Revue de la presse russe du 13 août

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MOSCOU, RIA Novosti

Vremia novosteï

La reconnaissance de l'indépendance de l'Ossétie du Sud et de l'Abkhazie serait une erreur

Pour de nombreux experts, après la fin du conflit armé avec la Géorgie, la Russie n'accélérera pas la reconnaissance formelle de l'indépendance de l'Ossétie du Sud et de l'Abkhazie, lit-on mercredi dans le quotidien Vremia novosteï.

Alexeï Arbatov, directeur du Centre pour la sécurité internationale de l'Institut d'économie mondiale et de relations internationales: "J'estime que la Russie ne se pressera pas de déterminer le statut aussi bien de l'Ossétie du Sud que de l'Abkhazie. Un changement de pouvoir pourrait avoir lieu en Géorgie, et même une démilitarisation, elle pourrait par exemple devenir un Etat dont la neutralité serait garantie. Dans ce cas, il ne sera pas nécessaire de mettre en question son intégrité territoriale, mais les deux enclaves auront certainement un statut particulier et bénéficieront, de facto, de l'auto-administration".

Sergueï Markedonov, chef du service des problèmes interethniques de l'Institut d'analyse politique et militaire: "Ce qui se produit actuellement dans le Caucase met en évidence une tendance très importante: pour employer des termes informatiques, on pourrait dire qu'on assiste à un "redémarrage" des conflits. Un premier repartage avait déjà eu lieu lors du démembrement de l'URSS, à présent commence un second repartage engendré par les collisions du développement des Etats indépendants. Dans cette situation, on peut essayer d'établir ses propres règles du jeu. Cependant, j'estime qu'après ce qui est arrivé une reconnaissance formelle de l'Ossétie du Sud et de l'Abkhazie n'est pas un objectif prioritaire. Il suffit que ces territoires se retirent de la Géorgie, ensuite, le temps jouera pour eux.

Israël a également subi une forte pression pour ce qu'il a fait au Proche-Orient, mais, en fin de compte, ses intérêts ont été reconnus. A présent, il est important de montrer que nous nous sommes arrêtés et que nous n'avons pas attaqué Tbilissi, cela cassera certains clichés occidentaux."

Konstantin Kossatchev, président du Comité des affaires internationales de la Douma (chambre basse du parlement russe): "Il est prématuré d'engager la discussion sur le statut de ces républiques, l'avenir nous en apprendra plus en ce sens".

Alexeï Malachenko, membre du Conseil scientifique du Centre Carnegie de Moscou: "Même après cette guerre, l'attisement des passions autour du statut de l'Ossétie du Sud et de l'Abkhazie et, à plus forte raison, la reconnaissance de leur indépendance, seraient une erreur. Pour la Russie, ce serait un traquenard au Sud, nous resterions absolument seuls. Il ne faut surtout pas le faire, en tout cas, d'une manière aussi précipitée".

Gazeta.ru

CEI: le retrait de la Géorgie ne menace pas l'organisation

La fin de la guerre en Ossétie du Sud annoncée hier par le président russe a coïncidé avec une déclaration de Mikhaïl Saakachvili annonçant que la Géorgie se retirait de la CEI (Communauté des Etats indépendants) et invitait les autres ex-républiques de l'URSS à faire de même, lit-on mercredi dans le quotidien Gazeta.ru

De l'avis des experts, l'annonce du retrait de la Géorgie de la CEI est aujourd'hui une déclaration ayant une importance psychologique et politique pour le président géorgien, mais pas pour la communauté elle-même.

Commentant ce fait, l'ancien ministre des Affaires de la CEI Anatoli Adamichine s'est contenté de la phrase suivante: "Cela ne signifie rien". "C'est une démarche purement politique, a quant à lui déclaré Vladimir Jarikhine, vice-directeur de l'Institut des pays de la CEI. Il y aura beaucoup de problèmes pour la Géorgie, mais il n'y aura aucun problème pour les autres pays de la CEI".

