Kiev a déjà plusieurs fois déclaré des personnalités russes persona non grata, mais Moscou n'y réagissait jamais. Ce n'est pas un hasard si la décision de la Russie d'aggraver les relations avec l'Ukraine coïncide avec des démarches analogues vis-à-vis de la Géorgie. Les deux pays envisagent d'obtenir le statut de pays candidat à l'adhésion à l'OTAN, ce que Moscou cherche à empêcher.
Commentant les propos qu'aurait prononcés Vladimir Poutine dans les couloirs du sommet de l'OTAN à Bucarest, selon lesquels "l'Ukraine n'est même pas un Etat" et "une partie de ses territoires lui a été offerte par la Russie", M. Korneïtchouk a fait remarquer que "de telles déclarations représentent un fondement pour des restrictions d'entrée. Les hommes d'Etat russes feraient mieux de faire attention à ce qu'ils disent et où ils le font".
"Au vu des déclarations publiques de Evgueni Korneitchouk, nous supposons que ce dernier n'envisage pas de visiter la Fédération de Russie", a souligné jeudi le porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères Andreï Nesterenko.
Les listes des persona non grata existent en Russie depuis l'époque soviétique, mais Moscou cherche à ne pas abuser de cette mesure à l'égard des pays membres de la CEI (Communauté des Etats indépendants), a expliqué une source au sein du gouvernement russe. "En 2007, nous nous sommes entendus avec Kiev pour ne pas y recourir, mais la partie ukrainienne a violé cette entente, elle a plusieurs fois interdit l'entrée au député à la Douma d'Etat (chambre basse du parlement russe) Constantin Zatouline, puis au maire de Moscou, Iouri Loujkov". "Nous sommes obligés d'y répondre", a-t-il précisé.
Evgueni Korneïtchouk est un personnage qui n'est pas très en vue, même à Kiev. Le président ukrainien, Viktor Iouchtchenko, et l'actuel chef de la diplomatie ukrainienne Vladimir Ogryzko ont prononcé des propos bien plus grossiers à l'égard de la Russie. Cependant, le ministère russe des Affaires étrangères, traditionnellement circonspect dans ses déclarations, a réagi précisément aux propos de M. Korneïtchouk.
Mais le problème ne réside pas dans ses propos, ni même dans le principe diplomatique "oeil pour oeil". En faisant part au niveau du ministère des Affaires étrangères de ses doutes quant à la viabilité de l'Etat ukrainien, Moscou essaie manifestement de créer une atmosphère de conflit autour de l'Ukraine, afin d'ajourner l'octroi à ce pays du Plan d'action pour l'adhésion à l'OTAN. Etant donné qu'en décembre prochain, l'Ukraine pourrait recevoir ce plan, de même que la Géorgie, le récent appel du président nord-ossète Teïmouraz Mamsourov à réunir les républiques ossètes du Nord et du Sud, qu'il a récemment lancé au siège du ministère russe des Affaires étrangères, pourrait être interprété de la même façon.
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