Robert Gates remet la Libye entre les mains du peuple libyen

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Le ministre américain de la Défense Robert Gates, en visite à Moscou, a annoncé dans une déclaration sensationnelle à l'issue de son entretien avec son homologue russe Anatoli Serdioukov que: "les opérations militaires actuelles en Libye seront considérablement réduites d’ici quelques jours", que "l’avenir de la Libye est entre les mains du peuple libyen, et que c’est à lui de décider."

Le ministre américain de la Défense Robert Gates, en visite à Moscou, a annoncé dans une déclaration sensationnelle à l'issue de son entretien avec son homologue russe Anatoli Serdioukov que: "les opérations militaires actuelles en Libye seront considérablement réduites d’ici quelques jours", que "l’avenir de la Libye est entre les mains du peuple libyen, et que c’est à lui de décider." Le fait que cette déclaration ait été faite dans la capitale russe est certes une coïncidence. Mais même si ce n’est qu’une coïncidence, c’est un fait réjouissant. On se souvient immédiatement que Moscou n’a pas bloqué la résolution N°1973 du Conseil de sécurité des Nations Unies avant tout parce que les voisins arabes de la Libye en ont été les initiateurs. Mais la Russie ne l’a pas pour autant soutenue car beaucoup de choses restaient floues, à savoir notamment comment cette résolution serait utilisée, avant tout pas les Etats-Unis. Et voici le résultat. Les "exécutants" de la résolution abandonnent avec une rapidité surprenante leur entreprise qui a commencé à aller de travers.

La discussion avec le président

Mardi soir, Robert Gates a été accueilli par le président russe Dmitri Medvedev. En ce qui concerne la Libye, le thème abordé lundi concernant le fait que la Russie, dans le cas présent en la personne de Medvedev, était prête à une "mission de médiation dans le règlement pacifique du conflit libyen" a retenti avec une force inattendue lors de l’entretien. De plus, le président russe a exprimé son inquiétude quant à la manière dont est exécutée la résolution du Conseil de sécurité sur l’instauration d’une zone d’exclusion aérienne, et s'est dit préoccupé par le fait que l’utilisation aveugle de l’aviation pouvait entraîner des victimes civiles, selon le service de presse du président russe. Et la question d’une participation quelconque de Moscou aux actions de la coalition contre la Libye "n’a même pas été abordée", poursuit le service de presse.

Et tout irait bien en l’absence du principal thème de la discussion (d’un litige en réalité) actuelle entre Moscou et Washington, et entre Moscou et l’Occident dans l’ensemble, à savoir le système de défense antimissile (ABM) européen. En omettant les détails techniques, la Russie propose effectivement un ABM commun contre les menaces extérieures contre l’espace paneuropéen. Et pour l’instant la réponse n’est pas très encourageante: il y aura "là" un ABM distinct qui pourrait facilement être dirigé contre la Russie. Et la visite du ministre américain de la Défense, en mettant de côté le thème libyen, devait précisément faire la lumière sur le thème de l’ABM.

Qu’en est-il donc? Rien de bon. Si, comme le déclare le service de presse présidentiel, "Dmitri Medvedev a une nouvelle fois exposé la position de la Russie exprimée lors du sommet Russie-OTAN à Lisbonne en automne dernier", il n’est pas difficile de tirer une conclusion.

 

Washington entre action et inaction

Mais revenons à la Libye et au rôle de la Russie dans cette affaire. Quelle est l’opinion de la société américaine au sujet des événements autour de la Libye? Mais c'est qu’il est préférable de donner la parole aux collègues du Washington Post sans commentaires.

"Après une seule journée d’opérations, le chef d’état-major interarmées de l’armée américaine l’amiral Mickael Mullen épuisé apparaît dans toutes les émissions, à l’exception d'Animal Planet, pour dire que l’opération qu’il n’approuvait manifestement pas pourrait se terminer ainsi: le colonel Kadhafi, dont le président américain a dit qu’il devait partir, pourrait rester au pouvoir… La Libye doit être et demeurer une mission humanitaire et il serait préférable que cette tâche soit assumée par une administration [américaine] unie qui… pourrait avancer des arguments pour ne pas s’engager dans cette affaire ou, au contraire, s’y impliquer. Au lieu de cela, l’administration avance à la fois les arguments contradictoires, pour et contre."

C’était le célèbre chroniqueur Richard Cohen.

En voici d’autres: "les objectifs américains de guerre sont indissociables de… la destruction de ce régime. Ainsi notre but est de créer un vide politique qui, on l'espère…, sera rempli de bonnes choses. Mais si les rebelles n’arrivaient pas à vaincre Kadhafi, serions-nous prêts à compenser leur insuffisance militaire par nos fournitures? Et si la décapitation du régime du colonel libyen avait le même effet que l’élimination de Saddam Hussein, c’est-à-dire un chaos sanglant, quelles seraient nos obligations en cas de vendettas tribales que nous aurions probablement nous-mêmes provoquées?"

C’était George Will, un autre chroniqueur tout aussi réputé.

En fait, la rapidité avec laquelle la décision a été prise de stopper la guerre suscite le respect. Bien sûr, il sera annoncé que seule la partie "active" de l’opération est terminée, qu’une partie passive aura également lieu, et que tout était prévu exactement de cette manière (bombarder moins d’une semaine), et beaucoup d’autres choses seront encore dites. Mais globalement tout est clair. Sauf que d'ici le retour de Gates à Washington, la position des Etats-Unis pourrait encore changer.

Une difficile amitié

Personne ne s’attendait à ce que la visite d’adieu de Robert Gates en Russie, avant son départ du poste de Secrétaire à la Défense, apporte une contribution décisive à l’amélioration évidente des relations russo-américaines. Ce n’est qu’une partie du processus. Bien que la configuration de la coopération entre les deux pays au sujet de l’ABM soit une chose sérieuse. La discussion n’est pas terminée, et les leçons de "l’odyssée" libyenne (lorsqu’elle sera terminée) donneront sans doute aux deux pays la possibilité de réévaluer certaines choses.

Or, l’appel de Gates lancé à Saint-Pétersbourg à réfléchir sous quelle forme les militaires russes pourraient participer aux "coalitions internationales" est une chose sérieuse dans le contexte du chaos actuel autour de la Libye. Et aussi compte tenu de sa déclaration sur la nécessité de stopper prochainement ce chaos. En effet, sous quelle forme, forte de l'exemple libyen, la Russie pourrait-elle participer à de telles coalitions? C'est une question qui mérite réflexion.

Ce texte n’engage pas la responsabilité de RIA Novosti.

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