"Pour la Russie, cela n'aura aucune importance, a fait remarquer Alexeï Vlassov, vice-directeur du Centre d'étude de l'espace postsoviétique de l'Université d'Etat de Moscou. La CEI s'est transformée depuis longtemps en terrain officiel pour les négociations visant à élaborer des projets au niveau des rapports bilatéraux ou pour les structures intégrées comme la CEEA (Communauté économique euro-asiatique). Selon lui, la structure reste sans cela inefficace, et le retrait de la Géorgie n'apportera ni inconvénients, ni avantages.

Les experts doutent de la possibilité d'un "effet domino" et d'un effondrement de la communauté. Même si tous relèvent que les leaders d'absolument tous les pays de la CEI réfléchissent jusqu'à présent à ce qui s'est passé en Géorgie. "Qui se retirera et d'où? s'interroge Alexeï Vlassov. En plus de Mikhaïl Saakachvili, il y a encore l'Azerbaïdjan, la Moldavie et l'Ukraine. A la différence de l'élite géorgienne, l'élite ukrainienne est divisée, une décision sur le retrait de la CEI serait examinée à la Rada suprême (parlement ukrainien) et il se peut qu'elle ne recueille pas le nombre requis de voix. Chisinau est prêt à un compromis avec la Russie au sujet de la Transnistrie. Quant à l'Azerbaïdjan, inquiet pour ses contrats sur le transport du pétrole par le pipeline Bakou-Tbilissi-Ceyhan, il craint tellement pour ses positions qu'il n'entreprendra pas non plus d'actions radicales".

Gazeta.ru

La guerre contre la Géorgie a montré l'isolement de la Russie dans le monde

La réaction de la communauté mondiale à la guerre en Géorgie a logiquement posé une limite à la politique étrangère de confrontation appliquée par la Russie ces dernières années, lit-on mercredi dans le quotidien Gazeta.ru.

La guerre de cinq jours contre la Géorgie oblige à constater que la Russie n'a pas les ressources géopolitiques pour assumer le rôle de "gendarme international légitime". Ses actions n'ont été soutenues directement et sans équivoque presque par aucun pays du monde, espace postsoviétique compris. C'est là un témoignage éloquent des conséquences structurelles négatives de la politique étrangère russe de ces dernières années.

Compte tenu des conséquences des actions de l'armée géorgienne en Ossétie du Sud, il y avait certainement des raisons de croire la Russie, qui a essayé de combiner sa mission militaire avec les valeurs humanitaires et la défense d'un petit peuple contre un danger de génocide, mais les actions de Moscou n'ont été publiquement soutenues par aucune ancienne république soviétique, même pas par la Biélorussie.

Ces dernières années, la Russie a présenté, et elle continue à le faire, le monde occidental comme le principal ennemi de la civilisation, ou peu s'en faut. Certes, le mécontentement général face à la démarche russe peut servir de preuve de la justesse de cette opinion sur l'amoralité occidentale. En effet, l'intervention en Géorgie ressemble beaucoup aux interventions humanitaires des pays occidentaux, d'ailleurs, elle est interprétée en Russie précisément dans leur contexte, c'est pourquoi la condamnation mondiale des actions russes est d'autant plus cynique du point de vue de Moscou.

Pour l'instant, la Russie n'a pu ni s'acheter des alliés, ni devenir pour qui que ce soit un exemple à suivre. Personne n'a cru au fait que la Russie ne cherchait pas à renverser Mikhaïl Saakachvili, car le Kremlin avait essayé d'une façon très zélée de s'inviter aux élections en Ukraine et en Abkhazie, où on avait réussi qu'au dernier moment à éviter une guerre interabkhaze à la suite du refus obstiné de l'équipe poutinienne de reconnaître la victoire de Sergueï Bagapch sur Raoul Khadjimba qu'elle soutenait.

