Nicolas Ier, un personnage ambigu et controversé

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Pour les historiens, l’empereur Nicolas Ier de Russie a été et reste un personnage un personnage ambigu et controversé . Son règne a vu la centralisation de l’appareil bureaucratique en même temps que la création du premier Code des lois de l’Empire Russe.

Pour les historiens, l’empereur Nicolas Ier de Russie (au pouvoir de 1825 jusqu'à sa mort en 1855) a été et reste un personnage ambigu et controversé. Son règne a vu la centralisation de l’appareil bureaucratique en même temps que la création du premier Code des lois de l’Empire Russe. C’est sous son règne également que le pays a été doté de ses premiers chemins de fer. Le souverain est resté dans la mémoire collective pour l’exécution des décabristes, l’écrasement de l’insurrection en Pologne et de la révolution en Hongrie. C’est lui également qui a signé la paix d’Adrianople accordant à la Russie la côte orientale de la Mer Noire. Toutes ces facettes de son règne ont été examinées à la conférence de presse intitulée « Nicolas Ier, chevalier de l’autocratie et « gendarme de l’Europe ». La conférence de presse s’est déroulée à RIA Novosti dans le cadre du projet « Danger : histoire! »

Tsar-législateur

Irina Rouzhitskaïa, docteur en histoire et chargée de recherches à l’Institut de l’histoire de la Russie auprès de l’Académie des Sciences de Russie, a fait remarquer que « les historiens russes n’avaient commencé à évoquer les aspects positifs du règne de Nicolas Ier que ces 10 ou 15 dernières années, alors que son règne tout entier a été un chaînon de la progression de la Russie. Son époque a été celle de la création de conditions préalables aux grandes réformes ultérieures».

Un des plus grands mérites de Nicolas Ier, selon Irina Rouzhitskaïa, est son « travail titanesque de codification des lois ». « Il a surmonté le chaos législatif en composant pour la première fois un Code des lois de l’Empire Russe ce qui peut même être qualifié de révolution juridique », estime l’historienne qui formule son point de vue comme ceci : « Si Alexandre II est un Tsar-libérateur, Nicolas Ier est un Tsar-législateur ».

Guennadi Sanine, docteur d’Etat en histoire et chargé de recherches à l’Institut de l’histoire de la Russie auprès de l’Académie des Sciences de Russie, ajoute que « les lois ne restaient pas sur le papier, l’Empereur savait les faire appliquer ». Irina Rouzhitskaïa a rappelé, à son tour, que « sous Nicolas Ier, les lois sur les sociétés anonymes [avaient] été adoptées pour la première fois en Europe et les lois sur le travail et la protection de l’environnement, pour la première fois en Russie ».

Pour le bien-être général

Irina Rouzhitskaïa reconnaît que « Nicolas Ier est loin d’avoir réalisé tout ses plans ». Mais elle souligne en même temps : « C’est sous son règne et sous sa direction que le concept de l’abolition du servage a été formulé et adopté. Par ailleurs, 1890 lois ont été signées qui facilitait la condition paysanne ».

Selon la thèse de Guennadi Sanine, « Nicolas Ier cherchait, dans ses activités, à mettre en pratique la théorie de l’Etat de bien-être général : chaque état contribue au bien-être du pays et ce dernier crée les conditions nécessaires au travail par le truchement des lois bien conçues ». « Nicolas Ier se positionnait comme continuateur de la politique de Pierre le Grand, son modèle, et il ne reconnaissait aucun autre système politique pour la Russie que l’autocratie. Il cherchait néanmoins à mettre son règne au service de l’Etat et de la société, comme il l’entendait », a ajouté l’historien.

Irina Rouzhitskaïa a mentionné les premiers chemins de fer construits sous Nicolas Ier en ajoutant: «C’était l’Etat qui finançait leur construction, d’où la lenteur des travaux». «Quant à la phrase célèbre du poète russe Nikolaï Nekrassov évoquant les «os russes» jonchant les bas-côtés le long du chemin de fer (de Moscou à Saint-Pétersbourg), il s’agit là d’une exagération. De nombreux serfs demandaient d’être envoyés construire ce chemin de fer, ils étaient rémunérés», a expliqué Irina Rouzhitskaïa.

Guennadi Sanine a fait tomber un autre mythe: «C’est complètement à tort que le règne de Nicolas Ier est considéré comme une sorte de stagnation. Le pays était en plein essor économique».

La défaite l’a tué

Il était impossible de passer sous silence les décabristes, la politique extérieure de Nicolas Ier et la guerre de Crimée.

Guennadi Sanine estime que « les représailles à l’égard des décabristes s’inscrivent dans les traditions de la Sainte-Alliance créée en Europe après la défaite de Napoléon Ier : toutes les révolutions devaient être étouffées dans l’œuf ». Irina Rouzhitskaïa rétorque : « Ce n’étaient pas des représailles, mais un châtiment. Les décabristes étaient des criminels politiques, ils voulaient renverser le gouvernement et assassiner le monarque. Ils ont été punis dans le cadre de la loi, sans aucun arbitraire ».

« En envoyant son armée à l’aide de l’Empereur d’Autriche pour écraser l’insurrection en Hongrie, il ne se positionnait pas en gendarme de l’Europe. Il n’a fait qu’obéir à son devoir d’allié », a poursuivi Irina Rouzhitskaïa. Guennadi Sanine a développé: « L’Autriche s’est montré ensuite particulièrement ingrate et Nicolas Ier a reconnu plus tard qu’il avait commis une erreur en laissant son armée sauver, de fait, l’Autriche ».

Guennadi Sanine est passé ensuite à la Guerre de Crimée. « Tout récemment encore, cette guerre était considérée comme injuste de la part de tous les participants. L’Angleterre et la France avaient joué un rôle expansionniste en Crimée et la Russie dans la Péninsule Balkanique. Toutefois, une nouvelle vision des choses a apparu selon laquelle Nicolas Ier aurait cherché à assurer la sécurité de ses frontières méridionales ce qui était nécessaire. Il n’aurait jamais songé à envahir Constantinople et les Détroits, il aurait seulement voulu les contrôler. Les autres pays européens ne pouvaient pas le lui permettre, car ils redoutaient le renforcement de la Russie ».

«La Russie a perdu la Guerre de Crimée et Nicolas Ier n’a pas survécut à la défaite», a fait remarqué Irina Rouzhitskaïa en concluant : «Les rumeurs de suicide sont toutefois infondées, il était profondément religieux et ne se le serait jamais permis. D’autre part, sa prétendue santé de fer était un mythe, il était sujet à toutes sortes de maladie et il est mort de pneumonie».

Ce texte n'engage que la responsabilité de l'auteur.

 

 

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