Crise grecque: vers un Fonds monétaire européen?

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Les Grecs ont déjà irrité l'UE par leurs problèmes financiers et leurs dettes et il se peut qu'ils la poussent à créer un Fonds monétaire européen dans l'unique but d'éviter la répétition du cas de la Grèce.

Les Grecs ont déjà irrité l'UE par leurs problèmes financiers et leurs dettes et il se peut qu'ils la poussent à créer un Fonds monétaire européen dans l'unique but d'éviter la répétition du cas de la Grèce.

Quant à la création du FME, proche analogue du FMI, en vue de sauver les pays endettés d'Europe, on en parle maintenant sérieusement. Par conséquent, la "tragédie grecque" de l'UE comporte probablement un élément rationnel. Si, bien entendu, Bruxelles (et plus précisément Berlin et Paris) soutiennent cette décision.

Le premier ministre socialiste grec, Georges Papandréou, a fait une tournée à Paris, Berlin et Washington et a ressenti, une fois de plus, un mauvais karma qui pèse non seulement sur lui, mais aussi sur la Grèce. Ses prédécesseurs de centre-droit avaient minimisé aussi bien le déficit budgétaire (il s'avère qu'il est, en réalité, de 112% du PIB) que la dette extérieure de la Grèce (300 milliards d'euros). Le gouvernement Papandréou a de son côté détérioré la situation en introduisant des mesures d'économie draconiennes, des impôts et des salaires tels que le pays s’enlise, en effet, dans une veule guerre civile. Et son avenir s'annonce encore plus sombre.

Pour voir la lumière au bout du tunnel, Papandréou s'est rendu du 5 au 10 mars en France, en Allemagne et aux Etats-Unis. Plus Papandréou affirmait qu'il n'était pas venu pour demander de l'argent et plus sombres et sérieux devenaient ses interlocuteurs. Il faut bien dire que les Grecs jouissent depuis longtemps en Europe d'une triste réputation de "roublards" en ce qui concerne l'argent, mais à présent ils se sont tellement compromis qu'en entendant les mots "dettes", "déficit", "Europe malade" (sans parler de la filouterie avec les statistiques, des machinations et de la désinformation), tout le monde jette les regards malveillants sur la Grèce. Décidément, Papandréou n'a pas eu de chance en arrivant au pouvoir en octobre dernier.

On a dit partout à peu près la même chose à Athènes: nous sommes solidaires et prêts à aider, mais seulement lorsque la situation sera tout à fait catastrophique et que tout le monde se sentira complètement mal. A quel point on se sentira "mal" et qui, cela n'a pas été précisé.

A l’heure actuelle, la France et l'Allemagne (les principales locomotives de l'UE) se trouvent devant un choix difficile. C'est, pour ainsi dire, un choix entre deux "réactions en chaîne". Soit accepter d'apporter une aide financière concrète et "racheter" les dettes d'Athènes et attendre ensuite que d'autres pays en situation difficile, en premier lieu l'Espagne, le Portugal et l'Irlande, demandent une aide similaire. Soit ne pas accepter de "racheter" les dettes grecques et laisser Athènes tomber dans le défaut de paiement et attendre que d'autres pays s’écroulent après Athènes. Les candidats en sont toujours les mêmes: l'Espagne, le Portugal et l'Irlande.

Ces deux variantes sont peu radieuses. Elles renforcent soit l'instinct de parasitisme, soit la méfiance dans l'euro. Dans les contes populaires russes, ces perspectives sont ordinairement traduites par une instruction écrite sur une grande pierre: "Si tu vas à droite, … Si tu vas à gauche,…" Il y a, bien entendu, une troisième solution: permettre à la Grèce de faire un emprunt au FMI et attendre qu'elle se débrouille elle-même avec ses grévistes (les syndicats ont de nouveau annoncé une grève générale pour le 11 mars). On peut même accepter qu’elle se retire temporairement de la zone euro, ce qui permettrait à Athènes de manipuler le cours de la drachme et d'obtenir la diminution des créances.

