Le problème des Tsiganes mobilise l'attention de l'UE

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168 participants à la manifestation, qui s’est transformée en émeute, suite à l’incident criminel impliquant l’entourage du "baron tsigane" local, sont toujours détenus en Bulgarie.

168 participants à la manifestation, qui s’est transformée en émeute, suite à l’incident criminel impliquant l’entourage du "baron tsigane" local, sont toujours détenus en Bulgarie. La nuit de violences à Sofia, Plovdiv et 12 autres villes bulgares a une nouvelle fois mis en évidence le problème irrésolu de la minorité tsigane touchant plusieurs pays d’Europe centrale qui l’ont exporté en adhérant à l’UE.

Les émeutes n’ont nullement surpris la population bulgare. Dès 2002, Plovdiv (deuxième plus grande ville bulgare devenue le centre des actions de protestations au cours des derniers jours) avait été le théâtre d'une véritable révolte nationaliste, avec tous ses attributs: vitrines brisées, voitures incendiées et agressions contre des policiers.

Toutefois, à l’époque ce ne sont pas les Bulgares, mais les Tsiganes qui ont protesté. Le fait est qu’à l’époque les autorités locales ont coupé l’électricité dans leur quartier. Le motif était purement économique: les résidents du quartier tsigane de Stolipinovo ne payaient pas les services publics depuis 12 ans, et avaient accumulé une dette de 2,5 millions de dollars.

Les Bulgares, connus pour leur tolérance relative dans cette région traditionnellement à risque du sud-est de l’Europe, affirment que les protestations ne sont pas dirigées contre les Tsiganes, mais contre la criminalité. Ce que soulignent les habitants du village de Katunitsa, près de Plovdiv, où se trouve la villa du "roi Kiro": le baron tsigane Kiril Rachkov. Les membres de son entourage ont percuté le 23 septembre Angel Petrov, un autochtone, décédé par la suite.

Les habitants de Katunitsa, qui ont organisé après l’incident une manifestation devant la villa de Rachkov, exigeaient selon eux le départ du "baron" avec sa famille, et non pas de tous les Tsiganes. Mais comme c’est souvent le cas, les protestations ont rapidement dégénéré en affrontements avec des cocktails Molotov, puis les supporters de football et d’autres groupes de jeunes ont propagé la flambée de protestation dans d’autres villes bulgares.

Les représentants de la Commission européennes, qui ont exprimé leur inquiétude face à ces événements, proposent un ensemble habituel de mesures: mettre un terme à discrimination frappant les quelque 10-12 millions de Tsiganes vivant en Europe, scolariser plus activement les enfants tsiganes, ne pas stigmatiser les familles tsiganes nombreuses mais, au contraire, leur offrir des allocations sociales.

"Trop peu de choses ont changé dans la vie des Tsiganes au cours des dernières années. Les pays membres de l’Union européenne doivent cesser d’exclure les Roms de la vie sociale, a déclaré Viviane Reding, commissaire européenne à la justice, aux droits fondamentaux et à la citoyenneté. Il s'agit des discriminations frappant les Roms dans les établissements scolaires, dans le domaine de l'emploi, de la médecine et de l'accès au logement."

Les représentants des gouvernements nationaux et de l'opinion publique accusent la Commission européenne d'être déconnectée des réalités de la vie, en indiquant que depuis l’effondrement du communisme beaucoup de choses ont changé, en pire, dans la vie des tsiganes d’Europe de l’Est. "A l'époque du communisme, les familles tsiganes devaient envoyer leurs enfants à l’école. De plus, toute la population bulgare, y compris les Tsiganes, devait travailler, fait remarquer Georgi Georgiev, commentateur politique du plus grand quotidien bulgare Duma. Après 1989, toutes ces exigences ont été levées comme portant atteinte aux droits de l’homme. Les "quotas tsiganes" dans les universités ont été également annulés. Finalement, les Tsiganes ont cessé de travailler et d’étudier, et leur niveau de vie a commencé à chuter."

Auparavant, le niveau de vie des Tsiganes en Bulgarie, en Roumanie, en République tchèque et en Slovaquie étaient également inférieur à celui de la population autochtone. Et dans les années 1990 et 2000 il a commencé à chuter significativement. Et l’ouverture des frontières dans le cadre des Accords de Schengen, qui a permis la libre circulation des ressortissants tsiganes pauvres du sud-est de l’Europe, a conduit en 2010 à la première crise grave dans l’espace commun de l’UE. Le gouvernement français, malgré les objections de la Commission européenne, a exigé à l’époque le départ des campements de Roms de son territoire.

La Roumanie, qui entretient des liens étroits avec la France depuis longtemps, a été indignée par le comportement de ses concitoyens sur le territoire français. Le président roumain Trajan Basescu a même qualifié d’énorme erreur l’introduction en 1995 dans le pays du terme politiquement correct de Roms, qui se nomment ainsi, pour désigner les Tsiganes. Selon le président, ce terme pourrait inciter le monde à identifier les Tsiganes à la Roumanie en raison de la similitude des sonorités.

En République tchèque, dans la ville d’Usti nad Labem dans les années 1990 a été construit un mur de 150 mètres appelé à séparer les habitants de la minorité tsigane bruyante. En raison du scandale international provoqué par cette mesure, il a fallu abattre le mur. Le Slovaque Jan Slota, homme politique d’extrême droite, est connu pour avoir déclaré que les Tsiganes feraient mieux de partir dans un pays spécialement créé pour eux.

La presse en République tchèque, en Slovaquie, en Roumanie, en Hongrie, en Bulgarie et d’autres pays que l’UE a chargé de prendre soin de leurs Tsiganes, souligne le caractère contradictoire des exigences de Bruxelles. Il est proposé d’intégrer les Roms dans la vie moderne mais on exige de le faire avec des méthodes souples et politiquement correctes.

"La communauté tsigane qui s’appauvrit est une bombe à retardement dans l’Europe entière, écrit Georgi Georgiev dans Duma. L’Union européenne prononce des discours grandiloquents mais ne propose pas de solutions réelles. On semble avoir à nouveau atterri dans le bloc soviétique, lorsque les beaux slogans n’avaient rien à voir avec la réalité."

Le parti des Citoyens pour le développement européen de la Bulgarie (GERB) est actuellement au pouvoir dans le pays. L’incapacité évidente de l’Union européenne à proposer une solution réelle du problème irrite beaucoup de Bulgares et pourrait coûter cher au GERB aux élections municipales et à la présidentielle, prévue pour le 23 octobre.

La coalition du GERB a propulsé au pouvoir le premier ministre actuel Boïko Borisov qui n’est pas particulièrement apprécié au Kremlin en raison de la longue hésitation concernant le projet du gazoduc South Stream et de l’échec du projet du gazoduc Burgas-Alexandroupolis.

L’opinion de l’auteur ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction

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