18e Congrès du PC chinois: mesures de sécurité sans précédent

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Le plus grand événement politique de la Chine contemporaine, le 18e Congrès du Parti communiste, se déroulera dans des conditions de sécurité renforcées et à un niveau de confidentialité tout aussi élevé.

Le plus grand événement politique de la Chine contemporaine, le 18e Congrès du Parti communiste, qui est appelé à approuver le transfert du pouvoir à une nouvelle génération de dirigeants, se déroulera dans des conditions de sécurité renforcées et à un niveau de confidentialité tout aussi élevé.

La terre, le ciel et internet sous contrôle

L'inauguration solennelle du congrès a eu lieu dans la matinée du 8 novembre mais déjà, à quelques jours de l’événement, des policiers en uniforme et en civil avaient été dispersés partout dans le pays pour veiller au respect de l'ordre public.

La plus grande place du monde, Tiananmen, a été fermée à partir du 7 novembre. La Chambre des représentants, où se réunissent chaque année en mars les députés chinois pendant deux semaines, se trouve dans la partie ouest de la place: c’est là que s’est ouvert le congrès des communistes chinois, le jeudi 8 novembre. Des gardes ont été disposés tous les 20-30 mètres sur tout le périmètre de la place et dans l'avenue Changan qui la traverse. Les arrêts de bus, quant à eux, ont été bloqués par des grilles dotées de passages étroits que les passagers doivent emprunter.

Comme le prescrivent les normes de sécurité urbaines adoptées d'urgence pour le congrès, les pigeons appartenant aux propriétaires de pigeonniers ont cessé de voler dans le ciel de la capitale.
Il est également déconseillé de lancer tout objet volant comme les hélicoptères radiocommandés ou même les cerfs-volants. Les vitres des taxis ont été bloquées afin d'empêcher les passagers de les ouvrir pour commettre un acte de provocation.

La circulation est régulièrement bloquée dans les rues de Pékin pour libérer le passage aux bus de délégués du congrès ou autres Audi noires du personnel du parti. On dit que les restrictions, pour les voitures, seront encore plus strictes pendant le congrès.

Il est d’ailleurs "officieusement recommandé" aux conducteurs de se rendre le moins possible au centre-ville.

Le nombre de touristes chinois d'autres régions a significativement diminué et les policiers vérifient les papiers des étrangers. Ces jours-ci, il leur est fortement conseillé de toujours conserver leur passeport sur eux.

18e Congrès du PCC et Sparte

Le contrôle du web a été particulièrement renforcé, notamment sur les réseaux sociaux. Tous les commentaires et communiqués sur le thème du congrès tombent sous le contrôle de modérateurs et sont immédiatement censurés, ne mentionneraient-ils qu’une allusion à l'incivisme.

Ces derniers temps, le terme "Shibada" (XVIIIème Congrès) est remplacé, dans les commentaires des blogueurs, par un terme presque homonyme mais qui s'écrit en chinois de façon complètement différente – Sibada, c'est-à-dire Sparte. Ainsi, un lecteur non averti pourrait être surpris et impressionné par les discussions passionnantes des Chinois sur les événements à "Sparte" et les agissements des "Spartiates".

Bienvenue aux journalistes

Un casse-tête original attend les journalistes venus à Pékin pour la couverture de cet événement. Un magnifique centre de presse avec internet, café, thé, fruits et croissants gratuits a été mis à leur disposition. Ce même centre de presse délivre les cartes d'accréditation permettant de travailler pendant le congrès. Mais il faut déjà entrer dans les lieux et pour ce faire, chaque journaliste doit passer un contrôle de sécurité en plusieurs étapes et présenter sa carte d’accréditation… qu’il n’a pas encore obtenue.

Ceux qui ignorent les réalités des mesures de sécurité sont plus que confus. La solution est simple : il faut préalablement appeler le centre de presse et demander à un représentant de vous apporter la carte en dehors du cordon de sécurité.

Le personnel a du faire de nombreux aller-retour pour apporter ces cartes: officiellement, 2 732 journalistes chinois et étrangers ont été accrédités pour l’événement – 40% de plus par rapport au précédent congrès du PC chinois.

Comme la déclaré le porte-parole du congrès, Cai Mingzhao, pendant une conférence de presse le 7 novembre, les organisateurs cherchaient à rendre les lieux accessibles facilement à la presse. Les journalistes, installés sur des balcons à trois niveaux, peuvent entendre en direct le rapport du secrétaire général du PC Hu Jintao, ainsi qu'assister aux cérémonies d'ouverture et de fermeture du congrès.

