Le gaz russe pour la Chine en échange de la modernisation

© RIA Novosti . Alexei Druzhinin / Accéder à la base multimédiaLa visite du premier ministre russe Vladimir Poutine à Pékin
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Le résultat majeur de la visite du premier ministre russe Vladimir Poutine à Pékin a été non seulement l'entente sur l'approvisionnement de la Chine en hydrocarbures russes, mais également la future alliance technologique de modernisation entre la Chine et la Russie.

Le résultat majeur de la visite du premier ministre russe Vladimir Poutine à Pékin, qui s’est terminée mercredi, a été non seulement l'entente sur l'approvisionnement de la Chine en hydrocarbures russes, mais également la future alliance technologique de modernisation entre la Chine et la Russie.

La construction aéronautique, les nanotechnologies, les biotechnologies, l’informatique et la médecine sont les domaines énumérés par Vladimir Poutine à l’issue de sa visite de travail de deux jours dans la capitale chinoise. Cela concerne également la nouvelle tendance (tant attendue): le progrès économique et surtout politique dans les relations bilatérales.

La formule du prix

A la veille de la visite de Vladimir Poutine à Pékin, on savait déjà qu’il ne fallait pas s’attendre à la fin des négociations sur les fournitures à long terme de gaz russe en Chine. Ainsi, la phrase du premier ministre russe disant que les deux pays "sont proches de la ligne d'arrivée" des négociations gazières est une agréable surprise. De même que l’accord avec Pékin sur le pétrole qui coule déjà dans l’oléoduc Sibérie orientale - océan Pacifique (la Chine avait décidé d’"ajuster" unilatéralement le prix et payait moins cher, ce qui a poussé le géant pétrolier russe Transneft à l’idée de rompre tous les contrats et ester auprès de la Cour d’arbitrage internationale de Londres).

La discussion russo-chinoise autour du prix du gaz, qu’il est prévu de fournir à la Chine durant les trois prochaines décennies, ne se réduit pas du tout à la capacité de "se rencontrer au milieu du chemin." Au milieu, on pouvait seulement tracer une limite sur le fleuve Amour, d’autant plus que cette artère fluviale était probablement la seule anomalie du monde: une seule des rives mais toutes les eaux appartenaient à l’URSS, puis à la Russie. Généralement, les fleuves sont partagés en deux en suivant le chenal. Ainsi, dans les négociations qui ont définitivement réglé il y a 6 ans toutes les questions territoriales entre les deux grands pays, l’issue était connue à l’avance. Mais dans le cas du gaz la situation est plus compliquée.

Dans les déclarations officieuses sur le litige concernant le prix du gaz on mentionnait une fourchette entre 350 et 250 dollars les mille mètres cubes. Et peu importe la capacité des Chinois à négocier jusqu’au bout puis un peu plus encore, à première vue il n’est pas si difficile de se rencontrer au milieu.

Mais il est question de la fourniture de 68 milliards de mètres cubes de gaz par an (30 milliards de mètres cubes par l’itinéraire occidental, dont l’acheminement est prévu à partir de 2015, et 38 milliards par l’itinéraire oriental) pendant 30 ans. Aucun contrat énergétique de ce genre n’a encore été signé dans le monde. Il n’est donc pas étonnant que les négociations durent depuis près de 5 ans, et se poursuivront encore pendant quelque temps.

Mais comment est-il possible de fixer non pas le prix, mais la formule du prix pour les 30 ans à venir? Aujourd’hui, la Chine pourrait mettre dans le même panier le prix du gaz turkmène et autres, ainsi que le prix auquel Moscou s’efforce de vendre le gaz à l’Europe, et tout cela associé aux prix du gaz liquéfié et aux intentions des Européens de se libérer de la "dépendance au gaz russe." Mais comment exprimer cette formule du prix à l’époque de la crise financière, lorsqu’on ignore ce que vaudront le dollar et l’euro dans un an? Peut-être le prix devrait-il être calculé en sacs de riz?

Moscou et Pékin partagent l’idéologie de la "stabilité énergétique mondiale", qui consiste à libérer les prix des hydrocarbures de l’incertitude du marché et passer à la stratégie des fournitures stables et prévisibles.

La Russie a même fait de cette idée le thème clé du sommet du G8 à Saint-Pétersbourg en 2006. A l’époque, les partenaires ont signé la déclaration, mais l’ont oubliée avec le temps. La Chine pense différemment. Dans l’ensemble il est clair que cette idée est bonne. Mais lorsqu’on commence à y regarder de plus près, elle devient très floue.

La réalité de la modernisation

Parmi les nombreux documents signés cette fois à Pékin, figure le mémorandum final sur la coopération de modernisation qui élève la coopération économique entre les deux pays au niveau de la politique globale.

C’est une bonne nouvelle. Pour commencer, on voit bien que Moscou a finalement récolté les fruits de ses efforts accomplis pour corriger la tendance "coloniale" dans son commerce avec le partenaire économique numéro un (cette année, comme Vladimir Poutine l’a confirmé à Pékin, les échanges commerciaux pourraient atteindre 70 milliards de dollars). Le côté "colonial" est dû au fait que la Russie approvisionne la Chine en matières premières et reçoit en échange des produits de haute technologie. Tapez dans un moteur de recherche "fabriqué en Chine", et il ne vous proposera pas seulement le thé, mais également des voitures, des iPhones et ainsi de suite. Telle est la réalité de nos deux économies.

Je ne puis m'empêcher de citer un récent commentaire concernant le thème clé de toute la présidence de Dmitri Medvedev: "En ce qui concerne la politique occidentale de la Russie, c’est-à-dire ses relations avec l’UE et les Etats-Unis, le sens de "l’alliance de modernisation" proposée par Moscou est clairement politique… nous coopérons dans le cadre de la modernisation technologique de l’économie russe, qui sera forcément suivie par la modernisation politique (mais pas l’inverse). C’est donc une bonne proposition, dans l’ensemble."

Les forces libérales russes, enclines aux illusions dans la politique étrangère, ont immédiatement chargé cette simple formule de l’alliance d'un grand nombre de significations supplémentaires. Il s’agirait d’un tournant décisif de Moscou vers l’Occident, au grand dam des despotes orientaux, et il ne saurait en être autrement, car toutes les ressources de modernisation se trouvent exclusivement aux Etats-Unis et en Union européenne.

Or, il serait très étrange d'effectuer ce "tournant" au moment où l’Occident lui-même se tourne vers l’Orient, lorsqu’on constate que le potentiel de modernisation, ainsi que de nombreuses autres ressources se déplacent de plus en plus là où se développent rapidement les nouvelles puissances."

Comme on peut le voir, les particularités économiques de la coopération entre la Russie et la Chine ne sont pas toujours réjouissantes, mais elles sont forcément utiles à la modernisation russe.

L’opinion de l’auteur ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction

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