Le discours de Nicolas Sarkozy mal compris en Russie (Izvestia)

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MOSCOU, 4 septembre - RIA Novosti. Les propos du président français adressées à la Russie dans son récent discours devant les ambassadeurs ont suscité une panique sans précédent dans les médias russes. Certains d'entre eux se sont indignés contre le "tournant inattendu" opéré par Paris dans sa politique étrangère qui cesse de privilégier les "rapports de partenariat" avec Moscou pour préférer l'"alliance stratégique" avec Washington. On est allé jusqu'à affirmer que "la France a trompé la Russie en se rapprochant de l'Amérique".

Voyons, de quel adultère peut-il être question? Nous n'avons même pas été "fiancés". La "troïka" avec Jacques Chirac et Gerhard Schröder était informelle et il était impossible de l'officialiser. Quant au penchant stratégique pour les Etats-Unis, il a toujours été la pierre angulaire de la politique étrangère foncièrement pro-atlantique de Paris sous tous les prédécesseurs de Nicolas Sarkozy, à commencer par Charles de Gaulle.

En ce qui concerne notre pays, effectivement, il est loin d'être le premier sur la liste des priorités de l'Elysée. Du point de vue de l'approche pragmatique, le réaliste Nicolas Sarkozy attache actuellement une plus grande importance à l'Europe, aux Etats-Unis, à la Méditerranée et à l'Afrique : les axes traditionnels de la diplomatie française. Mais Paris n'a nullement l'intention de se quereller avec Moscou. Chez nous, on cite un extrait impartial du discours du président français : "La Russie impose son retour sur la scène mondiale en jouant avec une certaine brutalité de ses atouts, notamment pétroliers et gaziers, alors que le monde, l'Europe, en particulier, espère d'elle une contribution importante et positive au règlement des problèmes de notre époque que son statut retrouvé justifie". Mais cette citation est détachée du contexte.

Avant celle-ci, l'"atlantiste" Nicolas Sarkozy a déclaré littéralement ce qui suit : "Les Etats-Unis n'ont pas su résister à la tentation du recours unilatéral à la force et ne démontrent malheureusement pas, dans la protection de l'environnement, cette capacité de leadership qu'ils revendiquent par ailleurs". Ce qui permet de juger de "Nic le pro-américain"! D'ailleurs, il a également critiqué les appétits géopolitiques de la Chine.

Toutes les trois mentions des grandes puissances du monde, y compris la Russie, illustrent la thèse de Nicolas Sarkozy, selon laquelle la nouvelle "multipolarité" apparue depuis 17 ans n'est pas efficace pour le règlement des problèmes globaux à cause des ambitions des plus forts. A propos, il qualifie la Russie de superpuissance. Quant à la France, de même que l'Europe, elle doit réunir tout le monde au sein d'un nouveau G8 élargi qui deviendrait le G13. On peut contester la thèse de Nicolas Sarkozy, mais il ne convient pas de l'interpréter faussement. Il est peu probable que son argument soit un geste spécifique dirigé contre la Russie.

Autre chose suscite une inquiétude. Les résultats d'un sondage d'opinion française sur la politique étrangère réalisée à la demande du ministère des Affaires étrangères ont été publiés à la veille du discours prononcé par Nicolas Sarkozy. Dans le chapitre du sondage consacré au rôle des grandes puissances dans l'arène mondiale, selon 82% des Français, l'Allemagne agit pour le bien de l'humanité, les Etats-Unis ne plaisent qu'à 38%, la Russie n'est considérée comme un ami que par un quart des habitants de la France. Seulement la Syrie (10%) et l'Iran (9%) ont une cote de popularité inférieure à celle de la Russie. C'est un "axe du mal". Si 75 Français sur 100 estiment que la Russie représente une menace pour leurs intérêts nationaux, c'est un guide d'action.

Auteur : Oleg Chevtsov, journaliste.

Cet article est tiré de la presse et n'a rien à voir avec la rédaction de RIA Novosti.

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