Revue de la presse russe du 29 août

S'abonner
MOSCOU, RIA Novosti

Kommersant

Medvedev échoue à obtenir le soutien des alliés de Moscou

La Russie n'a pas réussi à obtenir le soutien des participants au sommet de l'Organisation de coopération de Shanghai (OCS), qui s'est tenu jeudi à Douchanbe, en ce qui concerne ses opérations dans le Caucase, lit-on vendredi dans le quotidien Kommersant.

En paroles, les leaders des pays membres de l'OCS ont exprimé au président russe Dmitri Medvedev leur approbation totale quant aux actions de Moscou, mais, dans la déclaration finale du sommet, ils se sont prononcés en faveur du principe de l'intégrité territoriale des Etats et contre l'emploi de la force dans les affaires internationales. Cela signifie que la Russie est de fait restée seule dans sa confrontation croissante avec l'Occident.

Selon des sources au sein de la délégation russe, Dmitri Medvedev a soulevé avec insistance la question géorgienne lors de toutes les rencontres bilatérales ainsi que lors de la réunion des chefs d'Etat qui s'est tenue hier à huis clos. Cependant, tous les interlocuteurs du président russe ont réagi de façon identique: en paroles, ils ont laissé entendre qu'ils approuvaient le comportement de la Russie, mais ont catégoriquement refusé de faire des déclarations officielles à ce sujet.

"Tous les membres de l'OCS ont leurs régions à problèmes. Si l'un de ces pays reconnaît l'indépendance des républiques caucasiennes, cela entraînera tout de suite des revendications territoriales à son adresse, a regretté l'un des interlocuteurs du Kommersant. Ainsi, la Chine se heurtera au problème de l'indépendance du Tibet et du Xinjiang". Une autre source haut placée au sein de la délégation russe a fait savoir que, lors des autres pourparlers, les partenaires ont déclaré à Dmitri Medvedev qu'ils comprenaient parfaitement la Russie sur la question de la reconnaissance de l'indépendance de l'Abkhazie et de l'Ossétie du Sud, avant de se confondre en excuses car ils jugeaient impossible d'exprimer leur position publiquement.

"Malgré l'amitié, je ne me représente pas que quelqu'un puisse condamner qui que ce soit à Douchanbe, a déclaré Alexeï Malachenko, membre du conseil scientifique du Centre Carnegie de Moscou. Certaines nuances ont même été imposées: à la demande de la Chine, le mot "génocide" a disparu de la résolution. Nous avons reçu un résultat nul, absolument prévisible".

Serikbolsyn Abdildine, leader du Parti communiste du Kazakhstan, se dit certain que, pour les voisins et partenaires de la Russie, le temps des déclarations fermes n'est pas encore venu: "Le président Nazarbaïev regarde aussi bien vers l'Amérique que vers la Russie, mais il choisira par la suite le plus fort des deux".

Une courte phrase de la déclaration, précisant que les pays de l'OCS "saluent l'approbation par Moscou, le 12 août, des six principes du règlement du conflit en Ossétie du Sud et soutiennent le rôle actif assumé par la Russie en vue de contribuer à la paix et à la coopération dans cette région", est la seule consolation pour la Russie. D'ailleurs, ce passage ne contient pas non plus d'approbation nette des actions russes.

L'échec de la tentative de s'assurer le soutien de l'OCS dans le conflit autour de la Géorgie laisse par conséquent Moscou seul face à l'Occident.

Gazeta.ru

La Russie joue très gros

La reconnaissance par la Russie de l'indépendance de l'Abkhazie et de l'Ossétie du Sud dépasse de loin le cadre de la crise régionale qui éclaté début août, lit-on vendredi dans le quotidien Gazeta.ru.

Il ne s'agit déjà plus de la Géorgie et de son leader. Les enjeux ont considérablement augmenté. Il semble que Moscou ait décidé de jouer son va-tout et d'assumer le rôle de fossoyeur du système des relations internationales, étrange et dénaturé à bien des égards, qui s'est instauré dans le monde à la fin de la deuxième décennie après l'achèvement de la guerre froide.

