L'armée russe en 1812: l'adversaire sous-estimé par Napoléon Ier

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En développant dès 1810 le commerce avec des pays neutres afin de maintenir des échanges commerciaux avec la Grande-Bretagne en contournant le Blocus continental, le gouvernement russe enfreignit ainsi les dispositions des traités de Tilsit de 1807 signés entre Napoléon Ier et Alexandre Ier de Russie et contraignant la Russie à adhérer au Blocus continental.

En développant dès 1810 le commerce avec des pays neutres afin de maintenir des échanges commerciaux avec la Grande-Bretagne en contournant le Blocus continental, le gouvernement russe enfreignit ainsi les dispositions des traités de Tilsit de 1807 signés entre Napoléon Ier et Alexandre Ier de Russie et contraignant la Russie à adhérer au Blocus continental. Parallèlement, la Russie instaura des taxes prohibitives sur les importations de produits de luxe, principal poste des exportations françaises à destination de la Russie. Certes, les dispositions du traité de paix de 1807 avaient dès le début été économiquement rédhibitoires pour la Russie, mais cette considération ne pouvait pas être une excuse aux yeux de Napoléon Bonaparte. Les gouvernements des deux pays étaient conscients qu'un conflit armé devenait inévitable.

Napoléon Ier a épousé Marie-Louise d'Autriche et s'est ainsi assuré le soutien du gouvernement de Vienne. Il a également conclu plusieurs alliances militaires, dont notamment avec le roi de Prusse, en vue de renforcer son armée. Pour sa part, Alexandre Ier se préparait à se défendre.

L'empereur russe et le commandement de l'armée se préparèrent à la guerre en tenant compte de toutes les négligences et erreurs commises au cours de la campagne de 1805-1807, et cherchèrent avant tout à signer la paix avec l'Empire ottoman afin d'éviter une guerre sur deux fronts, à renforcer l'armée avec de nouvelles recrues et à améliorer le système de commandement centralisé des forces armées.

En vue d'augmenter son armée, Alexandre Ier de Russie décréta le 14 juillet 1810 que les précédents recrutements de paysans à l'armée effectués entre 1715 et 1799 ne seraient pas pris en compte lors du prochain recrutement. Cette mesure empêcha les propriétaires fonciers (auxquels les paysans appartenaient dans le cadre du droit de servage) de prétexter, par l'envoi à l'armée de paysans par leurs pères et leurs grands-pères, le refus d'accomplir leur obligation consistant à fournir des recrues. Cette décision rendit possible une augmentation considérable des effectifs de l'armée.

Entre septembre 1810 et mars 1812, il y eut trois campagnes de recrutement permettant de mobiliser en moyenne neuf hommes sur 500. Le général et ministre russe de la Guerre de l'époque, Mikhaïl Barclay de Tolly, écrivit plus tard que ces mesures avaient permis de doubler les effectifs de l'armée.

En 1812, les forces armées russes comptaient 622.000 hommes, dont 380.000 dans l'infanterie, 80.000 dans la cavalerie, 52.000 dans l'artillerie et le génie, et 110.000 dans la cavalerie non-régulière (avant tout les détachements cosaques).

Les soldats

Le noyau de l'armée régulière russe se composait, comme par le passé, de paysans recrutés et intégrés ainsi à l'état militaire: dès leur recrutement, leur mode de vie précédent prenait fin. A l'époque, l'armée russe recrutait des paysans, des bourgeois et des propriétaires fonciers. Ces derniers, ainsi que les communautés de paysans d'Etat (appartenant à la couronne et non à un propriétaire privé) et de bourgeois étaient sensés fournir à l'armée une recrue sur un nombre déterminé de personnes. Les hobereaux ne disposant pas de quantité suffisante de paysans pour fournir une recrue, cotisaient et versait une certaine somme au propriétaire que le tirage au sort obligeait à envoyer une recrue à la place des autres.

