La Russie vue par la presse de la CEI et des pays baltes

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ESTONIE

Les médias soulignent que la rhétorique antirusse de Tallinn et la façon dont Moscou y réagit se répercutent très négativement sur les contacts économiques bilatéraux. "La Russie a rejeté une partie considérable des entrepreneurs estoniens qui veulent traiter avec elle. Chaque fois qu'apparaît une idée économique plus ou moins importante liée à la Russie, on suggère aux entrepreneurs que l'Estonie doit renoncer à sa politique étrangère russophobe et adopter une attitude amicale envers la Russie. Si les mots d'ordre actuels étaient remplacés par une activité créatrice, la politique estonienne y gagnerait. Sinon, il ne restera aux Estoniens qu'à faire un choix entre deux décisions tout à fait contradictoires et inadéquates: se vendre à la Russie ou bien déclencher - en suivant l'exemple de Mikhaïl Saakachvili - une guerre insensée". (Erileht, 15.10).

Selon les experts, la crainte d'une agression de la part de la Russie a entraîné la militarisation démesurée de l'Estonie. "L'Estonie a commencé à s'armer. Elle veut acheter 40 chars. Au cours des dix prochaines années, il est prévu d'investir 60 milliards de couronnes dans la sécurité (plus de 3,8 milliards d'euros). Le moment est propice aux investissements. La Russie est notre unique adversaire. L'Estonie doit s'armer pour tenir bon en cas de conflit, jusqu'à ce que l'OTAN vienne à son secours. Mais ce réarmement massif donne à l'Estonie l'image d'un Etat militariste. Si nous dépensions pour l'enseignement et la santé des Estoniens ne serait-ce qu'une infime partie des 60 milliards de couronnes, cela serait déjà plus utile que l'achat de chars". (Ohtuleht, 17.10).

Les commentateurs affirment que Moscou est capable d'employer le capital à des fins politiques. "Un séisme financier a contraint les dirigeants de l'Islande à demander à Moscou de lui accorder un crédit. [...] On dit depuis longtemps qu'au XXIe siècle l'occupation d'un pays s'effectue non par des chars, mais par des capitaux. Nous espérons, bien sûr, que l'Islande ne permettra pas aux Russes d'inclure dans le contrat des articles ambigus, et qu'on ne lui demandera pas, au lieu des intérêts, de l'aide, de la compréhension ou du soutien, etc. Les affaires sont les affaires, même si l'un des partenaires est la Russie. Bien qu'il soit impossible d'acheter l'Islande pour 60 milliards de couronnes, de nos jours, cette somme peut la rendre dépendante". (Ohtuleht, 16.10).

LETTONIE

Des sources russophones critiquent âprement Riga, dont la position antirusse empêche la coopération mutuellement avantageuse entre la Lettonie et les pays postsoviétiques d'Asie centrale. "L'Asie centrale ouvre à la Lettonie des perspectives vertigineuses. Il faudrait se tourner d'abord vers la Russie, mais les dirigeants actuels de la Lettonie font tout leur possible en vue de bloquer les rapports avec le voisin de l'Est. [...] On ne comprend pas bien pourquoi le président Valdis Zatlers (lors de sa visite dans la région) a autant critiqué la Russie. Croyait-il que ce comportement passerait inaperçu dans les pays d'Asie centrale, traditionnels partenaires de Moscou?!" (Vesti segodnia, 16.10).

LITUANIE

Selon certains auteurs, dans le contexte de la crise financière mondiale, Moscou ne manquera pas d'utiliser dans ses propres intérêts la demande de l'Islande de lui octroyer un crédit de 4 milliards d'euros.

