Hu Jintao et le dédoublement de la politique américaine

© RIA Novosti . Sergei Guneev  / Accéder à la base multimédiaHu Jintao
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Il aurait été plus normal de faire le bilan de la visite du président chinois Hu Jintao aux Etats-Unis samedi, après son déplacement à Chicago. Par ailleurs, la visite a coïncidé avec l’annonce que Chicago deviendrait le siège de la campagne électorale de Barack Obama en 2012.

Il aurait été plus normal de faire le bilan de la visite du président chinois Hu Jintao aux Etats-Unis samedi, après son déplacement à Chicago. Par ailleurs, la visite a coïncidé avec l’annonce que Chicago deviendrait le siège de la campagne électorale de Barack Obama en 2012. Ainsi, par sa visite Hu Jintao a en quelque sorte inauguré la seconde campagne électorale de Barack Obama.

Que dire de la visite de Hu Jintao, si ce n’est le fait qu’elle s'est distinguée par le nombre de portes fermées? Et que pratiquement aucune information n’a encore filtré?

Rien sur le problème coréen, alors qu'il figurait à la première place du programme, si ce n’est que Hu Jintao est préoccupé par les provocations de Pyongyang. Or, tout le monde est inquiet face à ces événements, et on connaît déjà le mécontentement de Pékin. Mais alors les actions de la Corée du Sud doivent susciter une égale inquiétude. A vrai dire, pendant la journée de l’entretien entre Barack Obama et Hu Jintao, Séoul a indiqué dans un message sa disposition à engager des négociations bilatérales avec la Corée du Nord (tandis qu’auparavant la Corée du Sud freinait toutes les démarches diplomatiques internationales).

Et on ne peut qu’essayer de deviner ce qu’il en est des autres points de l’ordre du jour américano-chinois. Hu Jintao est resté flou en s’exprimant au sujet du taux de change réel de yuan, et Barack Obama a fait de même en ce qui concerne l’impression des dollars, or c'est là le centre du débat entre les deux pays. Mais en y regardant de plus près, il y a plus d’évaluations d’experts que de discours directs des deux chefs d’Etat. Personne ne sait réellement sur quoi ils se sont entendus pendant les négociations. Et même l’entretien de Hu Jintao avec les représentants du Congrès américain s’est tenu à huit clos.

Que cela signifie-t-il? Il conviendrait probablement d’examiner de plus près l’atmosphère de la visite.

Croire au Père Noël

On a l’impression qu’aux yeux du public, l’interprétation des événements devrait la suivante: le leader maladroit et souriant d’un Etat voyou s’est rendu dans le pays-phare de la bonté pour y passer un examen difficile. Et s’il ne le réussissait pas, lui-même et la Chine en souffriraient.

L’épisode de la question des droits de l’Homme en Chine posée aux deux chefs d’Etat lors de la conférence de presse n'a pas manqué d'intérêt. Quel bonheur! Quelle joie! Littéralement, "ce fut un bon moment pour la presse américaine", écrit le Washington Post.

On lui a posé la question qu'il a tenté d'éluder. On la lui a reposée et il a dû admettre que la Chine avait encore beaucoup de choses à faire en termes de droits de l’Homme! Et c’est ce qui attend tout le monde!

Tout cela est remarquable pour tout le monde, sauf pour ceux qui suivent la discussion politique active en Chine sur les droits de l’Homme et la démocratie, ainsi que les réformes politiques, précisément sous l’administration de Hu Jintao. Le chef de l’Etat se prononce probablement rarement à ce sujet, mais en fait l’expression "beaucoup de choses restent à faire" est très habituelle pour la Chine.

Et ce qui a été dit lors de la rencontre du président chinois avec les congressistes, et surtout certaines déclarations des congressistes, mérite de figurer dans le bêtisier de l’année. Hu Jintao a été traité de "chef répressif", de "dictateur" et ils ont promis aux électeurs de le "contraindre par la force" s’il ne voulait pas agir en matière de taux de change.

Le plus drôle est que certaines de ces personnes y croient réellement, elles croient en une seule superpuissance américaine, aux "dictateurs" empêtrés dans la confusion, elles s'imaginent que les Etats-Unis peuvent réellement obliger la Chine à faire quelque chose… un conte de fée américain classique, même sans Père Noël.

La Russie ne devrait pas se moquer des Américains. Au milieu des années 1990, la grande époque de Catherine II (et de Pierre le Grand) est devenue très populaire, certains politiciens se sont réellement pris au jeu en menaçant la Turquie et en rappelant aux Européens l’époque où en Europe aucun canon ne tirait sans le consentement de la Russie. De toute évidence, certaines personnes ne peuvent pas faire autrement pendant les périodes de transition.

Hu Jintao et les cent Chinois

Mais le président chinois a visité un tout autre pays américain lors du dîner solennel donné en son honneur (rappelons que c’était une visite gouvernementale avec un dîner, une salve d’artillerie, etc.). Le principal événement était, bien sûr, la robe de soirée rouge de Michelle Obama. La seconde place du podium: toute une foule de célébrités américaines d’origine chinoise qui ont tenté à tout prix de s’y faire inviter. Les meilleurs ont réussi. Dont le ministre de l’Energie Steven Chu, le ministre du Commerce Gary Locke, le maire de San-Francisco Edwin Lee. Et bien sûr l'incontournable Jackie Chan. Ainsi que les dirigeants de Microsoft, de General Electric, d’Intel et de Dupont, mais ces derniers n'ont pas grand-chose de chinois.

Les résultats de la visite ont été annoncés lors de cette soirée et de quelques autres rencontres. Premièrement, il s’agit de l’ensemble de nouvelles commandes chinoises de productions américaines pour 45 milliards de dollars. Cela représente près de trois quart du commerce russo-chinois en 2010. Et comme l’a déclaré Barack Obama, cela représente plus de 250.000 nouveaux emplois.

Deuxièmement, lors de l’entretien avec les entrepreneurs, la question des conditions de travail du business américain en Chine a été soulevée. Hu Jintao a déclaré que des conditions préférentielles étaient prévues pour ceux qui apportaient de nouvelles technologies en Chine. S’ils se comportaient correctement.

Ils veulent mais ne peuvent pas

Le résultat global est donc le suivant: l'année de politique très incertaine suivie de l'année de politique rigide de Barack Obama à l’égard de la Chine a été un échec cuisant de sa politique étrangère. La visite actuelle a gelé d’une certaine manière la dégradation, mais n’a pas renforcé l'amitié américano-chinoise. Or, les deux pays ont épuisé les moyens de rester hostiles l'un envers l'autre, surtout compte tenu de l’annonce récente par Washington de la réduction des dépenses budgétaires de 2,5 mille milliards de dollars en dix ans. Et en raison de nombreux autres facteurs militaires et financiers.

Bien sûr, l’administration de Barack Obama est consciente qu’une telle politique étrangère, et pas seulement à l’égard de la Chine, est inefficace et faible. Mais les autorités américaines ne peuvent pas se permettre de mener une politique étrangère normale susceptible de mettre un terme au dédoublement de la politique des Etats-Unis. Et on ignore quand ils le pourront.

Ce texte n’engage pas la responsabilité de RIA Novosti.

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