Certaines délégations de parti, réunies pour discuter le rapport du secrétaire général, seront également ouvertes à la presse. Des conférences de presse de hauts fonctionnaires de premier rang seront régulièrement organisées sur le thème de la structure du parti ou encore du développement socioéconomique et culturel de la Chine.

La majorité des journalistes représentent des pays émergents d'Afrique, du Moyen-Orient ou d'Amérique du Sud. Selon des informations officieuses, les frais de séjour à Pékin des journalistes des pays les plus pauvres ont été pris en charge par la Chine.

Les secrets de la cour de Pékin

Hormis les mesures de sécurité sans précédant, les congrès du PC chinois se caractérisent par une confidentialité élevée. Ces deux particularités datent de la première décennie d'existence du parti communiste, alors que les congrès des pères-fondateurs se déroulaient tantôt à Shanghai, tantôt à Guangzhou, tantôt à Wuhan, voire à Moscou en raison du risque de persécution par les autorités officielles.

Ce risque de persécution n'existe plus depuis longtemps mais les traditions demeurent.

Pour cette raison, toutes les informations, y compris officielles, sont données au compte-gouttes.

A la veille du congrès, personne ne pouvait officiellement annoncer la composition du futur Comité permanent du Politburo au Comité central du PC chinois – organisme suprême du parti et du pays. Et jusqu'au dernier moment, même le nom du porte-parole officiel du congrès était caché – c’est lui qui a tenu la principale conférence de presse avant l’événement.

Seulement deux heures avant le début de cette rencontre avec la presse, le nom de Cai Mingzhao a été annoncé : il est l’ancien vice-directeur du service de propagande du PC, actuellement rédacteur en chef du Quotidien du peuple, plus grand holding médiatique du parti. 3 ou 4 heures avant cela, un haut représentant du centre de presse refusait de donner son nom dans une conversation privée avec RIA Novosti : "Attendez l'information officielle, on ne peut rien dire pour l'instant".

On sait que le congrès adoptera des amendements aux statuts du parti mais on ignore quels seront exactement ces changements, bien qu'ils soient déjà approuvés par le Politburo et le Comité central. Selon certaines versions, il pourrait s'agir d'une limitation formelle de la durée du mandat du secrétaire général du Comité central à deux quinquennats, de la restriction du nombre de membres du Comité permanent du Politburo, ainsi que de l'abandon des "principes de Mao Zedong en tant que base idéologique".

Pendant la conférence de presse, Cai Mingzhao a fait remarquer que lesdits amendements incluraient de "nouvelles explications de la théorie du développement scientifique".

Le rapport du secrétaire général

Dans ces conditions, les politologues spécialisés suggèrent de prêter attention au ton du rapport de Hu Jintao et aux discussions qui suivront. Si le secrétaire général venait à évoquer les "quatre principes fondamentaux" de Mao Zedong, cela signifierait que le gouvernement est réticent aux réformes politiques. L'utilisation fréquente de cette expression impliquerait le renforcement des conditions de la vie politique.

Une preuve de cette disposition réactionnaire serait également l'évocation de la thèse de la préservation de la stabilité, en parallèle avec les "quatre principes fondamentaux". Au contraire, la présence, dans le rapport, de l'expression introduite par le futur secrétaire général Xi Jinping-"le pouvoir est donné par le peuple"-, illustrerait la volonté de poursuivre les réformes.

Dans les conditions d'une telle confidentialité, les hauts fonctionnaires chinois ont souvent recours à la méthode des "fuites" d'informations à divers médias, en général occidentaux. Par exemple, l'article sur les richesses de la famille du premier ministre Wen Jiabao dans le New York Times est considéré comme ce genre de "fuites". De cette façon, les adversaires de Wen Jiabao souhaiteraient ainsi empêcher son protégé d'arriver au sommet du pouvoir.

Toutefois, l'abondance de rumeurs n'empêchera pas le congrès de "s'ouvrir triomphalement", comme le prônent les slogans dans les rues de Pékin. Et le nouveau Comité permanent du Politburo au Comité central du PCC, composé de neuf personnes - sept selon certaines informations –, accueillera les journalistes dans une semaine, a officiellement promis Cai Mingzhao.

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