"Il est étrange que la Russie, qui souffre elle-même de la crise financière, ait été la première à tendre la main à ce petit Etat. Moscou ne cache pas que ce n'est pas pour la beauté du geste qu'il a l'intention d'aider cet Etat du Nord. Moscou souhaite s'approprier une base militaire de l'OTAN en Islande qui avait été abandonnée par les militaires américains en 2006. La Russie manifeste également son intérêt pour l'aéroport de Keflavik fermé après le départ des Américains. Elle considère l'Islande comme une bonne tête de pont pour son intervention ultérieure en Arctique. Cela lui permettrait de se placer idéalement dans la concurrence pour le gaz et le pétrole de l'Arctique. Les experts affirment que la région recèle presque un quart des réserves mondiales de pétrole et de gaz. Tendant la main à l'Islande, la Russie semble se moquer de la solidarité affichée par l'Occident et l'OTAN et déclare: nous agressons la Géorgie, mais, en même temps, nous aidons un Etat de l'OTAN. Par conséquent, l'Occident a de nouveau perdu, sinon toute la guerre, du moins, une petite bataille pour l'influence dans le monde contemporain". (Runet.lt, 19.10).

BIELORUSSIE

Les médias de l'opposition ont accueilli très ironiquement le discours prononcé par le président Alexandre Loukachenko au cours d'une réunion du Conseil national de sécurité, où le chef de l'Etat s'est exprimé avec passion sur une éventuelle attaque des forces de l'OTAN contre Minsk. "Le discours d'Alexandre Loukachenko [...] ferait un excellent scénario pour un thriller fantastique sur l'arrivée de l'apocalypse. Le monde est au seuil d'une catastrophe, des armes de destruction massive sont implantées partout, l'OTAN se trouve à proximité de la frontière biélorusse et, c'est là l'essentiel, l'Union Russie-Biélorussie est en danger. Naturellement, l'ennemi vient de l'Occident. Bref, l'apocalypse est à nos portes. Selon les paroles d'Alexandre Loukachenko, "le rôle accru de Moscou dans l'arène internationale est devenu un facteur supplémentaire d'irritation pour l'Occident". Pour infliger une riposte à l'ennemi, Alexandre Loukachenko juge nécessaire d'examiner la question relative à "la proposition de la Russie de créer un système commun de DCA dirigé vers l'Ouest". Heureusement, il y a un homme capable de faire face à ce mal universel". (Solidarnost, 16.10).

Les politologues mènent des débats animés sur le réchauffement de plus en plus évident qui caractérise les rapports entre Minsk et l'UE. Cependant, la majorité est sceptique quant à une éventuelle future alliance avec l'Europe, en rappelant l'expérience de l'édification de l'Union Russie-Biélorussie. "Il faut des investissements et des technologies, il faut un appui occidental contre la pression de la Russie. La capacité à faire traîner en longueur le processus "d'intégration fraternelle" a fonctionné à la perfection dans l'Est. Des "feuilles de route" en tant qu'étapes d'introduction d'une monnaie commune y ont également été employées. [...] Cependant, Minsk a parfaitement profité de Moscou, en l'alimentant de toute une rhétorique sur l'union". Il ne fait aucun doute que Bruxelles mâchera le même chewing-gum. Certes, l'Europe ne sera probablement pas rejetée avec ses "points". Mais cette euro-intégration conventionnelle se transformera en projet analogue à celui de l'Union Russie-Biélorussie. Ce qui importe aujourd'hui pour l'Europe, c'est de tracer un cordon sanitaire à l'Est contre une Russie imprévisible. Le reste viendra tout seul, estiment probablement les stratèges européens". (Bielorousskie novosti, 16.10).

UKRAINE

Le thème de la dépendance de la Première ministre Ioulia Timochenko envers la volonté de Moscou est traditionnellement présent dans les médias. "Aujourd'hui, on mise sur Ioulia Timochenko. Premièrement, parce qu'elle est considérée comme le vainqueur des joutes politiques ukrainiennes, et la position du vainqueur est toujours bonne et avantageuse. Deuxièmement, parce qu'elle sait parler aux dirigeants russes en employant le langage des affaires qui leur est propre". (Segodnia, 17.10).