Les recrues ainsi enrôlées formaient toutes les branches de l'armée, à savoir l'infanterie, la cavalerie, l'artillerie et le génie. Après une formation aux "dépôts de recrues de réserve" créés en 1806, les recrues intégraient les unités de l'armée de terre. Les dépôts étaient des établissements de formation de recrues pour un service militaire en temps de guerre et où la formation s'étalait sur 8 ou 9 mois. La création des dépôts s'expliquait par la nécessité d'améliorer la "qualité des effectifs" des unités militaires: avant 1806, les conscrits rejoignaient directement leurs régiments, ce qui influait négativement sur l'aptitude de l'armée au combat.

Les unités de l'armée de terre composées de recrues se divisaient en unités de ligne et celles d'infanterie, ainsi qu'en régiments de grenadiers. Une catégorie à part, celle de l'infanterie légère, comprenait les unités de chasseurs à pied.

Les officiers

Au 1er janvier 1801, la Russie disposait de trois écoles militaires destinées à former des officiers (écoles de cadets), ainsi que de l'Ecole des pages, de l'Hôtel impérial pour les orphelins de guerre et de l'école topographique Gapaniemski. La marine, l'artillerie et le génie disposaient de leurs propres établissements de formation dès le début du XVIIIe siècle. A partir de 1807, les nobles âgés d'au moins 16 ans étaient admis aux régiments en tant que sous-officiers suivant une formation d'officier. Par ailleurs, ils obtinrent le droit d'étudier dans les classes terminales des écoles de cadets. En 1810, le Régiment des nobles fut créé afin de former de jeunes nobles au service d'officier. Après les examens de fin d'études, les officiers frais émoulus étaient affectés aux régiments.

Les unités militaires non-régulières

Les unités régulières cosaques constituaient un élément important de l'armée russe. Les cosaques russes bénéficiaient depuis des siècles d'un statut particulier d'état militaire, et leur aptitude au combat était ainsi traditionnellement élevée. Les plus importantes unités cosaques envoyées au front de l'ouest recrutaient leurs effectifs dans les régions situées le long des fleuves de Don et de Boug. Les unités de cavalerie cosaque représentaient l'une des fores clés de la cavalerie russe étant donné que leur formation leur permettait non seulement de participer au combat mais d'effectuer par ailleurs une sorte de reconnaissance sur le terrain, car elles étaient constamment en mouvement et se démarquaient par une mobilité particulièrement élevée.

Des unités ethniques au sein de l'armée russe jouèrent également un rôle considérable. Au début de la Campagne de Russie de 1812, l'armée russe disposait de trois régiments kalmouks, d'unités de Kirghizes, de Iakoutes et de Bachkirs montés, ainsi que de quatre régiments tatars à cheval.

Ainsi, parmi les Bachkirs, le recrutement à l'armée s'effectuait parmi les hommes âgés de 20 à 50 ans, et un homme était prélevé sur quatre ou cinq familles. Chacun était muni du matériel nécessaire, ainsi que de deux montures et de denrées. Le recrutement était supervisé par les chefs de détachements.

Les régiments tatars à cheval rejoignirent l'armée russe en pleine campagne de 1812. Bien que la région de la Crimée (le gouvernement de Tavrida) fût exempte, en vertu du Décret impérial du 18 juillet 1812, de l'obligation de former la milice, quatre régiments montés furent formés dans la péninsule, dont deux rejoignirent la 3ème armée russe de l'ouest et les deux autres intégrèrent un corps détaché cosaque.

Ainsi, en 1812, les forces de l'Empire russe comprenaient trois armées de l'ouest réunissant les principales unités d'infanterie, de cavalerie, d'artillerie et de génie. Les soldats étaient mieux formés que cinq ans auparavant car les recrues avaient suivi un entraînement dans les "dépôts de réserve". Globalement, l'armée russe avait les effectifs nécessaires et une qualité suffisante pour affronter les forces armées de l'Empire français et de ses alliés.

 

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