétiques, civils et militaires, et autres déplacés en Allemagne afin d'y travailler sous la contrainte. Mais parallèlement s'est posée la question de ceux qui s'étaient battus aux côtés des nazis. Les alliés anglo-américains avaient pris la décision de livrer à l'URSS les collaborateurs tombés entre leurs mains en tant que criminels de guerre. Les plus importantes déportations de ce type eurent lieu en Autriche de mai à août 1945.

L'opération, baptisée Keelhaul, consistait à renvoyer dans la zone d'occupation soviétique tous les citoyens de l'URSS déplacés à des fins de travail forcé, anciens prisonniers de guerre et membres de groupes collaborationnistes, qui se trouvaient encore sur le territoire administré par les alliés. La surveillance, lors du transfert, des personnes coupables de collaboration avec les nazis fut confiée à l'armée britannique.

En tout, environ deux millions de personnes devaient être rapatriées en URSS. On considère cependant la remise à l'armée soviétique des "cosaques de la Wehrmacht" et des membres de leurs familles, qui s'est déroulée le 1er juin 1945 à Lienz, comme l'événement central de l'opération. On ne cesse de rompre des lances sur ce thème depuis des décennies. De nombreux chercheurs désignent ce fait comme une tragédie, et parfois même comme une trahison de la part des Anglais (alors qu'il aurait été pour le moins étrange de voir les Britanniques ayant combattu Hitler de 1939 à 1945 faire preuve de compassion envers ses complices).

Afin de pouvoir porter un jugement indépendant sur ce qui s'est passé, il faut d'abord savoir qui fut remis aux autorités soviétiques par les Anglais à Lienz, et quel fut leur destin par la suite.

Le Kazatchy stan (le détachement de cosaques de l'armée allemande dont il est question), une des formations nationales les plus importantes au sein de la Wehrmacht, fut créé en automne 1943 sur la base de groupements cosaques isolés, utilisés par l'armée du Reich en tant que détachements punitifs dans le sud de l'URSS, en Pologne, Yougoslavie et à d'autres endroits.

Au sein de ces formations, dont la plus importante était le XVe corps de cavalerie cosaque, qui fut rattaché au corps des SS à l'automne 1944, on trouvait aussi bien des émigrés de l'armée blanche ayant participé à la guerre civile (1918-1921) avant de quitter la Russie, que des citoyens soviétiques: prisonniers de guerre ou habitants des territoires occupés qui s'étaient enrôlés. Cette variété se retrouvait aussi parmi leurs dirigeants, qui allaient d'anciens officiers de la Garde blanche comme les généraux Krasnov et Chkouro, à certains officiers allemands spécialement détachés pour travailler avec des "formations de l'Est", dont le plus connu est le commandant du XVe corps de cavalerie cosaque, et dernier ataman du Kazatchy stan, Helmuth Wilhelm von Pannwitz.

Les simples cosaques et officiers d'origine russe avaient tous prêté le même serment en entrant dans ces formations nationales de la Wehrmacht, serment dont le texte avait été rédigé par Piotr Krasnov lui-même:

"Je jure devant Dieu tout-puissant, et devant les Saints Evangiles, de servir fidèlement le chef de la Nouvelle Europe et du Peuple allemand Adolf Hitler, et de combattre le bolchévisme, sans ménager ma vie jusqu'à la dernière goutte de sang. [...] Je ferai tout aux côtés des armées allemandes pour défendre fidèlement la Nouvelle Europe et mon unité de l'esclavage bolchévique et pour arriver à la victoire totale de l'Allemagne sur le bolchévisme et ses alliés."

Malgré les multiples assurances des commandants des "formations étrangères" quant à la volonté de leurs hommes de rejoindre la "lutte contre les bolchéviques", les Allemands estimaient la qualité de ces troupes comme "faible", et les utilisaient à l'arrière, sans les laisser participer à de véritables confrontations. Les cosaques se distinguèrent entre autres lors de l'écrasement de l'Insurrection de Varsovie en août 1944, gagnant ainsi la bienveillance de leurs nouveaux maîtres. Parmi les autres opérations de ce genre, on peut citer la répression du soulèvement de Zagreb, où les cosaques, aux côtés de la 11e Panzer Grenadier Division de volontaires SS Nordland, exterminèrent des milliers de civils.

Les formations cosaques et les troupes de l'Armée de libération de la Russie, du général Vlassov, ex-général soviétique passé à l'ennemi, se frottèrent aux unités régulières de l'Armée rouge à partir de l'automne 1944, et tout l'hiver suivant, alors que les Allemands ne pouvaient plus vraiment se permettre d'être trop regardants sur la qualité des troupes de réserve, et envoyaient sur le front tous ceux qu'ils avaient sous la main.

A la fin de la guerre, la plus grande partie des cosaques se retrouva dans le nord de l'Italie et en Autriche, avec femmes et enfants, d'où ils furent livrés à la partie soviétique, conformément aux ententes intervenues entre les alliés à Yalta.

Leur destin ne s'avéra pas aussi sévère que beaucoup le pensent. Les leaders du mouvement, Krasnov, Chkouro, von Pannwitz et les autres, et surtout le plus célèbre d'entre eux, Andreï Vlassov, furent condamnés à mort pour crimes de guerre.

Certains autres officiers et soldats qui s'étaient particulièrement distingués furent également exécutés. Quant aux autres, ils furent envoyés pour six ans avec leurs familles dans des colonies spéciales en Sibérie.

Le présidium du Soviet suprême de l'URSS mit fin à leur opprobre par un décret en date du 17 septembre 1955 "Sur l'amnistie des citoyens soviétiques ayant collaboré avec les autorités d'occupation lors de la Grande guerre patriotique".

Les opinions exprimées dans cet article sont laissées à la stricte responsabilité de l'auteur.

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