Dominique de Villepin, fossoyeur de Sarkozy ou de toute la droite française?

© Flickr / Cyril PlapiedDominique de Villepin, fossoyeur de Sarkozy ou de toute la droite française?
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La France est un pays vraiment exceptionnel, et pas seulement pour son fromage, son vin et sa parfumerie. Des procès entre premiers ministres et présidents (vivants et en bonne santé) sont rares dans la politique européenne contemporaine, mais en France, ils ont lieu.

La France est un pays vraiment exceptionnel, et pas seulement pour son fromage, son vin et sa parfumerie. Des procès entre premiers ministres et présidents (vivants et en bonne santé) sont rares dans la politique européenne contemporaine, mais en France, ils ont lieu.

Les présidents en place y figurent comme accusateurs non seulement d'anciens premiers ministres, mais aussi de leurs camarades du parti au pouvoir.
Certes, le pluriel y est, peut-être, déplacé, mais … le président Nicolas Sarkozy est en procès contre l'ancien premier ministre Dominique de Villepin. Et il est à présent clair que le procès "Sarkozy contre de Villepin" (dénomination conventionnelle) qui a pris fin le 28 janvier à Paris, aura une suite.

Ces deux principaux acteurs du procès ont l'intention de se présenter à la présidence de la Ve République en 2012.
Les deux appartiennent au parti de droite au pouvoir "Union pour le Mouvement populaire" (UMP). 
Les chances du deuxième (Dominique de Villepin) d'arracher au premier le droit de siéger à l'Elysée se sont considérablement accrues après le procès, alors que celles du premier (Nicolas Sarkozy) ont sensiblement diminué.

Depuis le mois de février, Villepin victorieux, innocenté par le tribunal de Paris le 28 janvier, prévoit de lancer une large "offensive politique" contre Sarkozy et, en réalité, de lancer sa campagne électorale.
Mais le procureur de Paris, Jean-Claude Marin, a déclaré qu'il faisait appel du jugement innocentant de Villepin, déclarant que certains éléments pouvant jeter une lumière supplémentaire sur l'affaire, n'avaient pas été présentés au tribunal.

Bref, de Villepin doit revenir sur le banc des accusés.
A Paris, de mauvaises langues ont tout de suite accusé Sarkozy de vengeance politique, de faire pression sur le procureur et de vouloir condamner à tout prix son principal rival, de lui gâcher sa vie et sa carrière politique, ce qui revient d’ailleurs au même pour un homme politique de cet acabit.
Jean-Claude Marin et le ministre français de la Justice  démentent toute pression. Et rares sont d’ailleurs ceux qui y ajoutent foi en France.
Le fait est que la constitution française investit le président d'un tel pouvoir (en étendant de manière élégante son autorité au pouvoir exécutif, législatif et judiciaire) que ni les Etats-Unis, ni n'importe quelle république présidentielle d'Europe, ne peuvent même rêver d'exercer.

Deux mots sur la substance des accusations. L'affaire de Villepin, ou l'affaire Clearstream, dure depuis 2004. Clearstream est un centre bancaire luxembourgeois par lequel de nombreux membres de l'establishment français avaient blanchi l'argent provenant de la vente de frégates françaises à Taïwan.
Le nom de Nicolas Sarkozy, entre autres,  figurait sur les listes. Comme il s'est avéré plus tard, les listes soumises de façon anonyme aux organes d'enquête se distinguaient des originaux. Dominique de Villepin (alors le ministre de l'Intérieur) était, semble-t-il, au courant, mais il ne coupa pas court à la diffusion de faux, encourageant par conséquent, indirectement la destruction de la réputation de Sarkozy. Cela, soi-disant, pour bloquer ses ambitions présidentielles de 2007.
Le procureur exigeait la condamnation de Dominique de Villepin à un an et demi de réclusion et à une amende de 45000 euros. Mais il a été relaxé.

En France, on appelle cela le "procès de la décennie".
C'est un procès politique, personne ne le considère autrement, et tout ce qui y est lié est un cas rare pouvant servir de méthodologie pour les ambitions présidentielles et politiques, la vanité politique et toutes sortes d'entorses aux normes universellement admises de l'éthique, de la morale et de l'honnêteté.

L'aversion réciproque entre Sarkozy et de Villepin date d'il y a quinze ans et s'est accrue pour se transformer en haine à peine dissimulée. Rappelons qu’à une époque, les deux hommes jouissaient de la protection de Jacques Chirac.

Pour de Villepin, Sarkozy est en quelque sorte la méchante sœur de Cendrillon. Les deux avaient commencé par travailler avec Jacques Chirac, mais Nicolas avait toujours devancé Dominique (leur différence d'âge est de quelque mois).
Dominique de Villepin est rangé par ses partisans parmi les familles d'aristocrates français, les intellectuels raffinés, les écrivains, les poètes, les philosophes et les brillants diplomates (il était ministre des Affaires étrangères), les personnes très instruites. Effectivement, il est auteur de plusieurs livres et études sur l'histoire, ainsi que de deux best-sellers: «Les Cent jours de Napoléon ou l'Esprit de sacrifice" (ce livre traduit en russe a paru à Moscou en 2004) et "Le cri de la gargouille" (chimère), un essai politique et philosophique écrit en 2002, après la victoire remportée par Jacques Chirac à l'élection présidentielle.

La dissidence passive de Dominique de Villepin est passée dans une phase active. Il a déjà créé un Club de Villepin dont font partie une dizaine de députés de l'UMP, il intensifie son activité dissidente au sein du parti.
A en croire les journaux français, Sarkozy traite de Villepin d'aliéné et de schizophrène. Quant à Villepin, il appelle Le Sarko le "nain" (on dit que le président français mesurerait moins de 1,60 m).

Nicolas Sarkozy est également issu d'une famille de nobles hongrois, mais les Français ne prennent pas au sérieux les mots "aristocrate hongrois".

Avant le procès, l'élite française estimait que Dominique de Villepin était un cadavre politique, ou presque. Il semble qu’avec le procès, Sarkozy l'ait réanimé.
De Villepin est trop académique, aristocratique, la base de ses partisans est trop floue, il ne jouit pas (pour l'instant) d'un soutien important au parlement et au sein de l'UMP. Cependant, dans la politique contemporaine, ce qui est incroyable devient souvent l'évidence, comme le montrent certains exemples: Barack Obama est devenu le premier président afro-américain des Etats-Unis qui ne sont pas un pays de "Noirs" et Nicolas Sarkozy, le fils d'un émigré hongrois, est devenu président de la France.

Deux ans sont un délai assez long en politique. Il se peut que Dominique de Villepin enterre et Nicolas Sarkozy, et lui-même, et les chances de l'UMP, parti de droite, de remporter de nouveau les élections. Ce qui conduirait le pays vers la victoire des socialistes.

Ce texte n'engage que la responsabilité de l'auteur.

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