Dans ce contexte, la "mission militaire humanitaire" n'a été interprétée que comme le développement violent de la rhétorique de grande puissance d'un pays tentant de restaurer les pires traits de l'empire soviétique. Lorsque les troupes russes déployées en Géorgie ont essayé de défendre le droit du peuple à l'existence, droit parfaitement compréhensible en Occident, le monde n'a pas cru, par habitude, à la sincérité des efforts russes.

La décision courageuse et responsable prise par Dmitri Medvedev sur l'arrêt de la guerre, probablement la première décision qu'il ait prise de manière indépendante, sans tenir compte de l'avis du premier ministre, donne à la Russie une chance historique de formuler nettement ses valeurs, au lieu de faire reposer sa politique, comme jusqu'à présent, sur la négation des valeurs "étrangères", "ennemies". La Russie ne se fera des alliés que lorsque la diplomatie russe parviendra à persuader le monde de la justesse de ses intérêts, au lieu de se conduire de façon grossière et de menacer de couper le robinet gazier.

Nezavissimaïa gazeta

Ossétie du Sud: la Russie s'est appuyée sur l'expérience occidentale

Moscou semble avoir bien retenu toutes les leçons qui lui ont été données par les grandes puissances ces dernières années, lit-on mercredi dans le quotidien Nezavissimaïa gazeta.

En lançant une attaque contre Tskhinvali, la Géorgie n'a pas compris à quel point elle se trompait en misant sur l'absence de réponse militaire de la part de la Russie. Celle-ci s'est déroulée précisément selon les canons élaborés par les pays occidentaux en Yougoslavie, au Timor oriental et en beaucoup d'autres endroits du monde.

Deuxièmement, pour la première fois Moscou ne s'est pas contenté de parler "d'intervention humanitaire", mais l'a réalisée dans la pratique. La Russie a enfin compris que cette doctrine occidentale, qui suscite tant de critiques et de railleries dans le pays, peut être utilisée à son avantage. Avec les déclarations de Medvedev sur les actions visant à contraindre la Géorgie à la paix, on est loin des promesses faites à l'ennemi de le "buter jusque dans les chiottes", qui avaient résonné à un moment donné dans la bouche des dirigeants russes. Nous avons assisté à une intervention humanitaire bien organisée par la partie russe, et renforcée par des références au mandat donné en son temps par l'ONU aux forces de paix.

Troisièmement, la Russie a agi dans le cadre de la doctrine de l'action préventive, si appréciée des Américains. Même les attaques contre les sites militaires géorgiens loin de la zone du conflit, qui ont tant irrité le monde occidental, sont tout à fait justifiées, car elles ont concerné des objectifs qui pouvaient être utilisés pour attaquer les forces russes. Cette logique reproduit le schéma des opérations militaires d'Israël contre le réacteur nucléaire irakien en 1981, et contre la Syrie en 2007. Les Etats-Unis ont éprouvé cette stratégie en Irak en 2003 et voudraient bien la mettre en pratique à l'heure actuelle à l'égard des sites nucléaires iraniens.

C'est la première fois que la Russie agit "à l'occidentale": elle est restée dans les limites du mandat accordé par l'ONU à ses soldats de la paix (contrairement à 1999, quand le pays avait transféré ses soldats de la paix de Bosnie au Kosovo) et a accompli précisément sa mission. Moscou a affirmé clairement le caractère humanitaire de ses actions et son droit de neutraliser les positions de tir de l'adversaire, s'il résistait à l'opération visant à le contraindre à la paix. Il ne reste aux Etats-Unis qu'à reconsidérer leur théorie préférée établissant que les pays démocratiques ne se comportent jamais en agresseurs.

La Russie a retenu de nombreuses leçons, qu'elle avait d'abord fait semblant de ne pas remarquer. Ce fait donne de l'espoir. En outre, il n'y a aucune raison de croire que le président Medvedev subira l'influence des "siloviki" (représentants des structures de force), comme l'estiment plusieurs experts. Le recours à la force là où elle est nécessaire (notamment pour la protection des civils) ne témoigne que du bon sens du nouveau président.