Les dirigeants russes, de même que la majorité écrasante de la société, sont sincèrement surpris par l'ampleur et l'unanimité du soutien apporté en Occident à Mikhaïl Saakachvili. Moscou ne comprend pas comment l'Europe et les Etats-Unis ont pu se ranger unanimement au côté de cet homme coupable de crimes de guerre qui a bafoué tous les principes que le "monde civilisé" ne cesse de répéter. Le fossé entre les perceptions n'a probablement jamais été aussi grave. Dans la position de l'Occident, la Russie ne voit même plus seulement des doubles standards, mais un cynisme non dissimulé dépassant le cadre de la pratique politique normale.

Cette atmosphère émotionnelle, associée au sentiment qu'il est inutile de discuter avec les capitales occidentales, ont certainement rendu la position de Moscou plus radicale.

Le facteur intérieur a probablement joué également son rôle. Dans l'atmosphère qui s'est créée autour de cette guerre dans la société, il était difficile de faire des compromis diplomatiques et de les expliquer à la population, même dans les conditions d'un contrôle des médias télévisuels.

Bref, la sensation qu'on pourrait de nouveau enlever à la Russie une victoire considérée comme telle à juste titre sur le plan moral, militaire et politique, l'a obligée à virer brusquement de bord.

On a l'impression que la décision de reconnaître les républiques caucasiennes a été prise en vue d'exclure tout recul de Moscou et de rendre ainsi la situation concernant l'Abkhazie et l'Ossétie du Sud irréversible. Cela n'est pas un signe de confiance en soi, mais reflète plutôt une disposition à prendre un grand risque. A présent, il ne serait possible d'annuler le verdict prononcé que dans le cadre d'une capitulation totale et inconditionnelle.

La Russie a brusquement changé de cours, en renonçant à toute tentative de recevoir une légitimation extérieure de ses actions et, en fait, en renonçant à agir dans le cadre du droit. Elle ne mise que sur ses propres forces (il n'y a personne sur qui elle puisse compter) et sur le fait que les pays voisins réfléchiront sérieusement à la question de savoir qui est le véritable "boss" dans cette région. Si, dans l'espace postsoviétique, le pendule oscille en direction de la Russie, la question de l'établissement de nouvelles règles du jeu au niveau international, qui seront élaborées avec la participation à part entière de Moscou, passera sur le terrain des réalités pratiques.

Auteur: Fedor Loukianov, rédacteur en chef de la revue "Rossiïa v globalnoï politike" (La Russie dans la politique globale).

Vedomosti

La Russie pourrait installer trois bases militaires en Abkhazie et en Ossétie du Sud

Les experts militaires étudient, avec les spécialistes d'autres départements, les possibilités de déployer des bases militaires russes, entre autres, dans les villes abkhazes de Goudaouta et d'Otchamtchira, ainsi qu'à Djava, en Ossétie du Sud, lit-on vendredi dans le quotidien Vedomosti.

D'après certaines estimations, jusqu'à 15.000 militaires russes pourraient y être stationnés.

Une unité de parachutistes, l'aviation et des moyens de DCA pourraient être déployés à l'aérodrome militaire de Goudaouta, estime Konstantin Zatouline, premier vice-président du comité de la Douma (chambre basse du parlement russe) pour les Affaires de la CEI (Communauté des Etats indépendants). Le port d'Otchamtchira pourrait devenir une base navale où seraient transférés une partie des navires de la Flotte russe de la mer Noire. Une brigade d'infanterie motorisée pourrait être stationnée à Djava, située assez loin de la frontière géorgienne.

Le déploiement de bases militaires ne pourra commencer qu'après la conclusion par la Russie des accords appropriés avec l'Abkhazie et l'Ossétie du Sud, estime Arsen Fadzaïev, vice-président du comité de la Douma pour les Affaires de la CEI. Il affirme que la création de ces bases sera consacrée dans un traité de sécurité collective spécial entre la Russie, l'Abkhazie et l'Ossétie du Sud, qui pourrait être conclu prochainement.

