Quel remède à la piraterie?

S'abonner
Par Ilia Kramnik, RIA Novosti
Par Ilia Kramnik, RIA Novosti

L'Admiral Vinogradov, un destroyer anti-sous-marins de la Flotte russe du Pacifique, qui a pris le relais du Neoustrashimy ("intrépide") de la Flotte de la Baltique au large de la Somalie, a repoussé une attaque des pirates contre le porte-conteneurs néerlandais Nedlloyd Barentsz, de 70.000 tonnes de port en lourd.

Le navire néerlandais a émis un signal de détresse en précisant avoir été attaqué par des embarcations rapides. Deux bâtiments de guerre se trouvaient alors à proximité du porte-conteneurs, à savoir l'Admiral Vinogradov et le navire danois Absalon, lequel, bien que se trouvant plus près du Nedlloyd Barentsz, a cependant préféré laisser agir le navire russe. Ce dernier s'est dirigé vers le porte-conteneurs, ainsi que deux hélicoptères Ka-27 avec des fusiliers marins à son bord. Parallèlement, il a été proposé au navire néerlandais de zigzaguer à toute vitesse pour compliquer aux pirates la poursuite.

Ayant repéré les hélicoptères, les pirates ont essayé de s'enfuir, mais deux embarcations ont été arrêtées par un tir de mitrailleuses russes. Trois écumeurs de mer ont été blessés. Les pirates ont essayé de se faire passer pour des pêcheurs, mais les fusiliers marins n'ont trouvé aucun engin de pêche à bord de leurs embarcations, lesquelles étaient en revanche remplies d'armes et de cordes et d'araignées. Les pirates capturés ont été transférés aux gardes-côtes yéménites, les blessés ayant reçu les premiers soins. Une autre embarcation a réussi à se sauver.

Cet incident a mis en exergue le problème du cadre juridique des activités anti-pirates. Il se peut que les Danois aient laissé agir les Russes en raison des sévères restrictions juridiques prévues par la législation européenne en la matière. Les marins danois ont déjà plusieurs fois été obligés de relâcher les écumeurs de mer qu'ils avaient capturés. Quant aux marins russes, plus libres dans leurs activités, ils ont pu transmettre les pirates au Yémen, qui pourrait les punir très sévèrement.

Si les pirates étaient jugés conformément à la législation russe (par exemple, en cas de tentative de détournement d'un navire russe), ils tomberaient sous le coup de l'article 227 du Code pénal russe ("Piraterie"), qui prévoit une peine de prison de 15 ans pour les criminels, et éventuellement de l'article 206 ("prise d'otages") et 211 ("détournement d'un navire"). Selon la règle du cumul des peines, ces articles peuvent assurer aux pirates jusqu'à 15 ans d'incarcération. Mais en vertu des dispositions du Code pénal russe, les citoyens étrangers ayant commis des crimes en dehors de la Fédération de Russie ne peuvent être traduits en justice en Russie que dans le cas où leur crime a porté atteinte aux intérêts de la Fédération de Russie. C'est pour cette raison que les pirates capturés ont été transférés aux Yéménites. Pour les Européens, les actions de ce genre posent des problèmes, car la législation de nombreux pays interdit le transfert des criminels capturés à un autre pays si la peine à encourir dans celui-ci est plus sévère.

Une telle situation soulève à nouveau le problème de la coopération entre les différents pays luttant contre les pirates, et ce, non seulement au niveau tactique (activités au large de la Somalie), mais également au niveau des organes officiels. La lutte contre la piraterie doit être menée selon des règles communes, et le châtiment doit être le même pour tous, quel que soit le pays auquel appartient le navire qui a capturé les pirates. La solution consisterait peut-être à adopter un code international définissant les peines applicables en la matière, ainsi que les règles du procès pénal et les modalités de l'exécution des peines. Il est à noter que la perspective de se retrouver dans une prison européenne ne doit pas beaucoup effrayer les pirates somaliens: dans cet établissement, ils seront au moins nourris et protégés contre la guerre civile qui fait rage en Somalie.

Par ailleurs, il est évident que la mentalité européenne contemporaine empêchera les pays de l'UE de traiter les pirates comme ils l'avaient fait au XVIIe-XIXe siècles, en les jetant par-dessus bord ou en les pendant.

Les opinions exprimées dans cet article sont laissées à la stricte responsabilité de l'auteur.

Fil d’actu
0
Pour participer aux discussions, identifiez-vous ou créez-vous un compte
loader
Chat
Заголовок открываемого материала