OTSC: Moscou consolide son pré carré en Asie centrale

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Par Ilia Kramnik, RIA Novosti
Par Ilia Kramnik, RIA Novosti

L'Organisation du traité de sécurité collective (OTSC) se transforme peu à peu en alliance militaire. Adoptée lors du récent sommet de Moscou, la décision visant à créer une Force collective de déploiement rapide (FCDR de l'OTSC), qui sera utilisée pour protéger ses membres en cas d'agression ou dans des situations d'urgence, devrait marquer le point culminant de cette mutation.

Le renforcement de l'OTSC constitue l'une des principales réussites de la Russie en matière de politique extérieure ces dernières années. L'OTSC est le fruit d'une gestation longue et pénible; créé en 1992 sur les ruines de l'URSS, le traité ad hoc est longtemps resté lettre morte. Après l'an 2000, lorsque la Russie a commencé à rétablir son influence en Asie centrale, le document s'est concrétisé. En 2002, une organisation dotée d'une structure permanente a vu le jour sur la base de ce traité. Cette période a été marquée par la concurrence entre la Russie et les Etats-Unis pour l'influence dans la région centrasiatique, où des bases militaires américaines ont été implantées après 2001 pour assurer les opérations des troupes de l'OTAN en Afghanistan.

Cette rivalité s'est conclue par un désengagement progressif des Etats-Unis de la plupart des républiques centrasiatiques, dans lesquelles les forces américaines avaient dans un premier temps été déployées. Tout récemment, le gouvernement du Kirghizstan a décidé de dénoncer l'accord avec Washington portant sur l'utilisation de la base de Manas, ce qui forcera les Américains à rechercher de nouveaux moyens d'assurer l'approvisionnement des troupes déployées en Afghanistan.

De fait, les événements actuels démontrent que les Etats membres de l'OTSC, et avant tout la Russie, aspirent à mener une politique indépendante dans leur sphère d'influence, sans laisser des pays tiers s'y immiscer. La création d'une force collective de déploiement rapide fournira à l'OTSC un instrument susceptible d'être utilisé à tout moment, sans laisser le temps aux forces extérieures d'intervenir rapidement.

La composition de cette force n'est pas encore définie. On s'attendait à ce que la Russie fournisse le gros des effectifs de la FCDR de l'OTSC, à savoir une division aéroportée et une brigade d'assaut aéroportée. Certaines sources précisent qu'il s'agit "d'unités déployées à Ivanovo et à Oulianovsk", c'est-à-dire de la 98e division aéroportée d'Ivanovo et de la 31e brigade d'assaut aéroportée d'Oulianovsk. Le Kazakhstan devait avancer le deuxième plus grand contingent, et notamment une brigade.

Cependant, à en juger par les informations disponibles, il a été décidé que chaque pays membre se bornerait à dégager un bataillon de ses forces armées. Une telle modestie s'explique d'une part par les appréhensions des autres pays, qui redoutent une hypertrophie de l'influence des principaux acteurs tels que la Russie, le Kazakhstan et - potentiellement - la Biélorussie; et d'autre part, par le sous-développement de l'économie de certains des autres Etats membres de l'OTSC, qui les empêche de présenter des contingents importants.

Dans le même temps, la création d'une telle force, ne serait-ce que selon un format aussi réduit, permet de s'acquitter de certaines tâches, et en premier lieu de réprimer rapidement d'éventuelles attaques de mouvements terroristes et radicaux. Une force plus nombreuse conviendrait mieux pour lutter contre les nombreux groupements criminels organisés ou contre des armées régulières. Or, il n'existe pour le moment aucun risque direct d'un conflit de ce genre dans la zone d'activité de l'OTSC.

La création de la FCDR de l'OTSC sous sa forme actuelle est un pas crucial dans la transformation de l'OTSC en puissante organisation militaire et politique, mais ce n'est qu'un balbutiement dans cette direction. L'évolution ultérieure de l'alliance dépendra avant tout de la capacité des pays membres à faire face à la crise mondiale, car il est impossible de façonner une armée moderne sans une économie efficace. Dans ce contexte, la Russie joue un rôle toujours plus important; en dépit de la crise, elle reste le leader inconditionnel de l'OTSC sur le plan économique.

Le bien-fondé des prétentions russes au leadership au sein des anciennes républiques soviétiques en général, ainsi que les perspectives de l'OTSC en tant qu'instrument de préservation de ce leadership en particulier dépendent de la capacité de la Russie à protéger son économie et à servir de locomotive à ses partenaires.

Les opinions exprimées dans cet article sont laissées à la stricte responsabilité de l'auteur.

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