Les plans de l’OTAN : quelle guerre est plus réelle?

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Le journal britannique The Guardian, en poursuivant sa coopération avec le site Wikileaks, a rendu publics les détails de la stratégie de l’OTAN pour la défense des pays Baltes et de la Pologne contre une éventuelle frappe de la Russie.

Le journal britannique The Guardian, en poursuivant sa coopération avec le site Wikileaks, a rendu publics les détails de la stratégie de l’OTAN pour la défense des pays Baltes et de la Pologne contre une éventuelle frappe de la Russie. Conformément au document publié, 9 divisions américaines, allemandes, britanniques et polonaises, la marine et l’armée de l’air de l’OTAN doivent participer aux opérations militaires. Selon le journal, le plan a été élaboré en début 2010 sur l’initiative des Etats-Unis et de l’Allemagne. C’est le premier document de l’Alliance définissant un schéma concret d'actions en cas de guerre entre la Russie et les pays Baltes.

Qui  défendre et avec quels moyens?

Les Etats Baltes, qui ont adhéré à l’OTAN lors de la "cinquième expansion" de l’Alliance en 2005, ont toujours cherché et continuent à chercher à Bruxelles et à Washington une protection contre "l’agressivité de la Russie" . The Guardian fait remarquer que pendant que l’Allemagne et d’autres puissances de l’OTAN établissaient des relations étroites avec Moscou en qualifiant haut et fort la Russie de " partenaire" , les pays Baltes exigeaient une protection contre la " menace de l’Est" .

Ces exigences sont devenues d’autant plus fermes après la guerre de cinq jours au Caucase, lorsque la Russie et l’occident ont commencé à parler sérieusement de retour de la guerre froide. Sans cela, il existait déjà plusieurs contradictions entre la Russie et l’OTAN : de l’accord sur les forces militaires conventionnelles en Europe au système de défense antimissile (ABM). Mais le conflit en Ossétie du Sud était une raison valable d’élaborer un plan plus ou moins détaillé de défense de la Pologne et des pays Baltes contre le voisin oriental.

Parallèlement a débuté le déploiement en Pologne des systèmes américains de défense antiaérienne Patriot.

A vrai dire, l’action largement diffusée s’est avérée d’un geste symbolique, plutôt qu’un véritable soutien : selon les documents de Wikileaks, les militaires et les politiciens polonais étaient particulièrement déçus par le fait que les systèmes ne soient pas "exploitables et ne possèdent pas de munitions" . En fait, les systèmes ne peuvent être utilisés que pour des exercices.

Le plan de la défense des pays Baltes préparé en 2009 et adopté début 2010 était également symbolique. L’accord entre l’OTAN et la Russie, rendant un conflit armé en Europe très improbable, est le meilleur moyen de défense des pays Baltes.

Une menace hypothétique…

Il faut comprendre que l’élaboration de tels plans se poursuivra et en Russie, et au sein de l’OTAN. A titre de contrepoids aux plans de l’OTAN pour la défense des pays Baltes, les militaires russes élaboraient (et continuent de le faire) une stratégie d’élimination des systèmes de défense antimissile américains en Europe de l’Est, s’ils représentaient une menace pour la Russie. Le contenu exact de ces plans n’est pas connu : les documents militaires et diplomatiques russes de ce genre n’ont jamais été rendu publics. Mais on pourrait supposer qu’en cas de conflit entre la Russie et l’OTAN, les pays Baltes, la Pologne et, probablement, d’autres pays d’Europe de l’Est deviendraient une arène d'opérations militaires.

Mais tous ces plans sont élaborés en partant du principe  " se préparer au pire en espérant le meilleur" . Ni en Russie, ni au sein de l’OTAN, personne, au nom des intérêts gouvernementaux mal interprétés ou du messianisme hypertrophié, ne serait capable de déclencher une guerre qui aurait toutes les chances de conduire au suicide de la civilisation contemporaine.

Mais il existe une probabilité de voir a arriver au pouvoir de telles personnes, notamment pendant la crise, lorsque les mœurs radicales se renforcent. Bien sûr, John McCain aurait été peu susceptible de déclencher une guerre contre la Russie s’il avait  été élu président au lieu de Barack Obama, mais, sans aucun doute, la situation en Europe aurait pu devenir bien plus tendue.

…Et réelle

Afin d’empêcher cette menace hypothétique de devenir réelle, la Russie et l’OTAN doivent trouver un terrain d’entente pour s’opposer aux menaces réelles. Leur liste inclut la situation instable au Proche-Orient et en Asie centrale, le terrorisme, le trafic des stupéfiants, d'armes, la piraterie maritime, les catastrophes naturelles et techniques. Cela concerne également la prolifération des armements nucléaires et d’autres armes de destruction massive.

Ces menaces sont tout à fait réelles. Elles déterminent les actions de l’Alliance et de la Russie aujourd’hui. Les événements en Asie centrale au cours des 3-5 prochaines années détermineront la situation sur tout le continent Eurasiatique, et seules les actions conjointes de l’OTAN et de la Russie empêcheront l’expansion du conflit afghan dans la région.

Qu’est-ce qui est plus important?

La situation actuelle diffère de la guerre froide par sa contrôlabilité bien moindre. L’URSS (le Pacte de Varsovie) et les Etats-Unis (l’OTAN) pouvaient se concentrer sur les plans d’une grande guerre en utilisant les conflits régionaux en tant que moyen de pression et d’amélioration de leurs positions.

Mais avec le temps "le dragon a grandi" : les  "fronts de libération nationale" , les "mouvements pour une foi pure", etc., sont devenus de moins en moins contrôlables.

Après l’effondrement de l’URSS, le processus est devenu définitivement ingérable : l’un des deux principaux acteurs a perdu le contrôle de la situation. Aujourd’hui, les processus incontrôlables dans le Tiers monde représentent la principale menace à la stabilité de la planète dans l’ensemble. Ils dépassent largement en termes de réalisme la menace hypothétique d’une guerre entre l’OTAN et la Russie.

La rhétorique belliqueuse dans l’esprit de la guerre froide ne fait que détourner l’attention de Washington, de Bruxelles et de Moscou des affaires concrètes.

Ce texte n’engage pas la responsabilité de RIA Novosti

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