Igor Barinov, premier vice-président du comité de la Douma pour la Défense, estime qu'il ne faut pas précipiter la conclusion du traité, car les troupes russes peuvent se trouver dans la zone du conflit tant que la Géorgie refusera d'accomplir l'exigence formulée par Moscou de faire rentrer les troupes géorgiennes dans leurs lieux de cantonnement permanents.

Les accords entre la Russie et l'Abkhazie seront élaborés en l'espace d'un mois, a déclaré Sergueï Chamba, ministre des Affaires étrangères de la république. L'Abkhazie pourrait installer deux bases militaires russes sur les sites des anciennes bases des troupes soviétiques, a-t-il indiqué.

Konstantin Zatouline estime que les forces de maintien de la paix dans leur ancien format ne peuvent plus se trouver en Ossétie du Sud, et que les troupes russes y occuperont désormais des postes le long de la frontière géorgienne. Selon ses estimations, 4.000 à 5.000 militaires doivent être stationnés en Abkhazie, et 3.000 à 4.000 en Ossétie du Sud.

D'après les estimations de Konstantin Makienko, du Centre d'analyse des stratégies et des technologies, il faut stationner 5.000 militaires en Ossétie du Sud et 10.000 en Abkhazie. Pour cela, il faudra moderniser sensiblement les bases et même construire de nouveaux ouvrages, estime l'expert.

Selon M. Zatouline, cette année, le gouvernement pourrait allouer des sommes à ces fins en puisant dans ses fonds de réserve et, avant fin 2009, apporter des amendements au budget que la Douma commencera à étudier la semaine prochaine.

Kommersant

UE: deux variantes de sanctions contre la Russie à l'étude

Un sommet extraordinaire de l'Union européenne sur la Géorgie réunira lundi à Bruxelles les chefs d'Etat et de gouvernement des Vingt-sept pour débattre de l'attitude à adopter à l'égard de la Russie et des sanctions par lesquelles l'UE pourrait contraindre Moscou à retirer ses troupes de la zone de sécurité en territoire géorgien, lit-on vendredi dans le quotidien Kommersant.

Deux projets de résolution sont aujourd'hui à l'étude: un projet polonais qui prévoit de prendre des mesures assez dures et un projet italien qui ne contient qu'une critique floue.

Une source proche du Kremlin a déclaré que Moscou s'attendait effectivement à des sanctions européennes. Selon elle, deux mesures ne suscitent presque aucune divergence parmi les pays européens: la suspension des négociations sur l'Accord de partenariat et de coopération (APC) et la décision attendue de l'UE d'intensifier les efforts en vue de diversifier les livraisons de ressources énergétiques en Europe.

La première mesure n'inquiète pas trop Moscou: les négociations sur l'APC ont commencé avec beaucoup de retard à cause du veto de la Pologne et de la Lituanie et, d'ailleurs, elles n'ont pas une importance fondamentale pour la Russie. Elles ne jouent qu'un rôle symbolique et signifient que les rapports entre la Russie et l'UE se développent normalement, ce qui ne peut en aucun cas être constaté dans la situation actuelle. Mais la deuxième mesure est assez dangereuse. Cela signifie, en fait, que des obstacles pourraient être dressés devant la mise en oeuvre des projets russes de construction des gazoducs Nord Stream et South Stream. Bien plus, les Européens se prononceront certainement en faveur de la mise en oeuvre accélérée du projet de Nabucco, gazoduc par lequel les hydrocarbures de la Caspienne pourront être transportés en Europe en contournant la Russie.

En outre, selon une source du journal, la principale discussion porte sur les mesures plus sévères à prendre contre la Russie. Deux projets de résolution ont déjà été élaborés: l'un, plus souple, proposé par l'Italie et l'autre, extrêmement dur, sur lequel insiste la Pologne.

