Les Français entendent par "socialisme" une société juste sans pauvreté ni inégalités, où l'Etat lutte contre l'arbitraire du capital et soutient les couches démunies. Mais les premiers socialistes défendaient non pas le principe de la répartition équitable des richesses, mais celui de la répartition selon le travail. Sous le socialisme, écrivait Karl Marx dans sa "Critique du programme de Gotha", "le même quantum de travail qu'il (le producteur) a fourni à la société sous une forme, il le reçoit d'elle, en retour, sous une autre forme". Toujours selon Marx, "le droit du producteur est proportionnel au travail qu'il a fourni; l'égalité consiste ici dans l'emploi comme unité de mesure commune".
Toutes celles et tous ceux qui ont donné leurs voix à Ségolène Royal, sont-ils prêts à accepter cette approche? Rien n'est moins sûr. Car parmi les principales promesses de la candidate socialiste figuraient l'augmentation de 20% du salaire minimum (qui a pourtant progressé des deux tiers au cours des dix dernières années) et l'augmentation de l'allocation chômage à 90% du salaire pendant la première année suivant le licenciement. Jusqu'à présent, le PIB français est redistribué à 52% via le système budgétaire. Près de 60% de toutes les dépenses publiques prennent la forme d'allocations sociales diverses. Le montant moyen de l'allocation chômage qui s'élève à 965 euros est inférieur de seulement 2% (!) au salaire minimum, et il est versé pendant en moyenne 22 mois après la perte de l'emploi. Il n'est donc pas étonnant que 2,3 millions de personnes aptes au travail ne soient pas pressées de servir la société. Même pour ceux qui n'ont jamais travaillé de leur vie, il existe le RMI, le fameux revenu minimum d'insertion de 441 euros par mois.
Enfin, la France est la terre d'accueil de nombreux immigrés. Mais si aux Etats-Unis seulement 7% à 8% des immigrés se font recenser comme chômeurs après un an de séjour, la proportion est de 55% en France. Une société qui peut se le permettre est certes humaniste, mais est-elle socialiste? Si les pères du socialisme ont bien évoqué les droits de l'homme, ils n'ont cité que le droit au travail, et c'était une époque où personne n'avait jamais entendu parler de chômage.
Evitons d'évaluer les résultats de l'élection présidentielle française à l'instar de la majorité des médias européens de gauche. Le 6 mai dernier, les Français ont voté contre les socialistes, mais pour le socialisme. Ils ont opté pour un socialisme à visage humain, un socialisme pour les femmes et les hommes prêts à travailler et à gagner leur pain, en remplissant leur devoir envers la nation et non envers une foule de fainéants. Et si Mme Royal prône la répartition selon les besoins, elle n'a qu'à se déclarer communiste: qui sait, peut-être que son charme lui apportera plus que les 1,93% des voix obtenues cette fois par la candidate communiste?
Cet article est tiré de la presse et n'a rien à voir avec la rédaction de RIA Novosti.