Par Vladislav Inozemtsev, directeur du Centre d'étude de la société postindustrielle.

Vedomosti, Gazeta.ru

Conflit en Ossétie du Sud: les autorités russes satisfaites de leur armée

Les dirigeants russes estiment que les militaires ont accompli avec succès leur mission dans la zone du conflit en Ossétie du Sud: ce succès a été assuré par l'introduction rapide des troupes, le contrôle de l'espace aérien et la désorganisation des arrières de l'adversaire, lit-on mercredi dans les quotidiens Vedomosti et Gazeta.ru.

Néanmoins, les experts indépendants ne sont pas d'accord avec cette évaluation.

Mardi, aucun nouveau chiffre des pertes russes n'a été officiellement cité, mais Anatoli Nogovitsyne, chef adjoint de l'Etat major général des Forces armées russes, a annoncé dimanche le bilan suivant: 33 morts et 14 portés disparus. Quatre avions ont été abattus. La Géorgie n'a pas avancé de chiffres, mais, selon Chota Outiachvili, porte-parole du ministère géorgien de l'Intérieur, il serait question de centaines de morts.

L'armée russe a perdu quelques dizaines de blindés, en comptant le matériel des forces de maintien de la paix détruit au cours des premières heures de l'attaque géorgienne contre Tskhinvali, a fait savoir une source au ministère de la Défense, mais cela ne s'est pas répercuté sur le déroulement des missions de combat. Ces missions ont été accomplies, car la Russie a réussi à introduire opportunément, en deux jours, des forces importantes en Ossétie du Sud, sans quoi les troupes géorgiennes auraient fermé le tunnel de Roka, unique voie d'accès à la région, et l'intervention aurait perdu tout son sens, constate un interlocuteur du quotidien Vedomosti.

L'armée géorgienne représente un adversaire sérieux, elle a été entraînée par des conseillers américains comme une armée de métier moderne, ses soldats étaient très motivés, elle était même mieux équipée que l'armée russe, en particulier en ce qui concerne les appareils de vision nocturne et les équipements individuels, affirme Igor Korotchenko, membre du Conseil public auprès du ministère de la Défense. Le fait que la Russie ait réussi à casser le cours des événements montre que les troupes de la Région du Caucase du Nord ont également été entraînées comme il se doit ces dernières années. Parmi les facteurs techniques qui ont aidé l'armée russe, le contrôle de l'espace aérien a permis de déstabiliser les arrières de l'armée géorgienne, indique l'expert.

Effectivement, le commandement de l'armée géorgienne s'est retrouvé quelque peu perdu, ce que la panique observée lundi à Gori a confirmé: les militaires ont quitté la ville en abandonnant leur matériel, alors que les Russes n'avaient pas l'intention de prendre la ville d'assaut, rappelle une source au ministère russe de la Défense.

Les avis des experts indépendants sur les actions de l'armée russe sont opposés. "Le caractère des opérations militaires suscite un grand étonnement, car il témoigne d'une parité approximative des parties", a indiqué au quotidien Gazeta.ru Alexandre Krylov, chercheur à l'Institut d'économie mondiale et de relations internationales de l'Académie russe des sciences. D'après lui, "cela témoigne de l'état déplorable de notre armée. L'essentiel reste que depuis trois jours notre armée n'arrive pas à neutraliser les positions d'artillerie d'où proviennent les tirs sur la route".

"Du point de vue militaire, notre armée ne fait pas preuve d'une supériorité écrasante. Il s'agit plutôt d'un équilibre des forces, par conséquent, la guerre pourrait durer longtemps", résume l'expert.

Ces articles sont tirés de la presse et n'ont rien à voir avec la rédaction de RIA Novosti.

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