Durant les derniers jours qui restent avant le sommet, Moscou compte s'entretenir avec certains de ses partenaires européens en vue de les persuader d'adopter des formules plus floues et de s'abstenir de prendre des sanctions. Le mode traditionnel de coopération de la Russie avec l'UE consiste à scinder les rangs des Européens afin que, lors du sommet, les leaders de l'Union européenne s'enlisent dans leurs contradictions mutuelles et qu'ils ne puissent élaborer une position commune. "Toute résolution inoffensive sera le 1er septembre une victoire pour nous. Selon une opinion répandue, si nous parvenons à faire céder l'Occident, ensuite, le jeu sera mené d'après nos propres règles", a déclaré une source haut placée du Kommersant.

Les négociations les plus approfondies en ce sens pourraient être menées avec les principaux alliés potentiels: l'Allemagne, l'Italie, l'Espagne, la France et la Finlande. En échange du soutien apporté, Moscou pourrait leur proposer un changement de la position russe sur l'Iran et des préférences économiques.

Vedomosti

Russie-Occident: une nouvelle course aux armements engloutirait la moitié du budget russe

Si la Russie entrait dans une nouvelle époque d'isolation et de guerre froide, à peu près la moitié du budget du pays serait englouti par la course aux armements, lit-on vendredi dans le quotidien Vedomosti.

Les dépenses militaires se chiffrent actuellement à 8% du budget russe, soit 2,5% du PIB. Un retour au temps de l'URSS pourrait faire remonter ce chiffre jusqu'à 12-13% du PIB, soit la moitié du budget de l'Etat. De plus, il faudrait ajouter à cette somme des dépenses en soutien des alliés: des crédits, aussi bien que du pétrole et du gaz moins chers. Rappelons qu'en 1990, les dettes des pays socialistes et des PVD envers l'Union soviétique avaient atteint 123,3 milliards de dollars, la plupart de ces crédits ayant été plus tard rééchelonnés ou annulés.

La situation impliquerait en outre la réduction des autres branches du budget. Le gouvernement devrait dépenser l'argent du Fonds de réserve et du Fonds du bien-être national, 165 milliards de dollars mis de côté pour soutenir le budget et les générations futures, afin de ne pas avoir à réduire immédiatement les salaires et retraites. Cela se traduirait par une hausse rapide de l'inflation, ce qui pourrait cependant facilement être attribué à la guerre. Cependant, au bout de 3-4 ans, une réduction des dépenses civiles serait inévitable, et comme les retraités représentent la partie la plus coûteuse du budget actuel, ils seraient les premiers à en pâtir.

Sur le plan financier, la situation serait la suivante: la confrontation avec l'Occident se solde par une fuite des capitaux hors de Russie, ce qui diminue immédiatement les investissements dans le capital fixe, dont l'accroissement a été pour la plupart assuré par l'étranger. La demande d'investissements cesse de pousser la croissance économique. Si l'afflux de capitaux se réduit de 3-4 fois, la croissance du PIB pourra perdre 8-9%, c'est-à-dire qu'elle sera tout simplement stoppée.

En même temps, l'Etat tente de compenser la fuite des capitaux par l'augmentation des dépenses budgétaires. L'inflation devient encore plus importante. Les emprunts intérieurs remplacent les emprunts extérieurs. Comme les ressources du marché financier intérieur sont limitées, les taux d'intérêt augmentent, et l'afflux de capitaux dans le secteur réel diminue. On peut supposer que dans cette situation l'Etat pourrait commencer à emprunter activement sur le marché pour soutenir ses dépenses militaires. Cela exercerait une pression supplémentaire sur la croissance des taux d'intérêt et sur l'inflation, qui provoquerait l'effondrement du marché des valeurs.

Encore au printemps, le pays se préparait à d'autres perspectives. Entrant en fonction en mai 2008, le président Medvedev avait déclaré que 10 années de paix suffiraient à la Russie pour moderniser son économie. Comme s'il pressentait quelque chose.

Ces articles sont tirés de la presse et n'ont rien à voir avec la rédaction de RIA Novosti.

Fil d’actu
0
Pour participer aux discussions, identifiez-vous ou créez-vous un compte
loader
Chat
Заголовок открываемого материала