L'arme chimique syrienne hante l'Occident

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Depuis le début du conflit entre l'administration de Bachar al-Assad et l'opposition, les arsenaux chimiques syriens hantent les pays occidentaux.

Depuis le début du conflit entre l'administration de Bachar al-Assad et l'opposition, les arsenaux chimiques syriens hantent les pays occidentaux. De temps à autre, la presse publie des communiqués suggérant que le gouvernement syrien "pourrait utiliser l'arme chimique contre la population", mais que "l'Occident cherche à l'en empêcher".

Mais que cachent ces annonces de la presse – la volonté de faire pression sur Damas ou la préparation d'une invasion étrangère ?

Les avertissements du renseignement américain


Les autorités américaines ont officiellement averti mardi le gouvernement syrien qu'il devrait répondre de ses actes s'il utilisait l'arme chimique contre son peuple. "Si vous commettez l'erreur tragique d'utiliser ces armes, il y aura des conséquences et vous en répondrez", a tancé Barack Obama, s’adressant au président syrien Bachar al-Assad lors d'un symposium à Washington, réuni pour le 20ème anniversaire du programme américain de désarmement Nunn-Lugar.

Le président a été poussé à faire une déclaration aussi ferme car les services de renseignement américains et moyen-orientaux soulignent que les autorités syriennes auraient commencé à se préparer pour la production du gaz de sarin. "Nous détenons des informations qui nous donnent des raisons de croire que les autorités syriennes mélangent des précurseurs chimiques", témoigne un agent anonyme.

De plus, la chaîne CNN a rapporté que selon Washington, le gouvernement syrien étudiait la possibilité de doter d'ogives chimiques les munitions d'artillerie, afin de bombarder l'opposition armée.

Plus tôt, les renseignements occidentaux avaient déclaré que les autorités syriennes disposaient de stocks d'armes chimiques et de produits de fabrication à travers 20 villes du pays, afin d'assurer sa sécurité et d’empêcher ces armes mortelles d'atterrir entre les mains des terroristes. Les renseignements américains ajoutent que la Syrie dispose de plusieurs tonnes d'armes chimiques et d’éléments de conception.

Damas n'a pas signé la Convention internationale sur l'interdiction des armes chimiques et aucune information n’est donc disponible sur son arsenal. Cependant, les experts estiment qu'il fait partie des plus importants du monde arabe.

La réponse syrienne

La réaction de Damas a été plutôt rapide. Le ministère des Affaires étrangères a déclaré qu'en aucun cas, la Syrie n'utiliserait l'arme chimique contre son peuple. Une source du ministère des Affaires étrangères (MAE) affirme que les autorités syriennes ne combattent pas les Syriens mais les "terroristes de mèche avec Al-Qaïda, soutenus par les pays qu'on connaît sous l'égide des Etats-Unis".

Le MAE syrien a rappelé que l'accusation d'un régime indésirable pour les USA - car détenant l’arme chimique – avait déjà été formulée en Irak, où les rumeurs sur la présence d'armes de destruction massive avait servi de prétexte pour envahir le pays.

D'ailleurs en juillet dernier, quand l'Occident a soulevé le thème de l'arme chimique syrienne une nouvelle fois, le porte-parole du MAE syrien a déclaré que son pays pourrait l’utiliser en cas d'intervention militaire étrangère.

Comment les arsenaux chimiques sont protégés

Les réserves considérables d'armes chimiques à disposition de Damas sont pour l'instant très bien gardées, en dépit des événements dans le pays. Selon certaines informations, d'autres pays, y compris Israël et les Etats-Unis, l'assistent même dans cette tâche.

Malgré la rhétorique belliqueuse de Washington envers Damas, les Américains sont parfaitement conscients de ce qui pourrait se produire si les arsenaux syriens se retrouvaient entre les mains des terroristes. Avant tout, une attaque pourrait être perpétrée contre les USA – si ce n'est pas sur le territoire national, alors contre ses représentations diplomatiques au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, voire dans d'autres régions.

De plus, Israël se retrouverait également en danger. Ni Washington ni Tel-Aviv ne pourraient le tolérer. C'est précisément ce dont parlait Obama cet été : "Ce problème ne concerne pas seulement la Syrie. Il concerne nos alliés proches dans la région, dont Israël. Il nous concerne".

La répétition du scénario irakien ?

L'été dernier, la presse britannique a annoncé que les représentants américains, turcs, israéliens et jordaniens étaient en consultation pour préparer un plan d'action commun visant à neutraliser les arsenaux chimiques syriens, allant jusqu'à la projection de forces spéciales sur le sol syrien.

Cependant, comme les réserves d'armes chimiques sont dispersées à travers la Syrie, leur capture nécessitera un grand nombre de militaires. Certains analystes parlent d'au moins 75 000 soldats. Une telle intrusion ne serait rien d'autre qu'une intervention.

Les Américains n'oseront certainement pas le faire sans l'autorisation du Conseil de sécurité des Nations unies. Par ailleurs, après les événements tristement célèbres d’Irak et de Libye, certains membres du Conseil pourraient s'opposer à l'invasion d'un Etat souverain qui se transformerait en un immense foyer d'instabilité dans la région.

Et les Américains eux-mêmes ne voudront pas être la risée de la communauté internationale en présentant au Conseil des photos de "laboratoires chimiques mobiles", des éprouvettes avec de "l'anthrax" et d'autres "preuves" appelées à confirmer les plans criminels du pays, comme ils l'ont fait avant l'invasion de l'Irak pour renverser le dictateur irakien Saddam Hussein.

Il est parfaitement clair que pour l'instant, les rebelles syriens sont incapables de vaincre les troupes gouvernementales, même avec une aide extérieure. La désunion, l'incapacité à s'entendre et le refus catégorique de négocier avec le président Assad et ses partisans gênent énormément l'opposition.

Cependant, les forces d'Assad et de son équipe s'épuisent. Tôt ou tard, le gouvernement actuel tombera, ce n'est qu'une question de temps. Et l'Occident  se penchera alors davantage sur la question de savoir qui protège les stocks d'armes chimiques et qui mettra la main dessus.

L’opinion de l’auteur ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction.

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