La question est de savoir ce qui sera le moins nuisible à l'euro.

Certes, l'euro sans Grèce, ne signifie nullement la fin de la civilisation européenne. Mais ce serait un coup dur pour elle. De grandes silhouettes d’économies asiatiques se profilent déjà à l’horizon alors que le retrait de la Grèce du "club de l'euro" porterait atteinte à la réputation économique de la Grande Europe. D'autre part, le retrait de la Grèce de la zone euro donnerait, ne serait-ce que pour un certain temps, une bonne leçon de discipline. La zone euro regroupe 16 des 27 pays de l'UE, à l'exception du Danemark, de la Grande-Bretagne, de la Suède, des pays baltes et de tous les anciens pays socialistes d'Europe. L'euro circule aussi en dehors de l’UE. La monnaie unique a un cours légal au Vatican, à Monaco, dans la principauté d'Andorre, au Kosovo et au Monténégro. Au total, près de 350 millions de personnes utilisent l'euro. La zone euro produit les deux tiers du PIB de l'UE.

Lorsque les mots "sauver la Grèce" retentissent dans l'UE, tous les regards se tournent automatiquement vers l'Allemagne qui est seule en mesure d'apporter une contribution efficace au "fonds de sauvetage de la Grèce". Bien entendu, l'Allemagne a les poches les plus profondes en Europe, mais cela ne veut pas dire qu'elle soit prête à permettre aux Grecs d'y plonger leurs mains. Les Allemands estiment que "payer pour les Grecs" signifierait "payer pour tous ces "avortons méditerranéens" et ces gaspilleurs.

La position de l'Allemagne n'est pas tout à fait irréprochable. Depuis que la crise grecque entache la réputation de l'euro, son cours a reculé (par rapport au dollar) d'environ 10%. Cela a exercé une influence tonifiante sur les exportations allemandes (et françaises). Il serait très avantageux pour l'Europe de prolonger une baisse insignifiante du cours de l'euro. Sans cela, les économies de l'Allemagne et de la France orientées vers les exportations ne pourront pas relancer leurs exportations, assainir leur demande intérieure et assurer ainsi l'essor de toute l'économie de l'Europe occidentale (ainsi que de l'Europe de l'Est, du Sud et centrale).

Les Allemands rationnels invitent les Grecs à former, enfin, un "gouvernement économique", bien que nul ne puisse préciser jusqu'à présent sous quelle forme il doit apparaître. Pour les Allemands, cela signifie avant tout de mettre de l'ordre dans la comptabilité et les statistiques. Mais puisque tous les principaux pays en difficulté se trouvent, pour l'essentiel, dans le Sud de l'Europe (la Grèce, l'Espagne, le Portugal, l'Italie), il est peu probable qu'il soit possible d'inculquer aux habitants des pays méridionaux des qualités purement germaniques. En tout cas, personne n'y a réussi jusqu'à présent.

Et voici que le ministre allemand des Finances (Wolfgang Schäuble) énonce ouvertement, pour la première fois, l'idée de créer un "instrument d'aide" à l’instar du FMI, dans une interview au journal allemand Welt am Sonntag. Il a également annoncé qu'il en présenterait bientôt les détails concrets. On dit que ce plan sera débattu dans les grandes lignes lors d'une rencontre des ministres des Finances de la zone euro et de l'UE à la mi-mars. Quoi qu'il en soit, des diplomates européens affirment que, même si ce plan est approuvé demain (ce qui est peu probable), la création du fonds prendra tant de temps qu'il n'aidera nullement les Grecs.

Parmi les récents scenarios de "sauvetage des Grecs" proposées en Allemagne, il y a celui formulé dans Bild. Dans ses colonnes, le quotidien le plus lu d’Allemagne reprend l'idée d'un des députés de l’Union chrétienne-démocrate d’Angela Merkel: "Vendez vos îles, vous les Grecs endettés! Et vendez l'Acropole aussi!"

Mais il est fort douteux que les Grecs acceptent cette solution.

Ce texte n'engage que la responsabilité de l'auteur.

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