Les politologues expliquent la décision inattendue de la Russie de financer généreusement l'économie de l'Islande par le désir du Kremlin d'entraîner dans son orbite un nouvel allié exotique: un membre de l'OTAN qui a une attitude négative envers les initiatives militaires du bloc. "L'Islande est un des rares pays européens qui s'en tient à une neutralité classique et à une politique bienveillante à l'égard de tous les pays civilisés, y compris la Russie. Peu de gens savent qu'elle a liquidé, il y a quelque temps, les bases de l'OTAN sur son territoire et au Groenland, et qu'elle est, en fait, sortie du protectorat des Etats pro-otaniens. Bien entendu, ce serait faire preuve de verbiage que d'affirmer que l'économie de ce pays a été spécialement mise en échec parce qu'il a joué à la "colombe de la paix", mais il est aussi impossible de contester entièrement la composante politique de la crise financière. Moscou ne récompense pas seulement Reykjavik pour le démantèlement des bases, il espère aussi nouer avec lui une amitié à long terme. Ensuite, on verra: on dit que la perspective de l'apparition de bases russes au Venezuela est tout à fait réaliste, en quoi le Groenland serait-il pire?" (Kievski telegraph, 17.10).

MOLDAVIE

Les médias de Tiraspol ne doutent pas que la Russie soit prête à défendre la Transnistrie contre toutes les attaques politiques et économiques extérieures. "En ce qui concerne la vente de ses produits sur le marché européen, la Transnistrie n'est pas contre une participation de l'UE à certains aspects substantiels de son quotidien. Quant aux questions ayant trait à la normalisation des rapports entre Tiraspol et Chisinau, la présence de Moscou est inconditionnelle. Durant toutes les années de confrontation entre les deux rives du Dniestr, Tiraspol n'a jamais exprimé son désaccord avec les "points de vue de Moscou" sur les conditions et les principes du règlement du problème de la Transnistrie et n'a jamais manifesté aucun intérêt pour les idées de l'UE. Il est peu probable que Moscou réagisse à l'intention de Chisinau de participer à une forte "pression politique et économique sur Tiraspol". Moscou dira qu'il n'est pas contre des actions communes, mais seulement compte tenu des intérêts des gens qui vivent en Transnistrie (parmi lesquels se trouvent des citoyens de la Russie)". (IA Lenta PMR, 16.10).

Selon les experts de Chisinau, à l'approche des élections législatives dans la république, le président Vladimir Voronine joue la "carte russe". "La réconciliation entre Vladimir Voronine et Moscou avait été prévue afin que le parti communiste au pouvoir puisse remporter les élections législatives du début de l'année prochaine à l'aide de Moscou. La population russophone de la république (un tiers), déçue de la politique de Vladimir Voronine et de son parti, reste placée devant le choix suivant: ne pas voter du tout, ou bien soutenir de nouveau Vladimir Voronine et le parti communiste. En Moldavie, il n'existe aucun autre important parti de gauche, et l'électorat russophone de la république sympathise traditionnellement avec la gauche". (Press-obozrenie, 21.10).

ARMENIE

Certains auteurs affirment que l'Arménie n'est qu'un pion dans le jeu politique international. "La Russie tente d'y rétablir son influence d'antan et l'Occident s'y oppose. [...] La visite de Dmitri Medvedev (en Arménie) poursuit non seulement l'objectif de développer et d'approfondir les rapports bilatéraux, mais aussi celui de renforcer les positions de Moscou dans la lutte régionale". (Azg, 21.10). "Après la visite du président russe [...] dans notre république, un nouvel homme politique américain arrivera pour de nouvelles "consultations" avec le président arménien". (IA ArmInfo, 20.10).

De l'avis de certains médias, dès que l'OTAN s'implantera en Géorgie, la Russie perdra tout intérêt pour l'Arménie en tant qu'allié politique. "L'Arménie n'est plus nécessaire à la Russie, car, après la reconnaissance de l'Abkhazie et de l'Ossétie du Sud par Moscou, elle n'est plus intéressante, elle n'est plus qu'un territoire superflu. A présent, Moscou mène, en tant qu'actionnaire, un marchandage avec l'Occident. On peut dire que l'Occident a payé la Russie pour l'Arménie par l'Abkhazie et l'Ossétie du Sud. Qui plus est, la Russie possède presque toute la propriété en Arménie. Sur ce plan, l'Arménie pourrait devenir pour la Russie comme la Bulgarie ou le Monténégro, où le capital russe est représenté le plus largement. Autrement dit, la situation change: si, dans les années 1990, nous recevions l'argent de l'Occident et la sécurité en provenance du Nord, à présent, ce sera tout le contraire". (Eter, 16.10).

GEORGIE

Les médias sont certains que le conflit armé a aggravé la situation, déjà instable, sur le marché russe. "Ces derniers temps, l'économie de la Russie a essuyé un préjudice considérable, bien que cela ne puisse être uniquement expliqué par le contexte des événements en Géorgie. Bien avant l'agression russe en Géorgie, une tendance à la récession et d'autres processus négatifs ont été observés dans l'économie russe, ce qui était, pour l'essentiel, le résultat de la baisse des prix du pétrole sur le marché international. Dans ce contexte, l'agression de la Russie contre la Géorgie n'a fait qu'aggraver la crise de l'économie russe. Les actions russes ont commencé à baisser, les investissements ont diminué. Un fait est indéniable: la Russie a préféré ses objectifs militaires à la prospérité économique. Mais elle n'a pas tenu compte des conséquences de l'agression sur le plan économique". (Biznessi, 16.10).

AZERBAIDJAN

Les experts doutent que le problème du Nagorny-Karabakh puisse être réglé prochainement: les médiateurs (l'Occident et Moscou) devront persuader les parties opposées d'essayer de parvenir à un compromis. "Les Arméniens, tout comme nous, fondent un grand espoir sur la Russie en tant que coprésident du Groupe de Minsk de l'OSCE. Cependant, aussi bien la Russie que l'UE poursuivent leurs propres intérêts. Après les événements géorgiens, Moscou ne souhaiterait pas être entraîné dans un conflit de grande envergure avec l'Occident. Un tel conflit à cause du Karabakh est possible! L'Europe, elle, ne veut pas voir apparaître une nouvelle poudrière". (Novoie vremia, 21.10).

Les commentateurs estiment que, malgré les déclarations creuses de Moscou et d'Erevan sur l'extension de la coopération mutuellement avantageuse, la Russie applique, en fait, une politique d'expansion économique rigide à l'égard de son allié stratégique. "La réalité est loin de la coopération. Moscou contrôle littéralement l'économie de l'Arménie et applique une politique d'expansion économique contre son avant-poste. Les grandes corporations russes - Gazprom, UES, VTB, RusAl, VympelKom, Sistema, RZD et Alrosa - contrôlent tous les ouvrages stratégiques de l'économie arménienne". (Express, 21.10).

KAZAKHSTAN

De l'avis des commentateurs, la Russie essaie de compenser ses pertes géopolitiques après le démembrement de l'URSS, car, pour elle, le maintien de la viabilité de la CEI (Communauté des Etats indépendants) et d'autres structures d'intégration dans l'espace postsoviétique est une question de survie. "Les rapports sont harmonieux au sein de la CEEA (Communauté économique euro-asiatique) et entre les pays d'Asie centrale, parce que la Russie y a intérêt. La Russie donne une impulsion à l'intégration, la CEI repose aujourd'hui sur le pragmatisme économique. La Russie ne sera pas un centre idéologique, comme en URSS, et les intérêts de chaque Etat seront pris en considération. La Russie vise à s'affirmer dans le cadre de l'intégration économique, ce qui est une conséquence des leçons du Caucase. La séparation des pays d'Asie centrale, comme cela a eu lieu avec la Géorgie, conduira à l'isolement total, puis au démembrement de la Russie". (Delovaïa nedelia, 17.10).

TADJIKISTAN

Les commentateurs déplorent que le Tadjikistan soit devenu le participant involontaire d'un "grand jeu": la lutte de plusieurs années entre l'Occident et la Russie pour l'influence géopolitique dans la région. Selon les médias, Moscou se distingue par une importante ambition et un certain égoïsme dans les rapports bilatéraux. "L'importance militaire, politique et géopolitique du Tadjikistan est inestimable pour la Russie. Il en découle que, pour la Russie, la question du déploiement de bases et, pour le Tadjikistan, la question des ouvriers émigrés sont des points qui ne seront jamais contestés afin d'éviter la rupture des relations. Moscou et Douchanbe s'en rendent parfaitement compte. C'est pourquoi la tendance de certains milieux politiques russes à faire pression sur le Tadjikistan pour qu'il prenne en fin de compte position par rapport au "divorce" entre la Russie et les Etats-Unis est pour le moins étrange". (FK-Capital, 08.10).

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